La super-héroïne végane Soya the Cow se rue sur le Festival Antigel

"Les gens sont souvent réticents à parler de leur rapport à la nourriture. C'est très intime, surtout lorsqu'’il est question de maltraitance animale et de véganisme. Lorsque j'arrive avec mon costume de Soya the Cow, toute en beauté, avec ce look attirant le regard, on m'écoute d'une manière différente". Paroles de Daniel Hellmann, performer, acteur et chanteur zurichois au look imparable et superlatif.

Soya, c'est la rencontre d'une drag queen et d'un bovidé. Pieds sabots, tête à cornes et entre les deux, une plastique de rêve. On pourrait évoquer le Minotaure de la mythologie grecque, sauf que Soya arbore des mamelles entre ses longues jambes tatouées. Elle est belle et bien vache, et point taureau, créature hybride détachée des codes de la masculinité. Pas peau de vache pour autant, cette super-héroïne de la cause animale est toute en bienveillance.

Un programme vachement riche

Invité à Genève au Théâtre de Saint-Gervais par le Festival Antigel, Daniel Hellmann propose quatre rendez-vous au public. "Try Walking in my Hooves" ("Essaie de marcher dans mes sabots") est une balade guidée à travers les rues de la ville à observer les animaux dans une perspective non anthropomorphiste. "Planet Moo" (ou meuh) est une exposition en lien avec le monde visuel et artistique de Soya.

"Mange ton cœur" est un repas de la Saint-Valentin entièrement végane et enfin "Dear Human Animal" est un spectacle entre concert, show télévisé et performance théâtrale durant lequel Soya interprète notamment les chansons de son nouvel album, très convaincant dans le registre électro-pop. Daniel Hellmann ne s'est pas improvisé chanteur du jour au lendemain. Avant de devenir performer, il a suivi une formation complète de chanteur lyrique.

Du militantisme version soft power

Elle en jette Soya. Elle fait même un effet bœuf lorsqu'elle débarque sur le plateau allemand de l'émission "The Voice". Une reprise parfaite de a-ha ("Take on me") et deux minutes de gloire pour parler de la défense du droit des animaux dans tous les foyers. C'est du militantisme version soft power avec glamour et bienveillance.

Soya est née au terme d'une résidence artistique à San Francisco. Une première création - "Requiem for a Piece of Meat" ("Requiem pour un morceau de viande") - avait notamment été jouée au Théâtre de Vidy-Lausanne. En tournée en Europe et aux Etats-Unis, cette performance a suscité la controverse lors de sa venue au Stadttheater de Coire: on y rejouait sur scène l'insémination artificielle d'une vache.

"Ce qui se passe quotidiennement dans les élevages suisses a été jugé trop violent ou pornographique pour être montré sur scène. Les milieux des arts de la scène me disaient alors que la thématique animale n’intéressait personne et que je devais me concentrer sur des spectacles queer et les questions de genre", raconte Daniel Hellmann, depuis Berlin, sa ville d'adoption. "Les mentalités ont évolué, même si les questions de nourriture amènent encore et toujours un certain malaise dans les théâtres où les discours artistiques, sociaux et politiques s'estompent dès que l'on passe au restaurant du théâtre."

Avant l'invention de Soya, son alter-ego animal, Daniel Hellmann a créé des performances entre théâtre et danse sur les travailleurs du sexe ("Traum Boy", invité au Festival d'Avignon dans la très cotée Sélection suisse) et détourné les codes du spectacle avec "Full Service", conçu comme une passe artistique. Au public de déterminer la durée, les prestations et le tarif d’un moment intime passé en sa compagnie.

Thierry Sartoretti/ld

"Try Walking in my Hooves", à voir à la Jetée des Paquis, dans le cadre du Festival Antigel à Genève, le 5 février.
"Planet Moo", exposition à voir au Théâtre Saint-Gervais, dans le cadre du Festival Antigel à Genève, du 5 au 24 février.
"Mange ton cœur", à voir au Bar-Restaurant La Réplique à Genève, dans le cadre du Festival Antigel, le 14 février.
"Dear Human Animal", à voir au Festival Antigel à Genève, les 15 et 16 février.