Tout savoir (ou presque) sur la vraie Mary Poppins

Vous ne la connaissez pas. Ou si peu. Elle sait pourtant tout sur vous et sur vos enfants. Elle arrive par vent d’Est. Elle repartira par vent d’Ouest. C’est Mary Poppins. Que l’on peut voir en chair et en os sur la scène du Petit Théâtre de Lausanne, dans la pièce "Miss Poppins". La comédienne Olivia Seigne chausse les bottillons de la célèbre nounou. Le mythe est toujours aussi fort. La pièce est un triomphe. Le Petit Théâtre affiche complet jusqu’à la dernière représentation et les enfants désireux de découvrir les tours de magie de Tim, alias Pierrick Thentorey doivent s’inscrire sur liste d’attente.

Le film "Mary Poppins", grosse opération de communication en 1964

Le 27 août 1964, date de sortie de la comédie musicale "Mary Poppins", présentée au Grauman Chinese Theater sur Hollywood Boulevard, il y a Walt Disney, le casting du film et une ribambelle de figurants déguisés en bobbies anglais ou en personnages de dessins animés Disney pour accueillir les invités. La première américaine est une très grosse opération de communication et le film fait date dans l’histoire du cinéma en mélangeant acteurs réels et film d’animation.

Le film gagne cinq Oscars dont celui de meilleure actrice pour Julie Andrews. Ce type d’univers un peu guindé est à la mode. La concurrence est rude. La même année, c’est une autre comédie musicale très british qui rafle vraiment la mise: "My Fair Lady" ramasse trois Oscars de plus, dont celui du meilleur film.

Une buveuse de thé à Hollywood

Pamela Lyndon Travers est l’auteure des aventures de Mary Poppins. Elle se considère anglaise, mais a grandi en Australie. Elle se présente sous le nom de Travers, mais son véritable patronyme, c’est Helen Lyndon Goff. Elle a quitté Londres pour passer deux semaines à Hollywood avec un droit de regard sur la production de "Mary Poppins". Avec elle, l’écriture du scénario, la composition des chansons, le choix du casting, les dialogues, le décor, tout vire au cauchemar. L’écrivaine ne connaît rien à l’industrie du cinéma et déteste l’univers de Walt Disney.

Elle cède enfin ses droits d’auteur au terme de vingt ans de siège par le père de Mickey car elle est persuadée d’être au bord de la faillite. A l’époque, son personnage est célèbre, mais un peu daté. Le premier roman date de 1934 et Pamela Lyndon Travers n’a plus écrit d’aventures de Mary Poppins depuis 1952. Elle apprécie Julie Andrews, dont elle aime le nez et les manières, mais elle déteste le film. Vers la fin de sa vie dans les années 90, à un journaliste qui lui demande son opinion sur cette comédie musicale made in Disney, Pamela Lyndon Travers répond qu'elle a "appris à vivre avec".

Une nounou désagréable

Relevée dans le premier volume de "Mary Poppins", édité en français par Le Livre de Poche Jeunesse, voici la liste exhaustive des qualificatifs désignant la nounou venue soulager la famille Banks: guindée, arrogante, sévère, méprisante, hautaine, furibonde, terrible, sombre, aigre, sèche, sentencieuse, négative, bougonne, impétueuse, narcissique, incommode…

Jamais elle ne montre le moindre signe d’amour ou de sympathie aux quatre enfants Banks. Et pourtant, ils l'adorent! Parce qu'elle les rassure. Poppins sait ce qu’elle veut. Par ailleurs, elle les emmène régulièrement dans un monde de magie absolue. Un monde qu’elle n’explique jamais car Poppins ne révèle jamais sa part de mystère. Ce qui contribue à son aura particulière, telle celle d'un maître zen.

Poppins la suite en 2017

La comédie musicale, estampillée Disney, débarque en Suisse. Elle sera à Zurich du 1er au 19 mars 2017. Ces mêmes studios Disney préparent une suite au fameux film de 1964. L'histoire se déroulerait vingt ans après le premier épisode. Le scénario? Mystère. Ce n’est pas la matière qui manque. Et ce coup-ci, les créatifs de Disney ne travaillent pas sous les fourches caudines de Pamela Lyndon Travers.

L'auteure de Mary Poppins nous a quittés en 1996. Son fils Camillus Travers est décédé en 2011. Et ses petits-enfants, actuels détenteurs des droits de Poppins, sont plus accommodants. Gageons que tout cela nous vaudra une réédition et peut-être la traduction des huit livres de Mary Poppins.

Thierry Sartoretti/mh