Inspiré par des faits réels, mais basé sur des dialogues fictifs, "Le Serpent" raconte l'histoire d'un des pires meurtriers français. Avec sa compagne de l'époque, Charles Sobhraj se liait d'amitié avec des backpackers occidentaux venus sur le "Hippie Trail" (la route des hippies) en quête de spiritualité avant de les droguer et parfois de les tuer afin de s'emparer de leur fortune. Âgé aujourd'hui de 77 ans, Charles Sobhraj purge une peine de prison à vie au Népal.
Tueur sadique et calculateur, son surnom de "Serpent" lui vient de ses talents de manipulateur charismatique, de sa capacité à échapper à la police et de ses quelques évasions réussies. Une personnalité hors norme qui devait bien finir par attirer la convoitise du monde du cinéma. C'est désormais chose faite avec cette mini-série britannique de huit épisodes à voir actuellement sur Netflix.
Une vraie performance d'acteur
Dans "Le Serpent", Charles Sobhraj est campé par l'acteur français Tahar Rahim qui s'est complètement métamorphosé pour endosser le rôle. Découvert dans "Un prophète" de Jacques Audiard en 2009 et devenu depuis l'un des comédiens français les plus demandés de sa génération, il réussit là une vraie performance. A la fois stoïque et étrangement séducteur avec ses cheveux longs, son teint hâlé et ses grosses lunettes fumées, il parvient à créer une atmosphère malsaine dès la première scène.
En interview, l'acteur raconte qu'il a lu la biographie de Charles Sobhraj à l'âge de 16 ans. Face à une personnalité aussi complexe et hors du commun, le jeune homme qui se projetait déjà dans le métier d'acteur s'imaginait alors incarner le tueur en série.
Lorsqu'on lui propose vraiment le rôle, il y voit une sorte de clin d'oeil du destin et ne peut pas refuser. Mais il a fallu qu'il se documente et qu'il travaille beaucoup pour trouver la manière la plus juste possible de jouer un personnage aussi pervers que Charles Sobhraj. Et ceci afin de respecter aussi les victimes et leurs familles.
Pour être le plus crédible possible, il décide de s'isoler complètement durant les premiers jours de tournage; refusant même de parler à ses partenaires sur le plateau ou en dehors. Une manière de faire qu'il a trouvé lui-même très désagréable, mais qui lui a permis de créer à la fois de la distance et de l'inconfort avec les autres acteurs et actrices, et d'entrer donc pleinement dans son rôle.
Une série qui va crescendo
C'est la Britannique Jenna Coleman qui incarne Marie-Andrée Leclerc, sa compagne et complice québécoise fascinée par Charles Sobhraj. Si son jeu d'actrice tient la comparaison avec celui de Tahar Rahim, les spectateurs francophones qui visionneront la série en version originale regretteront les scènes où elle s'exprime en français. L'actrice qui a dû apprendre les rudiments de cette langue en quelques semaines seulement n'arrive en effet ni à se faire toujours comprendre ni à faire croire qu'elle parle un français du Québec.
Si l'alternance entre les scènes qui montrent le couple de meurtriers ou leurs victimes et celles qui se concentrent sur l'enquête menée par un bureaucrate de l'ambassade de Hollande et sa femme suite à la disparition d'un jeune couple fonctionne bien, la surabondance de flashbacks embrouille hélas plus qu'autre chose la narration.
La série qui reconstitue de manière réaliste et réussie l'Asie des années 1970 gagne pourtant en intensité au cours des épisodes. En multipliant les points de vue sur Charles Sobhraj, elle permet de cerner un peu mieux la personnalité manipulatrice, fascinante et mystérieuse du tueur en série français sans pour autant le glorifier ou le rendre sympathique.
Sujet radio: Antoine Bal
Texte et adaptation web: Andréanne Quartier-la-Tente