Un enfant de la balle. A l'image de sa bienveillante protectrice Edith Piaf. Charles Aznavour dit pratiquer le métier de la scène depuis 1933. Soit depuis l'âge de 10 ans. Mais "je n'ai finalement jamais choisi de l'exercer: il s'est introduit en moi d'un seul coup, sans que je m'y attende", précise-t-il dans les réflexions autobiographiques consignées dans A voix basse. A l'âge où l'on court les récréations, Charles Aznavourian de son vrai nom court déjà les auditions.
Au coeur de Paris, son père a pris la gérance d'un petit café, rue Cardinal-Lemoine. Juste en face se trouvait ce qu'on nommait alors une école du spectacle. Avec sa soeur Aïda, Aznavour y suit des cours de théâtre. Les metteurs en scène y recrutent les enfants pour des rôles dans des pièces ou des films. Son premier rôle sera celui d'un petit Africain dans la pièce allemande Emile et les détectives.
Les dés sont jetés pour ce fils d'émigrants arméniens arrivés en France en 1923. Et quand son père Mischa s'engage en 1940 et part au front pour son pays d'adoption - bien qu'apatride pour l'état civil -, l'enfance s'arrête d'un coup sec pour l'adolescent Aznavour.
"La guerre avait détruit le peu d'insouciance qui nous restait". S'il arrondissait déjà les fins de mois de la famille avec ses figurations et petits rôles depuis quelques années, il va dès lors encore trouver mille petits métiers et combines pour subvenir aux besoins de la famille restante dans un Paris occupé.
Son père, ancien baryton, a chanté pour les exilés d'Europe centrale dans le restaurant arménien qu'il avait d'abord ouvert à son arrivée à Paris. Knar, sa mère, jouait du piano entre ses différents travaux de couture. Si l'enfance conserve un parfum agréable et joyeux pour Aznavour, élevé ainsi dans l'amour des arts de ses parents entre disques à la mode, musique classique, chants traditionnels et piano, elle aura toutefois été de bien courte durée. Il confesse d'ailleurs n'y avoir "jamais vraiment eu droit à l'enfance". Et de conclure: "on a la jeunesse que l'on peut2.