L'acrobate vaudois Marc Oosterhoff réalise un vertigineux miracle

Voici un homme en souci. Il apparaît sur la scène et n’a visiblement aucune envie d’être là et surtout d’attirer l’attention. Il pourrait être concierge ou stagiaire avec sa chemise un peu trop grande et ses crocs aux pieds. Le regard du public le gêne, il aimerait disparaître, cherche les coins sombres et les angles morts. Hélas pour lui, le théâtre est d’un autre avis: le voici bouclé sur scène, portes hermétiquement closes et téléphone sonnant dans le vide.

S'évader grâce à la fantaisie

Voici un homme en panique. Il s’appelle Marc et il a visiblement perdu son évangile. Le théâtre lui joue des tours. Cintres et coulisses sont peuplés de fantômes et la machinerie est d’humeur facétieuse. Pire, ce qui semble n’être qu’un cube se transforme en labyrinthe. Adieu cour et jardin, bienvenue quatrième dimension. Le haut devient le bas. Et le bas semble invariablement mener vers les hauteurs. Qu’il parte à droite et le voici revenu immédiatement par la gauche. Ce n’est plus un théâtre, c’est une prison gravée par Piranèse, un escalier fou dessiné par l’illusionniste Escher.

Que faire alors, au milieu de ce théâtre qui vous balance un vent et refuse de libérer son captif? Prendre son parti. Celui d’inventer un miracle: une évasion par la fantaisie, une échappée dans l’imaginaire réalisée par une acrobatie aussi improbable que périlleuse.

Il y a du Buster Keaton dans cette "préparation d’un miracle". La mine grave et contrariée de Marc trône sur un corps aux propriétés de plume et d’élastique. Un clown, c’est notre semblable à la fragilité exacerbée. Pour lui, l’existence est un mystère permanent, la vie un parcours d’obstacles infranchissables. Quand un clown veut se rendre du point A au point B, la ligne droite se refuse toujours à lui. Les lois de la physique deviennent un casse-tête chinois et plus il tente de s’en sortir plus il s’enfonce dans son problème.

Un parcours éclectique

Yverdonnois, Marc Oosterhoff est passé par l’école Dimitri au Tessin avant de pratiquer les arts martiaux en Chine, sauter d’un mur d’immeuble à l’autre (ça s’appelle du parkour) et terminer la Manufacture, la Haute école romande des arts de la scène, avec un bachelor en danse contemporaine. Secouez ce CV de globe-trotter en crocs et vous obtenez des spectacles singuliers, entre cirque, danse, équilibre aléatoire et humour absurde, lesquels tournent désormais dans toute l’Europe. Il y a eu "Les Promesses de l’incertitude", "Lab Rats", "Take Care Of Yourself" ou encore "Natures mortes", des bijoux d’humour absurde.

Sur le programme de "Préparation pour un miracle", il est annoncé catastrophes et magie. "C’est pas possible!", est une remarque qui revient souvent dans le public devant ce spectacle. Oui, Marc Oosterhoff est impossible et il l’a pourtant fait.

Thierry Sartoretti/sc

_{"Préparation pour un miracle", Théâtre Vidy-Lausanne, jusqu’au 12 novembre, à la Comédie de Genève, du 7 au 15 décembre, au théâtre Nebia à Bienne, les 3 et 4 février 2024.}