Ce titre d’abord. Du Claude-Inga Barbey pur jus: "Le vilain petit canard ou le canard non genré de petite taille en situation de dysmorphisme". Voilà pour le clin d’œil aux parents. Ce spectacle de marionnettes étant prévu pour un public dès 4 ans, qu’on se rassure. Il s’agit là avant tout d’un spectacle pour les enfants raconté avec des marionnettes rigolotes, création inspirée du célèbre conte du Danois Hans Christian Andersen.
Vous connaissez l’histoire? On vous la rappelle au cas où: une canne couve ses œufs dont l’un est bien plus gros et tardif à éclore que les autres. Il en sort un oisillon tout gris tout vilain dont tout le monde se moque. Le pauvre bougre erre de mare en ferme jusqu’au jour où il reçoit cette révélation: il est un cygne. Le voici devenu splendide oiseau au plumage blanc admiré de tout le voisinage. Publié en 1842, best-seller au répertoire des contes, le "Vilain petit canard" est une histoire à clé: elle raconte les difficultés du jeune Andersen qui rêve d’être un auteur reconnu au théâtre et ne parvient pas à être considéré.
De cour de ferme au préau d'école
Retournons sur la scène du Théâtre des Marionnettes de Genève. Claude-Inga Barbey et sa troupe ont déplacé l’action de la mare à la classe d’école, de la cour de ferme au préau, ici rebaptisé espace d’échange émotionnel par son autrice toujours prompte à brocarder les travers de la novlangue socio-pédagogique.
Le canard, c’est le petit nouveau de la classe de Madame Dindon et il n’est pas comme les autres. Il parle bizarrement ce Coin Coin qui dit s’appeler Nioc Nioc. Personne ne le comprend. Tout le monde se moque. Va-t-il devoir quitter sa nouvelle classe pour une prise en charge spécialisée chez le psychologue, celui que les enfants appellent Psychozinzin? Plus maline (et casse-pattes aussi), sa copine poule Ritaline va percer le mystère. On ne vous en dit pas plus.
Dans ce "Vilain petit canard", on rigole, on a peur (du concierge, de la nuit, d’une poubelle à roulettes) et on découvre les tours de magie concoctés par l’un des comédiens manipulateurs, Pierric Tenthorey, qu’accompagnent sur scène Mirjam Rast, Xavier Loira et Claude-Inga Barbey.
Dans la salle, les adultes accompagnants pourront se délecter des quelques perles langagières que la metteuse en scène et sa complice Doris Ittig ont glissées dans cette version revisitée d’un conte où, mare ou classe peu importe, tout est bien qui finit bien.
Thierry Sartoretti/aq
"Le vilain petit canard", Théâtre des Marionnettes de Genève, jusqu'au 30 avril.