Les rituels, le mouvement intérieur et le lâcher-prise traversent toutes les pièces de la chorégraphe franco-algérienne Nacera Belaza: "Le cri", "La nuit", "La traversée", "Sur le fil", "Le cercle". Et aujourd'hui, ils traversent "L'onde" aussi, sublime création pour cinq danseurs. Les corps disparaissent, réapparaissent, se brouillent, se mélangent, se transforment en feu, feu-folet, fantômes, en âmes, touchent la nôtre, profondément, durablement…
Les créations de Nacera Belaza ne se décrivent pas, ne se racontent pas, elle se vivent.
Le son, la lumière et le corps
Dans "L'onde", Nacera Belaza signe tout: la chorégraphie, la lumière, la bande-son... "Je commence par le corps, qui est l'épicentre de la pièce, donc je travaille plusieurs mois avec les danseurs et, petit à petit, j'élargis leur conscience à l'écriture du son et de la lumière", explique la chorégraphe à la RTS. Le son, la lumière, le corps: trois lignes dramaturgiques très claires dans l'écriture de Nacera Belaza. Trois éléments dissociés et pourtant reliés à travers le danseur.
Et dans "L'onde", ce que l'on ne voit pas est tout aussi important que ce que l'on voit. "Je pense que ce qui nous échappe et tout aussi dense, tout aussi plein". Un jeu entre la lumière et l'obscurité se déploie alors pour activer les sens.
Un travail sur le lâcher-prise
Nacera Belaza travaille énormément sur le lâcher-prise. "Le danseur, on peut lui demander beaucoup de choses. C'est quelqu'un de très discipliné. Mais quand il s'agit de lâcher-prise, on inverse tous les mécanismes d'action. Se laisser faire face au regard d'un public, c'est une des choses les plus compliquées qui soit", explique la chorégraphe franco-algérienne.
Basculer dans l'intériorité, c'est le seul moyen pour Nacera Belaza d'inviter le public dans ce qu'elle fait. "C'est compliqué, car on se rend compte que dans la vie que l'on mène, il y a une chaîne de mécanismes de contrôles, de tensions qui nous poussent à tenir, à être forts. D'un coup, de devoir faire céder toutes ses résistances, c'est vertigineux. Moi ça me donne du plaisir rien que de le dire, mais je sais que cela fait surgir aussi énormément de peurs".
"L'onde", c'est aussi l'interaction entre le danseur et le spectateur. Son état va agir sur le spectateur, il est le médium par lequel le spectateur entre dans la pièce. "Créer des mondes dans lesquels on peut se perdre et dans lesquels on invite l'autre", telle est la promesse de "L'onde" de Nacera Belaza.
Propos recueillis par Julie Evard
Adaptation web: Lara Donnet
"L'onde", de Nacera Belaza, Théâtre Vidy-Lausanne, jusqu'au 6 février.