Le chapiteau est dressé. Caravanes et camions entourent le site. Plus rien ne bouge hormis le ballet des chevaux qui font et refont leurs exercices à huis clos. Knie est en rade.
La tournée 2020-2021 aurait dû débuter le 19 mars, à Rapperswil, dans le canton de Saint-Gall. Epidémie et mesures sanitaires obligent, le cirque national a annulé son premier mois de tournée. Dix villes de Suisse orientale sont concernées, soit une cinquantaine de représentations. A quelques pas du chapiteau, le zoo Knie et le lodge thaïlandais Himmapan avec les éléphants de Franco Knie sont également bouclés. La tournée pourrait reprendre au début mai, sur la Place Bellevue à Zurich. Rien n'est moins sûr. En Suisse romande, c'est en juin que le Knie débarque. Dans un pré de Delémont. Si le coronavirus l'autorise.
Des acrobates contraints au jogging
Knie en tournée, ce sont 230 collaborateurs et 80 animaux. Ce sont des circassiens venus du monde entier: cette année, il y a les motards colombiens et argentins, les acrobates russes et ukrainiens, les artistes du cirque allemand Flik Flak, les clowns, les garçons de piste marocains, les musiciens de l'orchestre polonais. Des gens qui doivent se toucher, se prendre par les bras et se serrer la main, se passer des balles, des trapèzes. Comment respecter les mesures sanitaires dans un pareil contexte?
"Le spectacle était prêt. Nous avons cessé les répétitions, explique Fredy Knie. Le cirque applique les mesures de sécurité, comme tout le monde: distance entre les gens, lavages réguliers des mains, etc. Les artistes sont là, mais ils ne pratiquent plus leur numéro. Ils entraînent simplement leur forme avec de la gymnastique ou du jogging. Ils ne peuvent pas rentrer chez eux et de toute façon ils n'en ont pas envie: là-bas, c'est la même chose qu'ici."
Une première dans l'histoire du Knie
Entreprise familiale et privée, les Gebrüder Knie (les frères Knie) ne communiquent jamais de chiffres. Mais pour l'institution nationale, le choc du coronavirus est également rude. "Nous allons faire appel au chômage partiel", annonce Fredy Knie. La perte pourrait se monter à plusieurs millions de francs alors que le Knie rembourse les billets des spectacles annulés en prélevant une somme de 5 francs pour frais administratifs. La tournée est en rade, mais il faut nourrir et soigner les animaux. Au zoo, ils sont 350.
L'avenir? Incertain. Le Knie est-il en danger? Fredy Knie se veut rassurant: "Danger, c'est un gros mot. La situation est difficile, mais nous allons trouver des solutions. Nous espérons encore partir en tournée et reporter certaines dates pour boucher ce trou".
Cet arrêt est une première dans la longue histoire du Knie. Jamais, même au plus fort de la Seconde Guerre mondiale, le cirque national a renoncé à faire galoper ses célèbres chevaux.
Thierry Sartoretti/ld