Emil, mythe national

Il est le seul, l’unique humoriste suisse a avoir triomphé durablement des deux côtés de la Sarine… sans oublier le Tessin et l’Allemagne. Emil, c’est le Suisse typique, un peu simplet, pas toujours bienveillant, bünzli comme disent les Alémaniques. Un personnage créé au début des années 60 dans un petit théâtre lucernois.

En revenant au théâtre lausannois Boulimie, le Lucernois Emil Steinberger retrouve la scène de ses débuts en français. Boulimie est aussi le lieu d’enregistrement des versions francophones de ses sketches.

>> A voir un extrait d'une archive de 1985. L’humoriste Emil Steinberger interprète son sketch culte sur le caporal Schneider qui est de garde au poste de police. :

Cette liebesaffäre avec le public romand remonte à 1981 et même au-delà. Il y a eu un premier essai devant les caméras de la Télévision suisse romande en 1976. Le directeur de Boulimie de l’époque, le comédien Lova Golovtchiner avait demandé à Emil de jouer son désormais fameux sketch du Caporal Schnyder.

Ce policier benêt et fainéant assure très mal la permanence nocturne du poste de son quartier. La légende veut que le caméraman ait tremblé de rire.

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Après Knie, c’est sur les écrans alémaniques que triomphe Emil. Dans le film de Rolf Lissy, "Les Faiseurs de Suisse", blockbuster de l’année 1978. Emil incarne un employé du bureau cantonal des naturalisations trop gentil au goût de son chef. L’employé plus humain et poète que zélé et rigoureux tombe amoureux d’une belle Yougoslave candidate à la naturalisation. 38 ans après sa sortie, le film "Les Faiseurs de Suisse" garde toute sa charge critique politique contre l’administration et la politique helvétique en matière d’attribution de la nationalité.

Cela aura valu nombre de lettres d’insultes et de courriers de menace pour le gentil Emil, que de nombreux spectateurs confondent toujours avec son auteur, Emil Steinberger. La popularité de l’humoriste dépasse les frontières linguistiques et politiques. Et l’auteur rejoint parfois son personnage épris de curiosité et d’ouverture d’esprit. Ainsi Emil Steinberger a fait campagne pour l’adhésion de la Suisse à l’ONU en 2002.

Emil aujourd’hui, c’est autant un personnage qu’un symbole national. Un peu à la manière de l’ancien conseiller fédéral Adolf Ogi, capable de mémorables tirades en français et garant de la compréhension entre les différentes parties linguistiques du pays. Son anniversaire est systématiquement fêté dans la presse nationale (c’était le 6 janvier!) et lorsqu’Emil est parti respirer durant quelques années un autre air à New-York, bon nombre de nos concitoyens et certains médias ont réagi comme si on avait délocalisé subrepticement la fabrication des couteaux suisses.

Emil Steinberger, joue au Théâtre Boulimie de Lausanne jusqu’au 14 janvier, puis en tournée romande: Monthey, le 15 janvier, Onex le 16, Morges du 17 au 19, La Chaux-de-Fonds le 20, Neuchâtel les 21 et 22, Sion le 24, Châtel Saint-Denis le 27, Romont le 28. La plupart des dates sont complètes.Vous pouvez aussi rattraper Emil dans sa nouvelle ville de résidence: il jouera tout le printemps à Bâle avec un spectacle en… dialecte.

>> "Emil, création d'un mythe national" (émission Nectar du 10 janvier 2017) :

RTS - Anne Kearney