Compilation de pochettes d'albums de Charles Aznavour. [RTS]
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Retour sur la discographie de Charles Aznavour entre 1948 et 2007

Sélection de 13 albums marquants de Charles Aznavour. Des prometteurs débuts chansonniers au côté de Pierre Roche au plus rythmé et chamarré "Colore ma vie" en 2007, via les sommets que constituent "Qui?" ou "Autobiographie".

Compilation "Pierre Roche-Charles Aznavour"

Titres des années 1948-1950

Pochette de compilation "Pierre Roche-Charles Aznavour" [DR]
Pochette de compilation "Pierre Roche-Charles Aznavour" [DR]

8 faces 78 tours avec le quintette d'Henri Lecca (Polydor, 1948), réunies dans la compilation "Pierre Roche-Charles Aznavour" (EMI, 1996) avec les titres des années 1948-50.

Charles Aznavour pour les paroles, Pierre Roche pour les musiques. Le duo, épaulé musicalement par un quintette jazzy, grave "Voyez, c'est le printemps", "J'ai bu", "Départ Express", "Le Feutre taupé", "Tant de monnaie", "Je n'ai qu'un sou", "Je suis amoureux" et "Boule de gomme". Autant de titres aux tempos souvent rapides, swinguants.

Trenet, son maître absolu

Comme le note Daniel Pantchenko dans sa biographie "Charles Aznavour ou le destin apprivoisé", Aznavour a beau affirmer que son maître absolu Trenet ne l'avait jamais influencé dans l'écriture, quelques similitudes surgissent au détour du très rythmé "Voyez, c'est le printemps" et son "Voyez, déjà sont revenues les hirondelles/C'est l'printemps". Esprit jazzy, mélodies primesautières, fraîcheur ou légèreté du propos, le tandem Roche-Aznavour développe déjà sa patte.

Jeux de mots et fantaisies

Une espèce de fantaisie romanesque dont "Départ express" et "Le Feutre taupé", avec jeux de mots et onomatopées exquis, sont les chansons emblématiques. Quant aux premiers couplets de "Tant de monnaie", ils préfigurent la thématique qui fera le succès dix ans plus tard du "Poinçonneur des Lilas" de Gainsbourg; "Je suis releveur d'appareils automatiques/ A toutes les heur's j'ai des pièces métalliques".

Charles Aznavour chante... Charles Aznavour no1

33 tours 25 cm Ducretet-Thomson, 1953

Pochette de l'album "Charles Aznavour chante Charles Aznavour". [DR]
Pochette de l'album "Charles Aznavour chante Charles Aznavour". [DR]

En 1952, Aznavour enregistre un 78 tours avec une adaptation du "p" de Frankie Laine popularisé par sa protectrice Piaf un an plus tôt. Fiasco commercial. Malgré ce faux départ en solo, il en enregistre quatre autres dans les dix-huit mois suivants.

Les éloges de Charles Trenet

En décembre 1953 paraît "Charles Aznavour chante... Charles Aznavour no1", premier 25cm dont Charles Trenet fait l'éloge dans une note au verso: "Je crois que Charles Aznavour est le seul artiste français capable de chanter en style jazz avec poésie et musicalité. Son rythme et sa nostalgie le rendent inimitable. Je l'admire autant pour ce qu'il écrit que pour ce qu'il interprète. Il est vrai. La chanson est en marche!".

Un succès pas encore assis

Aznavour écrit énormément pour les autres mais le succès personnel n'est pas encore de taille. En dépit de chansons comme la pétillante "Oublie Loulou", la sentimentale "Plus bleu que tes yeux", le fantaisiste "Mé qué, mé qué", l'épicurien "Et bâiller et dormir" ou l'irrévérencieux "A propos de pommier".

Charles Aznavour chante... Charles Aznavour no3

33 tours 25 cm Ducretet-Thomson, 1956

Alors que sa maison de disques vient de judicieusement exploiter le répertoire déjà fourni de son poulain avec "Aznavour se souvient de Roche et Aznavour" et, surtout, "Interdit au moins de 16 ans" qui joue sur la fibre scandaleuse pour l'époque que revêtent ses chansons regardant l'amour et la nudité en face ("Après l'amour", "Je veux te dire adieu" ou "L'amour à fleur de coeur"), paraît en mai 1956 "Charles Aznavour chante... Charles Aznavour no3".

