Si l’on en croit les propres classements de Netflix et les échos adolescents qui sont parvenus jusqu’en Suisse romande, "Squid Game" est la série de l'automne. On peut traduire son titre par "Jeu du calmar", un divertissement auquel les enfants sud-coréens jouaient dans les années 1970-1980. Un peu comme notre "zig-zag-zoug".
Sauf qu’ici, les joueurs sont des adultes criblés de dettes. Aux abois, poursuivis par des débiteurs parfois peu recommandables, ils acceptent de participer à des jeux d’enfants innocents qui peuvent rapporter des millions aux gagnants. Les perdants, en revanche, sont très mal barrés.
Ne surtout pas bouger
Les 456 hommes et femmes sélectionnés pour le jeu commencent par s'ébattre dans un "1, 2, 3, soleil". On les voit dans une cour, face à une poupée géante facétieuse qui compte, puis se retourne. Attention, il ne faut pas bouger, sinon c'est perdu!
Et dans "Squid Game", une défaite à un jeu pour enfant se traduit par la mort, violente et sanglante. Heureusement, les participants ont le choix. Ils peuvent décider via un vote de tout arrêter. Sauf qu’une fois de retour à la maison, les dettes abyssales et la réalité brutale de la société les poussent à y retourner.
La série offre donc le choix entre la peste et le choléra: un jeu mortel qui peut apporter très éventuellement la richesse ou une vie quotidienne criblée de dettes insurmontables.
On ne se fie pas aux gens parce qu’ils sont fiables, on se fie aux gens parce qu’on n’a pas le choix.
Une série retorse et cruelle
Il y a de la cruauté, de la noirceur et une énorme tension dans cette série tordue, tourmentée, retorse, vicelarde et subversive qui a tout pour plaire. Il est intéressant de souligner qu'elle réunit tous les codes d’une série à succès en 2021: "La casa de papel" pour les tenues et le huis clos, "Alice in Borderland" pour sa culture du jeu et "Orange Is the New Black" pour l’ambiance prison. On peut même y rajouter une tombée de critique sociale, comme dans le film "Parasite".
Et puis il y a aussi l’aspect Corée du Sud à ne pas négliger. La mode est à la K-Pop, même dans les cours de récré de Suisse romande. De quoi doper ce genre du K-Drama, par exemple avec un acteur comme Gong Yoo, qui devient une vedette mondiale auprès des ados.
Transformer "1-2-3 soleil", "zig-zag-zoug", les pogs, l’élastique ou le tirage de corde en piège mortel, il fallait y penser. Transformer "le petit pont massacreur" ou la corde à sauter en objectif vénal, cela relève du génie. Du génie maléfique, certes, mais du génie quand même.
Antoine Droux
Adaptation web: mh