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Coproduite par la RTS, "Ceux qui rougissent" sacrée meilleur format court à Séries Mania

"Ceux qui rougissent", de Julien Gaspar-Oliveri. [Melocoton]
Par ici les Séries: Par ici les SériesMania - Julien Gaspar-Oliveri / Vertigo / 4 min. / le 21 mars 2024
Signée Julien Gaspar-Oliveri, "Ceux qui rougissent" a été honorée le 22 mars du Grand prix dans la catégorie formats courts du festival Séries Mania de Lille. Comédie dramatique, elle raconte la rencontre entre des lycéens et un professeur de théâtre dont les méthodes vont bouleverser les adolescents.

La Suisse peut bomber le torse sans rougir tant le jury de la compétition séries de formats courts du festival Séries Mania de Lille, en France, emmené par le cinéaste Fabrice Gobert ne s'y est pas trompé.

C'est avec une pointe d'émotion et un enthousiasme rare en pareille cérémonie de remise de prix, qu'il a loué, lors du palmarès qui s'est tenu le vendredi 22 mars, les qualités d'une série émouvante, captivante et drôle, une réussite sur toute la ligne.

Interrogé à Lille par la RTS, Julien Gaspar-Oliveri a souligné à quel point il avait été chanceux dans cette aventure d'avoir pu compter sur Box Production, Arte et la RTS. Ces institutions, attentives à ce projet dont le scénario était écrit au conditionnel avec des adolescents pour certains vierges de toute expérience du théâtre et du cinéma, ont su prendre le risque payant de contribuer à l'émergence d'une série hors norme. 

Option théâtre

Ambiance. A l'intérieur d'un gymnase, sur le parquet, une troupe d'adolescents en option théâtre s'impatiente. Leur professeur brille par son absence. Pourtant, le travail ne manque pas, avec une pièce de Shakespeare à répéter. Soudain, un jeune homme à la démarche volontaire débarque et se présente comme le remplaçant temporaire. Il questionne et prend le pouls de l'assemblée.

Ses méthodes rustres désarçonnent les apprentis comédiens. Pire, lorsqu'il décide de redistribuer les rôles, la plus forte en gueule ne s'en laisse pas conter. Elle a bûché, sait son texte par cœur et crie à l'injustice. Réaction du professeur: "Mais connais-tu seulement l'ensemble du récit? Tu serais donc la comédienne d'un seul et unique rôle dans ta vie, incapable de jouer autre chose?"

Proche du documentaire

Signée Julien Gaspar-Oliveri, la série "Ceux qui rougissent" offre une captation proche du documentaire avec deux caméras tournant en permanence sans que jamais les mots "action" et "couper" ne soient prononcés. Ainsi plongés en immersion, les spectateurs ressentent exactement les émotions des élèves. Sans cesse sur le qui-vive, ils doivent gérer la pression, outrepasser leur timidité, se libérer face à ce professeur rude, mais bienveillant, qui agit tel un tsunami et profite de chaque geste et réaction verbale ou physique pour faire naître du théâtre.

Tous les prétextes sont bons pour jouer. Il n'hésite pas à les plonger dans certains états psychologiques, sans jamais les violenter, pour leur apprendre à ressentir afin de mieux interpréter. Sur le thème du rejet et de l'au revoir à l'aube d'une rupture amoureuse, les corps s'expriment dans la douleur. Les rejetés tentent un hug, en vain, reviennent à la charge, toujours en vain. L'exercice devient de plus en plus éprouvant, les larmes sont proches de couler, et la lumière s'invite soudain quand le metteur en scène ordonne le dernier câlin.

Subtil portrait de l'adolescence

Chaque situation proposée est un moment privilégié où les ados se livrent, se racontent, se parlent, évoquent qui ils sont, ce qu'ils vivent, ce qu'ils ressentent. Ils rient aussi quand il s'agit de jouer la folie ou lorsque l'enseignant décide que les hommes seront des femmes et inversement. A travers ces répétitions se dessine un portrait de l'adolescence subtil, en même temps que la série donne à voir le travail du comédien puisant des émotions enfouies dans l'inconscient pour donner corps à un personnage.

Le cinéaste-acteur Julien Gaspar-Oliveri, en refusant de céder aux facilités du feuilleton standard avec son cortège d'artifices à base d'amourettes ou d'inimitiés au sein du groupe, s'en remet uniquement à la sensibilité des personnages pour aimanter les spectateurs. Et c'est justement parce qu'ils et elles sont d'une sensibilité remarquable que l'irrépressible envie de découvrir les épisodes suivants se fait sentir.

Les huit épisodes de dix minutes iront maintenant conquérir la Croisette à Canneseries du 5 au 10 avril avant d'être visibles sur Play Suisse, probablement à l'automne 2024.

Philippe Congiusti/mh

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Le palmarès de l'édition 2024 de Séries Mania

"Rematch", sur le combat acharné entre Kasparov et la machine Deep Blue, a laissé échec et mat le jury de la Compétition internationale, conquis par cette vision décapante de l'ancêtre de l'intelligence artificielle. L'acteur palestinien Kamel El Basha n'a pas manqué également de charmer le jury avec une prestation fabuleuse dans "House of Gods".

De son côté, l'auteur francophile américain Douglas Kennedy et son jury Panorama ont craqué pour "Dates in Real Life", une romance norvégienne qui questionne les relations amoureuses à l'heure des métaverses, alors que "Machine" s'est vu remettre le titre de meilleure série française. Cette comédie sociale musclée irrésistiblement drôle met en scène Joey Starr et Margot Bancilhon dans une usine menacée de délocalisation. Ou quand le kung-fu vient au secours de Karl Marx!

pg