Un style émerge

Y figurent "Après l'amour", "Sur ma vie", "Prends garde", "Je cherche mon amour", "On ne sait jamais", "Viens avec toi" ou "J'aime Paris au mois de mai".

Avec force cuivres pour certaines chansons, orchestrations gentiment swing pour d'autres, Aznavour égrène sa poétique des sentiments et ses regards en coin. Un style se dessine plus précisément.

Charles Aznavour, Charles Aznavour

33 tours 25 cm Barclay 80135, 1960

L'envol. En créant à l'Alhambra parisien "Je m'voyais déjà", chanson sur le métier que tout le monde lui a déconseillé de chanter et que certains ont refusé d'interpréter, Aznavour décolle enfin. Pour ne plus jamais atterrir de la planète succès.

Une voix fêlée qui plaît

L'auteur et acteur remarquables se muent définitivement en interprète remarqué. La voix moins "laryngitée", comme disaient les critiques de l'époque, quoique toujours fêlée, une interprétation parfois plus dramatique et précise achèvent de convaincre.

Objecteur de conscience

Les effusions de "Quand tu m'embrasses", les buissonniers et insouciants "L'enfant prodigue" et "Tu vis ta vie mon coeur", le jazzistique "Prends le chorus", le déchirant "L'amour et la guerre" évoquant l'objection de conscience en pleine guerre d'Algérie avec des sanglots de violons, l'aussi cru qu'immoral "Monsieur est mort" et l'amour déçu soulevé dans "Comme des étrangers" forment l'ossature solide d'un répertoire en voie de pérennisation.

>>> À voir: "Je m'voyais déjà" de Charles Aznavour

Qui?

30 cm Barclay, 1963

Pochette de l'album "Qui?" de Charles Aznavour. [DR]
Pochette de l'album "Qui?" de Charles Aznavour. [DR]

Le timbre assourdi et voilé d'Aznavour fait désormais autant merveille que recette. "Je m'voyais déjà" a fait basculer Aznavour dans une autre dimension. Vedette incontestée du music-hall, il affermit son nouveau statut avec des versions de ses chansons en langues étrangères, des réenregistrements de vieux titres, des textes pour d'autres interprètes et plusieurs albums personnels.

Une activité discographique frénétique

Entre 1961 et 1972, l'activité discographique d'Aznavour est même quasi frénétique, avec un album d'inédits par an en moyenne. Peu après avoir gravé l'incunable "Les comédiens" dont l'esprit bohème se calque à merveille sur sa précoce vie de saltimbanque, Aznavour renforce encore son aura avec "Qui?". Un album taillé en partie pour sa conquête des Etats-Unis avec le bilingue "For me...formidable" truffé d'humour.

"Un humour corrosif"

Une veine plus fantaisiste quelque peu délaissée que le chanteur creuse encore via "Dors", en se rêvant sourd au côté d'une femme sublime hélas excessivement bavarde. Et au fil de "Tu t'laisses aller" où un humour corrosif teinté de tendresse à l'adresse d'un amour aussi déçu que déchu lui fait dire: "Pour maigrir fais un peu de sports/Arrange-toi devant ta glace/Accroche un sourire à ta face/Maquille ton coeur et ton corps".

Choquer la morale

En une poignée d'autres chansons ("Tu exagères", "Bon anniversaire", "Au clair de mon âme", "Trop tard", "Il viendra ce jour"), Aznavour parvient à brillamment décliner les phases de l'amour, les bas plutôt que les hauts en l'occurrence. Seuls "Qui?" et, surtout, "Donne tes seize ans" jurent dans ce panorama de l'idylle. Le premier titre met en scène des amants de vingt ans d'écart et le second déclare sa flamme à une très jeune femme. Ce couple de chansons érotiques et provocatrices souille bien sûr les chastes valeurs morales de l'époque.

>>> À voir: "Tu t'laisses aller" de Charles Aznavour

Hier encore

30 cm Barclay, 1964

Aznavour aux mains d'or écrit alors une trentaine de chansons par an. Une profusion dans la production qui n'empêche point la qualité d'écriture. A l'image d'insolents succès tels "Que c'est triste Venise" malgré son côté image d'Epinal, la nostalgie sublimée d'"Hier encore" revenant une fois de plus sur cet âge symbolique de 20 ans parsemant le répertoire d'Aznavour, ainsi que l'immédiateté mélodique et valsée de "Le temps".

