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Nick Cave & The Bad Seeds, d'oraisons funèbres en horizons rock

Le chanteur australien Nick Cave sur la scène de l'auditorium Stravinski au Montreux Jazz Festival, le 12 juillet 2018. [2018 FFJM - Marc Ducrest]
Le chanteur australien Nick Cave sur la scène de l'auditorium Stravinski au Montreux Jazz Festival, le 12 juillet 2018. - [2018 FFJM - Marc Ducrest]
Nick Cave et son emblématique formation les Bad Seeds ont fait escale jeudi soir au Montreux Jazz pour un peu plus de deux heures d'une prestation lancinante et captivante en forme de prière rock qui devrait figurer dans les annales du festival.

Une captivante oraison funèbre et des horizons rock percés de guitares électriques et de percussions célestes. Quand résonnent les premières notes de "Jesus Alone" et les premières supplications d'un Nick Cave chantant "With my Voices/I'm Calling you", tandis que les écrans détourent en un gros plan noir et blanc son visage de croque-mort blême, on pressent déjà que l'heure sera à la fois grave et belle. Une forme de communion, où le sexagénaire chanteur australien a besoin de toucher les mains de ses fidèles.

Si le deuil de son défunt fils traverse autant qu'il pèse sur cette poignante chanson introductive extraite de l'album "Skeleton Tree" tout entier empreint de larmes, il n'empêche pas Nick Cave d'en métamorphoser les noirceurs en splendeurs vénéneuses. Un peu plus de deux heures plus tard jeudi, le messie d'une nuit psalmodie presque au coeur de ses fervents dans le parterre de la salle, pour les mélancolies stupéfiantes de "The Weeping Song" et "Push The Sky Away". Et l'auditorium Stravinski sait à cet instant-là qu'il a sans doute vécu l'une de ses plus intenses et intimistes messes rock aux côtés de Nick Cave & The Bad Seeds. Un concert qui pourrait rejoindre les annales du festival dans ce registre, non loin d'un Bowie et d'un Prince ces quinze dernières années.

La transe n'est jamais loin

Moins dantesque et volcanique qu'en novembre dernier à l'Arena de Genève, malgré quelques coups de tonnerre et éclairs ("From Her to Eternity", "Loverman" ou "Tupelo"), la prestation de l'Australien et de son mythique sextet de "mauvaises graines" multi-instrumentistes privilégie les lenteurs rythmiques, les climats sombres aussi lancinants que poisseux. Une allure qui sied encore à merveille à l'éternel prêcheur qu'est Nick Cave, la mine à la fois sévère, élégante et habitée dans son costume cintré noir.

Durant ce concert de quasi recueillement, ce requiem renforcé par la complicité entre Nick Cave et Warren Ellis qui alterne violon joué façon guitare, samples, guitare électrique et mandoline, la transe n'est jamais loin. A l'image de ce "Higgs Boson Blues" réarrangé encore qui chemine par le CERN de Genève, de "Jubilee Street" qui dévisage les filles sur sa route et que Cave entame façon crooner de mauvais augure au piano ou du désarmant et christique "Into my Arms" aux "O Lord" répétés et suppliants. Rarement cérémonie rock n'aura été aussi bien et ténébreusement récitée. Un culte notoire.

Olivier Horner

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