"Etcetera, etc.", la follement drôle conférence des Diptik

Le blanc intégral! Le public est là, le micro est branché, la conférence a débuté et voilà la tuile. Un mot qui ne vient pas. Il reste au fond de la gorge, refuse de sortir, s'obstine dans son absence. Encore un effort, un raclement, un râle, un cri… mais non, Monsieur le conférencier, c'est bel et bien la panne.

La salle reste pourtant suspendue aux lèvres du conférencier. Le sujet a de quoi passionner: rien de moins que l'avenir biologique de l'être humain. Plus, en guise de digression, les effets d’une consommation forcenée de carotte sur le métabolisme et la psychologie de ce même être humain. Ça vous parait loufoque. Ça l'est.

Sur scène, grand gars dégingandé devant un rideau rouge, l'orateur a manifestement des troubles du comportement. Il se transforme en deux personnages qui vont tenter, chacun de son côté, de mener jusqu'au bout cette conférence. Peine perdue, le public est plié de rire et le conférencier tout autant, gigotant sur la scène dans une tentative désespérée de rattraper son micro alors que son double – l'assistant – cherche un hypothétique chien dans les coulisses tout en racontant l'histoire de sa vie.

Humour grinçant et pince-sans-rire

On peut applaudir Mister David Melendy, from California, soit la moitié du duo de clowns Les Diptik. Un duo qui a reçu cette année le prix suisse de la mise en scène. Et si l'on ne voit qu'aux saluts l'autre moitié des Diptik, c'est que la Fribourgeoise Céline Rey œuvre, une fois n'est pas coutume, à la conception de ce premier solo de son complice. Son titre "Etcetera, etc.". Cette nouvelle création a fait le plein à Fribourg le week-end passé. La tournée débute ce week-end au Waouw, le théâtre d'Aigle, fidèle allié des Diptik.

L'humour de David Melendy est grinçant, délicieusement ironique et pince-sans-rire. Au fil de ses élucubrations sur la génétique et la consommation de carottes, on ne sait plus si nous avons droit à la mythomanie d'un personnage ou à la confession bien réelle d'un orphelin devenu clown après avoir grandi sur une plantation du fameux tubercule orangé.

Un numéro d'équilibrisme

David Melendy est magistral. Il navigue à la fois dans l'univers classique du clown et dans un humour acide proche du stand-up. Installer un micro ou enfiler une veste peut s'avérer une odyssée muette. Parler des développements de la génétique peut se transformer en une logorrhée dadaïste parfaitement hilarante.

"Etcetera, etc." est aussi un sacré numéro d'équilibrisme entre le français et l'anglais. Voici qui renouvelle magistralement le répertoire déjà remarquable de ce duo qui s'est trouvé sur les bancs de l'école Dimitri au Tessin. Un répertoire qui continue d'ailleurs de tourner en français comme en allemand dans les théâtres de Suisse. Pour rappel: "Hang Up" raconte le dialogue de deux âmes, suspendues à des cintres. Elles attendent leur réincarnation. Et "Postscriptum" nous présente deux neurones surmenés. Gageons que "Etcetera, etc." n'a pas fini de nous faire le coup de la panne de vocabulaire.

Thierry Sartoretti/ld

"Etcetera, etc.", Théâtre Wouaw, à Aigle, jusqu'au du 4 octobre.

Les Diptik seront aussi à Bienne, le 9 octobre (version germanophone); à Reconvillier, les 17 et 18 octobre (version francophone) avec "Postscriptum"; à Saint-Imier, le 25 octobre, avec "Hang Up".