Le jazz, support du sentiment

Pour encadrer ces trois tubes, ce nouvel album 30 cm sans nom rebaptisé "Hier encore" au fil du temps et des rééditions égrène les thématiques sentimentales sur des tempos rapides voire très jazz confié à un grand orchestre à l'américaine avec force cuivres et cordes: "Je t'aimais tant", "Toi et tes yeux d'enfant", "Tu t'amuses", "Chaque fois que j'aime" ou le touchant "Il te suffisait que je t'aime".

Un coeur qui bat vite

A moins de quarante ans, réminiscences amoureuses nostalgiques débordent des couplets et refrains d'un Aznavour dont la plume semble téléguidée par les battements rapides de son coeur. Fièvres et effusions, passions et déraisons, jeunesse et temps qui file sous-tendent le moindre texte d'un Aznavour qui a définitivement trouvé son style, son art et sa manière.

>>> À voir: "Hier encore" de Charles Aznavour

Entre deux rêves

30 cm Barclay, 1967

Pochette de l'album "entre deux rêves" de Charles Aznavour. [DR]
Pochette de l'album "entre deux rêves" de Charles Aznavour. [DR]

En 1966 sont réunis sur disques deux immenses succès d'Aznavour. D'un côté il y a "La Bohème" et son anthologique "Je vous parle d'un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître", paroles de Jacques Plante pour l'opérette "Monsieur Carnaval" (livret Frédéric Dard, musique Aznavour), qui se voit interpréter tant par Aznavour que Georges Guétary (acteur-chanteur de l'opérette).

Une chanson emblématique

De l'autre "Paris au mois d'août", grande fresque sentimentale servant de thème au film de Pierre Granier-Deferre. Dans le sillage de ce double coup d'éclat sort "Entre deux rêves", album que l'on retiendra surtout pour une chanson devenue -au fil du temps et non instantanément- emblématique du répertoire d'Aznavour: "Emmenez-moi".

Des paroles toujours aussi suggestives

Pour compléter le tableau, toujours quelques discours passionnés comme "Eteins la lumière" et sa charge explicitement suggestive ou les plus sentimentaux "Entre nous", "Adieu", "Un jour" ou "Il te faudra bien revenir". Le lyrisme christique et rêveur de "Yerushalaim", décapsulé au sortir de la guerre des Six-Jours, déteint quelque peu dans ce chapelet de chansons partagées entre le voyage, l'obsessionnelle  nostalgie et un romantisme bon teint.

>>> À voir: "Emmenez-moi" de Charles Aznavour

Idiote je t'aime...

30 cm Barclay, 1972

Alors qu'en 1971 "Non je n'ai rien oublié" et "L'instant présent" forment l'antinomique incarnation d'un nouvel Aznavour ("Non je n'ai rien oublié"), balançant entre la fresque d'un échec passionnel et la détaillée intellectualisation d'un moment furtif, paraît "Idiote je t'aime..."

Deux grands tubes

L'album comporte deux chansons formant sans doute les ultimes grands tubes d'Aznavour, soit "Comme ils disent" et "Les plaisirs démodés". Portrait émouvant d'un homosexuel vivant chez sa mère et exposé à toutes les moqueries, "Comme ils disent" est en avance sur les moeurs de son temps, où l'homosexualité affichée reste tabou. Tandis qu'à l'opposé, "Les plaisirs démodés" creuse un sillon plus léger et romantique, sous un vernis pop psychédélique d'abord puis un habillage de balade mid-tempo apprêté d'un slogan transgénérationnel imparable: "les époques changent, l'amour reste".

Élargir son registre

Ainsi, Aznavour s'empare-t-il progressivement de thématiques sociétales, élargissant enfin plus clairement le champ de ses registres usuels d'écriture. Outre son titre éponyme, "Idiote je t'aime..." s'appuie pour le reste encore, et surtout, sur les règles douloureuses ou enivrantes de la grammaire amoureuse avec "L'indifférence", "Je t'aime" ou le troublant "A ma femme" qui se projette habilement dans le temps.

