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Le théâtre zurichois Gessnerallee lance son propre journal sur fond de crise des médias

Le théâtre Gessnerallee à Zurich. [Keystone - Christoph Ruckstuhl]
Un théâtre zurichois lance son propre journal face à la crise de la presse en Suisse / La Matinale / 4 min. / mardi à 07:25
"Faisons de la nécessité - et de l'amour du journalisme - une vertu". C'est en ces termes que débute le premier éditorial du nouveau journal lancé par le théâtre Gessnerallee le 21 août dernier. La publication est une réponse à la crise des médias et du journalisme culturel, selon la direction du théâtre.

La Gessnerallee, théâtre zurichois, a décidé de créer son propre journal afin de contrer l'appauvrissement de l'offre culturelle dans la presse, selon Rahel Bains, responsable de la communication du théâtre et ancienne journaliste, interrogée dans La Matinale du 1er octobre. "Nous voulons à la fois mettre en avant les artistes et encourager une culture du débat, retrouver une visibilité que nous n'avons plus dans les médias", précise-t-elle.

Une réponse à la crise des médias

Ce nouveau titre, produit quatre fois par an, est disponible en allemand et en anglais, en papier ou sur le site web du théâtre. Pour l'obtenir, il faut débourser 5 francs par numéro ou opter pour un abonnement. Il veut réunir des articles rédigés par l'équipe du théâtre, mais aussi des essais, des interviews et des critiques signés par des externes. Le tout devrait se financer principalement par les ventes et par des recherches de fonds. Une part minime proviendrait de subventions. C'est du moins le défi que veulent relever les trois femmes à la tête de la direction du théâtre, Rahel Bains, Kathrin Veser et Miriam Walther.

Le pari n'est pas gagné. Toutefois, ce trio a une solide expérience des médias. Miriam Walther a été directrice du magazine en ligne Republik jusqu'en 2022. Et la responsable de la communication, Rahel Bains, a travaillé pendant quinze ans comme journaliste et rédactrice.

Double page du journal lancé par le théâtre zurichois Gessnerallee, automne 2024. [Gessnerallee - Bodara]
Double page du journal lancé par le théâtre zurichois Gessnerallee, automne 2024. [Gessnerallee - Bodara]

Des avis partagés en Suisse romande

Cette initiative divise toutefois les professionnels romands du monde du théâtre interrogés dans La Matinale. Anne Schwaller, directrice du Théâtre des Osses à Givisiez (FR), exprime des réserves: "J'ai envie de dire, chacun son métier. Une société qui se porte bien a besoin de culture et de presse. Et j'estime que nos missions ne sont pas les mêmes".  

Un avis que ne partage pas Anne Bisang, directrice du Théâtre populaire romand à La Chaux-de-Fonds (NE). Elle se dit, pour sa part, séduite par l'initiative zurichoise: "Elle exprime aussi justement un manque, un déficit - se creusant au fil du temps - de mise en perspective du travail des artistes qui permet l'accessibilité de ces oeuvres auprès du public".

Des critiques culturels sceptiques

A l'heure de la crise des médias, l'impact des critiques reste important. Thierry Raboud, de La Liberté, analyse: "La critique est sous pression. Et avec la situation qu'on connaît dans la presse, les papiers critiques sont de plus en plus contaminés par le côté communication. D'autre part, il y a les institutions culturelles qui font face à une vive concurrence dans la course aux subventions et pour lesquelles la critique d'un média reconnu reste un levier important de légitimation".

Pour pallier le silence des journaux, certaines directions imaginent d'autres ripostes. Certains pensent se tourner vers des blogueurs étudiantes et étudiants, d'autres souhaitent créer des liens entre théâtres pour concevoir une publication commune. Des démarches encore timides, mais qui pourraient se développer à l'avenir.

Sujet radio: Anne Fournier

Adaptation web: Sébastien Foggiato

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