Le 17 octobre 2020, un groupe de militants installe une ZAD sur la colline du Mormont, près des villages d'Eclépens et de La Sarraz dans le canton de Vaud. Cela dans le but d'empêcher l'extension de la carrière de ciment du géant industriel Holcim, l'un des plus gros émetteurs à effet de serre de Suisse, qui existe sur ce lieu depuis 1953.
A cet endroit poussent des orchidées rares dont la majorité des espèces sont protégées au niveau national. Par ailleurs, en 1998, la butte en question a été classée à l’Inventaire fédéral des paysages, sites et monuments naturels d'importance nationale (IFP).
L'expérience de Luxxx
Luxxx sera l'une des premières personnes à s'insurger contre cette décision d'exploitation. Iel fera partie des militants et militantes de la ZAD du premier au dernier jour de son existence lorsqu' "en douze heures, la police a détruit ce qu'on a pris des mois à construire", dit-iel dans le spectacle "BOOOM!".
Ce jour-là, des cabanes ont été éliminées et une utopie piétinée. A la suite de cela, Luxxx erre, en colère. Et la seule échappatoire à cette rage devient l'écriture. Luxxx déverse sa rage sur le papier, mais cela ne suffit pas. Iel souhaite déclamer ses textes haut et fort. Et si la scène de théâtre était l'espace parfait pour le faire? Luxxx transmet alors ses écrits au comédien et écrivain Adrien Rupp qui, à leur lecture, lui propose d'en faire quelque chose de fort et de percutant.
"Si l'un de mes combats est justement de sortir d'un système d'expertise qui nous enlève, par délégation, toutes nos capacités d'autogestion et donc notre propre pouvoir d'action, il y a peut-être quelque chose de juste d'expérimenter le plateau sans en être un expert ou une experte", confie Luxxx dans le dossier de presse du projet théâtral.
La maison "BOOOM!"
En entrant dans la salle René Gonzalez du Théâtre de Vidy, les spectateurs et spectatrices sont accueillis par les cinq interprètes de la pièce: Luxxx, Adrien Rupp, Michael Scheuplein, Carolina Varela et Isabelle Vesseron. Déjà costumés, les performeurs et performeuses arborent des vêtements composés de tissus disparates, bariolés et colorés. Pour la plupart, fabriqués par leurs soins. En tout cas, le Collectif se fond parfaitement dans sa "maison": un espace bi-frontal composé d'une cuisine, d'un dressing en fond de scène et d'un toit représenté par un mobile en bois tenu en équilibre par des morceaux de fils épais.
Dès l'entrée, iels proposent au public à boire et à manger. Du thé à la menthe, de la verveine ainsi que des cookies vegan sans gluten et révolutionnaires. Révolutionnaires, car sur chaque biscuit est accroché un bout de papier contenant une phrase révolutionnaire écrite par un ou une spectatrice de la veillle. Comme par exemple "Utilise la photocopieuse de ton travail (si t'en as un) pour imprimer des flyers, tracts, fanzines et autre docu militante".
Du chant, des récits et des dessins pour lutter
Chaque interprète prend ensuite la parole pour raconte son expérience de la ZAD. Certains y sont restés trois jours, d'autres une semaine, certaines encore n'y sont jamais allées. Grâce à des récits intimes, des chants communs tels que "Labuta", une mélodie populaire portugaise ou encore des dessins signés Michael Scheuplein projetés en direct, "BOOOM! Une odyssée dans des territoires en lutte" est une invitation à réfléchir aux codes, aux désirs et aux utopies qui nous guident.
Layla Shlonsky
"BOOOM! Une odyssée dans des territoires en lutte", un projet du Collectif Zooscope. Théâtre Vidy-Lausanne, jusqu'au 6 avril; Théâtre du Grütli, Genève, du 15 au 24 avril; Centre de culture ABC, La Chaux-de-Fonds, du 6 au 7 mai 2023.