Autobiographie

30 cm Barclay, 1980

Aznavour a traversé tambour battant les années 70, sillonné les prestigieuses scènes internationales et publié quantité d'albums originaux ou captés en public en plusieurs langues. Vedette presque mondiale, il amorce à l'aube de la nouvelle décennie un virage inédit ou la fin d'un cycle. C'est selon.

Mise à nu

Reste qu' "Autobiographie" et sa chanson éponyme fleuve de sept minutes offrent un visage plus net de l'homme et de l'artiste. Il y dévoile ses racines familiales, les années de disette, les soubresauts de sa carrière et ses états d'âme. Se défendant jusqu'ici d'intégrer des références autobiographiques au sein de son répertoire, Aznavour se met volontairement à nu sous une jaquette reproduisant une couverture de roman.

La sensualité, une source intarissable

Bien sûr, l'album n'est pas exclusivement truffé d'éléments personnels ("Je fantasme") mais Aznavour lâche suffisamment de lest pour s'offrir un semblant de virginité artistique. La sensualité textuelle tient ici encore le haut du pavé avec "Le souvenir de toi", "Mon émouvant amour" ou l'excellent et orientalisé "L'amour, bon Dieu l'amour". Bien que la source semble intarissable aux yeux du chanteur, elle finit toutefois par avoir quelques rejets pénibles à la longue. Au point que sa déclaration d'amour à la cité phocéenne au fil de l'enlevé "Allez! Vaï Marseille" constitue une récréation bienvenue dans ce déluge d'étreintes de coeurs battants.

Aznavour

30 cm et CD Tréma, 1987

Aznavour a très peu écrit depuis le début des années 80 et "Autobiographie": une vingtaine de chansons tout au plus de son propre aveu. L'artiste s'est par contre produit au cinéma et dans des séries TV, a chanté les textes de son défunt ami Bernard Dimey ("Charles chante Aznavour et Dimey"), a racheté son catalogue de 358 titres à la maison de disques Barclay et commercialisé des rééditions, compilations, réenregistrements et continué de sillonner les scènes du globe, etc.

Manque d'inspiration

Si un album d'inédits paraît tout de même en 1986, avec "Les émigrants (tous ensemble)" évoquant fortement "L'émigrant" de 1954, il n'est pas traversé d'une inspiration foudroyante. Le disque dénué une fois de plus de titre publié en 1987 s'avère de meilleure facture. Sur les onze chansons, deux sortent largement du lot: "Je bois" qui rappelle l'antique "J'ai bu" dans une veine plus "brellienne" et "Je ne ferai pas mes adieux" d'esprit "brassenien".

Une retraite scénique

L'éthylisme, tragique, sert ici à "oublier mes années d'infortune/Et cette vie commune/Avec toi mais si seul/Je bois pour me donner l'illusion que j'existe" et décrit la mortelle déroute d'un couple. La promesse chantée de rester en selle permet à Aznavour de mieux brocarder ces artistes multipliant les fausses retraites scéniques: "Moi les fausses sorties me pompent l'oxygène (...) On compte sur la main ceux qu'ont quitté la scène/Les autres le public leur a repris les clefs/Sincèrement mieux vaut en rire".

Ces deux climax sont ceints notamment de trois autres titres habiles: "Je rentre chez nous" (histoire d'un infidèle repenti), "L'aiguille" (sur les méfaits de la drogue ) et "Les bateaux sont partis" (adaptation d'un Dimey saisi de fièvre amoureuse).

Toi et moi

CD Musarm, 1994

Pochette de l'album "toi et moi" de Charles Aznavour. [DR]
Pochette de l'album "toi et moi" de Charles Aznavour. [DR]

Passablement occupé par l'Arménie, terre de ses origines, dès 1989 et le violent séisme qui a ravagé le nord du pays début décembre 1988 et causé des dizaines de milliers de victimes, Aznavour revient tout de même successivement aux affaires phonographiques: en 1991, avec le dispensable "Aznavour 92" malgré une chanson poignante sur le viol ("La Marguerite") et en 1994 avec le très fleur bleue "Toi et moi".

Arracher les pleurs

"Toi et moi/Deux coeurs qui se confondent/Au seuil de l'infini/Loin du reste du monde", proclame l'hymne phare donnant d'emblée le ton d'un album au lyrisme sentimental exacerbé dont l'épilogue renchérit encore sur un "Aimer" aux airs de tango. Suite de variations en douze temps sur des je t'aime plus ou moins convaincants, "Toi et moi" est taillé pour arracher les pleurs et déchirer les coeurs.

