Il est loin le temps où la boss du rap game français était une femme. Dans les années 2000 en effet, personne du milieu rap hexagonal ne vendait plus de disques que la Parisienne Diam’s. En 2003, son deuxième album "Brut de femme" sort, avec le single ultra-commercial "Dj" et "Incassables" où elle parle des violences faites aux femmes. "Dur à croire, comme quand j'ai vu ma sœur en sueur/ Un inconnu, un couteau, une fellation dans l’ascenseur". Succès.
Trois ans plus tard, l’album "Dans ma bulle" arrive avec à nouveau un hit taillé pour les playlists radio et TV, "La Boulette". Succès encore. Les 750'000 exemplaires vendus permettent à la rappeuse d’honorer son pseudonyme et rafler un disque de diamant en avril 2007. Aucun rappeur n’avait réussi cette prouesse depuis le groupe IAM dix ans auparavant (sans compter Manau). Signe que Diam’s accède au rang de star: le titre "Confessions nocturnes" est parodié par Michaël Youn et Pascal Obispo. La même année, elle entre au Musée Grévin; c’est la seule artiste rap à y avoir figuré, jusqu’à aujourd’hui (Maître Gims semble toutefois être le prochain sur la liste).
Mais, en 2009, là où d’autres auraient définitivement transformé l’essai, Diam’s revient avec un album au titre évocateur, "S.O.S." Elle apparaît troublée par son énorme succès, en profonde remise en question à la suite notamment d’un voyage en Afrique. Le ton est plus triste, le cœur n’y est pas, le diamant ne brille plus. Cet appel à l’aide sera son dernier projet musical.
Fans de rap féminin et filles en quête de rôles modèles pensent alors pouvoir se raccrocher à une autre branche: celle de Keny Arkana. La Marseillaise est effectivement au début de sa carrière. Elle a sorti son premier album "Entre ciment et belle étoile" en octobre 2006. Puis quelques mixtapes. Là où Diam’s passe par toutes les grandes portes du showbiz, Keny préfère – malgré une signature en maison de disque – tracer sa route dans les sous-terrains, l’underground. Militante altermondialiste, elle participe à de nombreuses manifestations, dont un concert à Genève en 2007 pour la sauvegarde des squats. Mais si les deux rappeuses paraissent symétriquement opposées dans leurs images et messages, elles se rejoignent sur un point essentiel : l’énergie dégagée au micro.
Malheureusement, Keny Arkana va aussi se faire de plus en plus rare par la suite. Malgré deux projets sortis en 2011 et 2012, son allergie à l’exposition médiatique va créer un vide. Et comme personne ne prendra (réellement) le relai, on peut aujourd’hui affirmer que la première moitié des années 2010 est l’une des périodes les plus pauvres en rappeuses dans l’histoire du rap francophone.