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Le boom des séries met l'industrie du tournage sous pression

Ambiance de tournage, Dirty Money, l'Infiltré de D. Othenin-Girard. [RTS]
Le boom des séries met l'industrie du tournage sous pression / Tout un monde / 8 min. / le 15 juillet 2022
L'industrie du cinéma et de l'audiovisuel reprend des couleurs après la crise du Covid et une année 2020 particulièrement difficile. La production cinématographique est repartie à la hausse en 2021.

Selon le Centre du cinéma et de l'image animée, il y a eu en France en 2021 40% de films produits en plus par rapport à l'année précédente. Un effet de rattrapage bien sûr, mais pas seulement. Ce qui frappe dans les capitales européennes du cinéma, c'est le nombre de jours de tournages qui explose.

Pour les techniciens du son et de l'image, la période est intense, comme l'explique à la RTS Isabelle Thillien, régisseuse à Paris qui travaille principalement pour le transport et la logistique: "Clairement, il manque des gens, il manque de la main-d'oeuvre. En fait, il y a des tournages un peu partout, dans tous les studios. [...] Pour vous dire, il n'y a plus un bus à louer, plus de camions disponibles. On bataille un peu pour les techniciens, il y a une pénurie".

Une activité intense confirmée à la RTS par Rémi Bergues, directeur de Films Paris Région, une organisation qui accompagne les tournages. Chaque jour entre 15 et 20 tournages ont lieu en Ile-de-France. La région parisienne compte 7000 jours de tournage par an contre 5000 il y a deux ans, précise Rémi Bergues.

Le monde du cinéma chamboulé

Cette situation a plusieurs explications. Tout d'abord l'impact de la directive européenne qui oblige les plateformes à localiser une partie de leur production et à réinvestir une partie de leurs bénéfices. De plus, le marché est en expansion avec des plateformes en phase de production de leurs "catalogues" afin de garder leurs abonnés.

"Quand on tourne un film, on a plusieurs mois pour tourner 120 minutes. Quand on a une série, on va travailler sur huit épisodes, donc on a besoin de tourner dans un temps très court un nombre important de minutes de cinéma. Cela implique et oblige l'industrialisation: maîtriser à la fois les aspects météo, les aspects logistiques, les aspects techniques...", explique encore Rémi Bergues.

Le retour en studios

Tourner en studio permet de maîtriser une grande partie des éléments logistiques et techniques. A Provence Studio, basé dans le sud, près de Marseille, on en est bien conscient. Olivier Marchetti, fondateur de ces studios interrogé par la RTS, admet que face à cette industrialisation de la production, les studios sont un outil efficace: "C'est plus pratique de tourner en studio. Vous avez la possibilité d'utiliser les praticables, donc vous pouvez bouger les murs. Il y a plus de place pour l'artistique que dans des milieux contraints, comme un appartement [...] Et comme les décors sont assez récurrents, ça permet, à partir d'un certain nombre de jours, de faire baisser le coût de production". Mais là encore, l'industrie du cinéma français fait face à une pénurie.

La concurrence entre le cinéma et les séries

Même si les techniciens travaillent davantage, les entrées au cinéma n'ont pas retrouvé leurs niveaux d'avant Covid. "Les salles de cinéma ont encore, je crois, 40% en moins d'entrées que ce qu'elles avaient en 2019, pour l'instant, en 2022 en France. Cela veut dire que pour les cinémas, c'est plus dur, effectivement, parce qu'il y a les plateformes. Il y a aussi beaucoup de chaînes de télé qui investissent et qui veulent avoir leur plateforme", explique à la RTS Martin Barnier, historien du cinéma et professeur à l'Université Lyon II. Plus de travail donc pour les techniciens, mais moins pour les distributeurs et pour les salles de cinéma.

Le numérique et les plateformes se sont emparés des séries, de cette grammaire en épisodes. Un genre qui n'est pourtant pas nouveau, tout comme la concurrence entre les séries et le cinéma. Difficile de savoir si les plateformes vont aider ou au contraire manger le cinéma, mais pour Martin Barnier, l'expérience du cinéma restera toujours cette sensation unique en termes de son, de collectif aussi, une véritable expérience en somme, impossible à vivre de son canapé.

Sujet radio: Blandine Levite

Adaptation web: ld

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