Torrides étreintes

De "Je t'aime A.I.M.E." au fameux et torride "Ton doux visage" n'oubliant pas de dégrafer un corsage au passage via "Un amour en transit" ou "Inoubliable", Aznavour ne lésine point sur les effets affectifs. "Trenetement" offre heureusement un peu d'oxygène à ces étreintes grâce un hommage à l'autre grand Charles de la chanson. Au même titre que l'autobiographie "A ma manière" et le regard dans le rétro proposé par "Les années campagne".

Aznavour 2000

CD EMI, 2000

Après avoir imaginé un duo virtuel avec sa chère Edith Piaf en 1997 au fil de "Plus bleu que tes yeux" à près de cinquante ans d'écart au coeur de l'album "Plus bleu...", avoir murmuré de nouveaux mots doux aux femmes et évoqué le sida sur "Amour amer", Aznavour célèbre une énième rentrée parisienne en décidant cette fois de se réapproprier le jazz.

De l'amour, toujours...

Avec force cuivres et arrangements d'un bleu intense, "Le jazz est revenu" donne l'allure swinguante de cet "Aznavour 2000". Où, malgré l'entrée dans un siècle neuf, le beau sexe et l'amour jouent toujours les premiers rôles ("Dans tes bras", "Quand tu m'aimes", "J'ai peur", "Elle a le swing au corps", "Habillez-vous", la reprise d' "Après l'amour", "Je danse avec l'amour").

Hommage à Dalida

Tandis qu'un beau coup d'oeil dans le rétro ("Qu'avez-vous fait de nos vingt ans?" ) et un hommage appuyé à la défunte Dalida ("De la scène à la Seine") agrémentent ce répertoire millésimé au sein duquel Aznavour se permet même quelques agréables fantaisies langagières sur la féminité ("La Formule un"). Les affres du divorce ("Nos avocats") constituant enfin la seule thématique sociétale de ce disque aux agréables équilibres entre textes et musiques.

Colore ma vie

Capitol - EMI, 2007

Pochette de l'album "Colore ma vie" de Charles Aznavour. [DR]
Pochette de l'album "Colore ma vie" de Charles Aznavour. [DR]

Sur "Je voyage", précédent album original de 2003, "Lisboa" activait un fado doux-amer avant qu'Aznavour n'aille promener sa voix désormais claire sur des airs jazz, bossa ou des ambiances cabaret. Entre coups de bourdon habituels et mots d'esprit, l'album était à quelques titres anecdotiques près (quand il épingle "La critique" sur la musique de "La bohème" ou chante avec sa fille Katia) un album plaisant.

Avis mitigés

Trop thé dansant vaporeux toutefois pour séduire à terme. "Colore ma vie", enregistré à La Havane en compagnie de l'immense pianiste cubain Chucho Valdes, inspire onze ans plus tard les mêmes commentaires mitigés. Pertinent sur "Moi, je vis en banlieue" grâce à des parallèles avec sa propre histoire d'immigrant arménien, il enfonce en revanche plutôt des portes ouvertes sur "La Terre meurt". Se faire l'écho à 82 ans de deux thèmes d'actualité brûlants tels que la question des banlieues et l'écologie ne lui réussit hélas qu'à demi.

Entre "ironie et fausse modestie"

La meilleure chanson du disque au final est "J'abdiquerai", qui évoque sa mort et les honneurs en entremêlant ironie et fausse modestie sur un tempo souriant. Celui qui "a osé chanter l'amour comme on le ressent, comme on le fait, comme on le souffre", dixit Maurice Chevalier, n'oublie évidemment pas de retirer sur la corde sentimentale avec une poignée de titres inégaux: le chic "Il y a des femmes" ou le pénible "T'en souvient-il?".

Crédits

Une proposition de Olivier Horner

Ces textes ont été publiés en 2011 dans un hors-série du magazine "Vibrations" consacré à Aznavour: "Aznavour, ses adieux" - Vibrations Collector/Editions Consart SA - 2011

Réalisation web: Laura Aubert

Octobre 2018

RTS Culture