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"A l'autre bout était le ciel", du théâtre amateur de grande ambition

La compagnie ETKaetera présente "A l'autre bout était ciel". [facebook.com/pg/ETKaetera]
Théâtre: A l'autre bout du ciel / Vertigo / 5 min. / le 8 janvier 2019
Dans "A l'autre bout était le ciel", six comédiens amateurs portent avec énergie le verbe acide de l'auteur allemand Falk Richter. Un spectacle à découvrir au Théâtre CCN Le Pommier à Neuchâtel jusqu'au 13 janvier.

C'est le début d'une pièce de théâtre. Elle claque au vent comme un poème ou un slam: "A l'autre bout était le ciel qui se précipitait contre l'horizon. Moi j'étais ici, avec ma tête beaucoup trop lourde. Et entre les deux, il y avait ce champ. Alors je me suis mis à courir…". Quelques lignes signées Falk Richter. Elles donnent leur nom à la première création de la Compagnie neuchâteloise ETKaetera.

Une pièce sur notre époque

Sur scène, six comédiennes et comédiens portent le costume noir et la mine des âmes perdues dans des aéroports trop grands. Valises à roulettes, sièges en plastique de couleur, annonces dans le haut-parleur… leur vie est une salle d'attente, un hall de transit, un vol retardé, un rendez-vous manqué.

En assemblant des extraits de six pièces différentes de Falk Richter, la metteuse en scène Clémence Mermet offre à la jeune compagnie ETKaetera un spectacle qui raconte en une cinquantaine de minutes l'époque. Notre époque et la confusion de nos relations: "On ne se parle plus en temps réel. On envoie des messages vocaux, des sms, des mails… Les échanges sont plus rapides et efficaces, mais paradoxalement moins spontanés. Nous sommes désormais appelés à gérer plusieurs discussions, plusieurs casquettes sociales, plusieurs relations amoureuses en même temps, etc. Multi-tâche. Polyvalent. Rentable."

Une critique sociale

On l'aura compris, "A l'autre bout était le ciel" n'est pas une comédie de boulevard. La critique sociale n'empêche toutefois pas le sourire. Et ces jeunes comédiens portent un texte tout en énergie et en ironie. Ils sont aussi la preuve vivante que la pratique en amateur du théâtre ne signifie aucunement une sorte d'aimable divertissement pour les copains et la famille.

Au théâtre CCN Pommier de Neuchâtel, le verbe claque, l'ambition est grande. Fruit de neuf mois de travail et d'un training physique mélangeant improvisation et étude du texte. Une belle découverte et une troupe à suivre.

Thierry Sartoretti/ld

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Falk Richter, auteur européen

La quarantaine. Installé à Hambourg, Falk Richter est devenu LE chroniqueur germanique des maux de notre société occidentale. Ses pièces ont une langue particulière, proche de la poésie. Et ses sujets de colères ou de désespoir ne manquent pas: vanité de la société de consommation, obsolescence programmée, crise de nos liens sociaux, nouvelles formes de travail sous le signe de l'hyper-rentabilité, dogme de la flexibilité à tout prix, apparitions des réseaux sociaux, des voyages low-cost, terrorisme…

Le moins que l'on puisse dire est que son théâtre ne baigne pas dans l'optimisme. Malgré tout, Falk Richter possède un sens de l'humour noir et un goût pour les punchlines qui rend son théâtre très attrayant. Collaborateur régulier du comédien français Stanislas Nordey, bête de scène au verbe fort, Falk Richter a inauguré une sorte de théâtre franco-allemand, parfois bilingue dont le plus grand succès reste la pièce choc "Je suis Fassbinder" qui revisite les années de plomb allemandes à la lumière du présent. Falk Richter est joué sur toutes les scènes européennes et dans la plupart des grands festivals. Etudié dans les écoles de théâtre, le voici désormais dans le monde du théâtre amateur. Un signe de reconnaissance et de grande popularité.

A découvrir également sur scène: Lausanne, Maison de quartier de Chailly du 7 au 10 février, "Nous ne disparaîtrons pas", par la Compagnie Überrunter, mise en scène de Claire Nicolas, d'après des textes de Falk Richter, Alexandra Badea et Dennis Kelly