Jérôme Bel et Elizabeth Schwartz dansent le portrait d'Isadora Duncan

Chorégraphe et danseuse américaine militante et avant-gardiste, Isadora Duncan est née à la fin du 19e siècle. Lasse des contraintes physiques de la danse classique, où le corps est restreint par le tutu et les pointes, elle danse pieds nus. Elle est aussi adepte de la danse à l’extérieur et préfère laisser libre cours aux mouvements de son corps, avec ou sans musique. A 50 ans, elle meurt tragiquement étranglée au volant de sa voiture. Les gestes de la danseuse Elizabeth Schwarz et la voix du chorégraphe superstar Jérôme Bel lui rendent hommage.

Un spectacle écolo

Pour ce portrait dansant d’Isadora Duncan, le duo décide de répéter et de jouer le spectacle à l’extérieur.  "D’habitude, on joue dans le théâtre. Exceptionnellement, on va jouer sur les bords du lac", explique Jérôme Bel. "Comme la nature est très importante pour Isadora – elle le dit dans ses écrits – on retourne aux sources d’une certaine manière. La tunique est son costume de scène puisqu’elle s’inspire beaucoup de la Grèce antique. Et les pièces de la Grèce antique se jouaient aussi en extérieur." Une scène naturelle qui est compatible avec les mesures sanitaires actuelles et qui offre une capacité d’accueil de 150 personnes.

Je peux répéter sans voyager, donc la pandémie m’a donné beaucoup de travail !

Conscient de l’impact environnemental de ses productions, le chorégraphe partage avec Isadora Duncan l'amour de la nature. Il y a deux ans, il saute le pas: "J’ai décidé de ne plus prendre l’avion et j’ai mis en place des répétitions par Zoom. Puis il y a un an, j’apprends que les frontières se ferment dans le monde entier. […] C’était un hasard, mais je pense que la pandémie ne peut pas être séparée du réchauffement climatique. Isadora faisait aussi des tournées mondiales, et à l’époque il n’y avait pas d’avion, donc elle prenait le train. C’est notre point commun."

Des sources sûres

Pour créer son spectacle, Jérôme Bel part de "Ma Vie", l’autobiographie d’Isadora Duncan, qu'il découvre par hasard : "Je crois que c’est une sorte de coup de foudre. Je ne connaissais pas très bien Isadora Duncan. J’étais très surpris […] Elle a rencontré les grands esprits de son époque, les grands artistes qui l’ont aussi reconnue comme l’une des leurs. J’ai eu le sentiment que son histoire n’était pas assez connue, et qu'il fallait donc la partager."

La danseuse Elizabeth Schwarz, du haut de ses 70 printemps, travaille sur le répertoire de Duncan depuis 40 ans. C’était la partenaire et l’experte idéale : "Grâce à Elizabeth, j’ai mis en lien certains éléments de la biographie avec des danses, puisqu'elles sont liées", explique Jérôme Bel. "Isadora travaille sur ce qu'elle ressent, sur ce qu'il lui arrive. Elle traverse l’histoire du début du 20eme siècle, et s’en inspire pour créer ses chorégraphies."

_{Isadora Duncan, chorégraphie et mise en scène de Jérôme Bel, Lausanne, du 1er au 5 juin sur la pelouse de Vidy.}

Propos recueillis par Julie Evard/ms