C'était de toute manière chronique d’un triomphe annoncé puisque la soirée était sold-out et que les échos de la tournée garantissaient une belle proportion de morceaux des White Stripes, le célèbrissime premier duo de l'hyperactif.
Accompagné cette fois-ci d'un groupe plus étoffé et hyper-compétent, Jack White a offert au public montreusien - le meilleur du monde? - un panorama complet de son univers complexe. Complexe comme en témoigne son dernier album en date, "Boarding House Reach", que la presse spécialisée a écharpé, le qualifiant de brouillon, d'incompréhensible, voire d'inécoutable.
Orage sonique
Pour l'heure c'est du live, le compte à rebours qui s'affiche dans le décor - on a déjà vu ça chez The National par exemple - signifie bien qu'on va assister à un "spectacle moderne": 3-2-1, c'est parti!
Guitariste à haut taux de saturation, chanteur zeppelinesque énervé, Jack White attaque pied au plancher. Tant et si bien qu'une fois le premier choc passé et le décor à estrades lumineuses admiré, le spectateur est plongé dans un maelström de sons qui va soit l'épater grave ("mais comment fait-il?") ou alors le déconcentrer ("avec ces éclairages bleus, sûr que ces flemmards de journalistes vont nous sortir qu'il a choisi son camp, rapport au foot, tu vois!").
Le riff de "Baby Please Don't Go", cité en clin d'oeil à la fin d'un morceau, est révélateur du problème qu'essaie bravement de résoudre Jack White: réussir la synthèse entre références traditionnelles irréprochables et volonté de pousser le bouchon synthétique.
Et c'est lorsque l'orage sonique se calme et que la guitare acoustique fait son apparition que le feeling du patron s'exprime vraiment. Sa belle vieille âme, - le blues, baby! - ressurgit alors, comme pour montrer où est l'essentiel.
Originalité à tout prix
Mais bien vite, on est rattrapé par la surabondance de claviers (deux officiants) et d'arrangements à tiroirs. A chercher l'originalité à tout prix, Jack White finit par se perdre dans des démonstrations de virtuosité impressionnantes mais stériles, à l'image de ce que proposait la prog ou le jazz-rock dans les seventies.
La salutaire remontée de bretelles binaire du punk - quarante ans déjà - semble oubliée. Dommage, vraiment, parce que qu'est-ce qu'il joue bien, quand même ce Jack White....
Pierre-Yves Maspoli
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