Zaza Napoli revient! Avec son mari Georges, son beau-fils hétéro et ses futurs insupportables beaux-parents, dans un défilé de plumes, de perruques, de danse et de chansons. Cette "Cage" est une version chantée en français de la comédie de Broadway. Elle est mise en scène par le duo Valérie Bovet et Nancy Juvet au Théâtre Barnabé, à Servion.
Importantes difficultés financières
Rien n'allait plus à Servion. La revue ne faisait plus recette et le Théâtre Barnabé semblait condamné malgré sa tradition longue d’un demi-siècle. Nommées cette année pour reprendre la barre, Valérie Bovet et Nancy Juvet ont été remerciées avant même de commencer. Ces deux-là ne sont pas découragées pour autant: les revoici au Théâtre Barnabé, en free-lance désormais, lançant "leur" projet.
>> A lire l'article : Licenciements et manque de liquidités, le théâtre Barnabé dans la tourmente
Décor de concert country
Le contraste peut surprendre au premier abord. D'un côté l’ambiance un peu western de ce théâtre de campagne tout en bois où on imaginerait bien des concerts de musique country. Et de l’autre les "cagelles", ces créatures merveilleuses perchées sur des talons impossibles, toujours un miroir à portée de main pour rectifier maquillage et perruques à la splendeur versaillaise.
A Servion, le public n’est pas assis en rangs face à la scène, mais disposé le long de tables plus ou moins intimes entre parterre et galerie. C’est qu'ici, on vient pour une longue soirée avec repas, boissons et spectacle. Un orchestre de soul-jazz acratopège fait patienter les dîneurs et dès que les lumières s’éteignent, on y est: Servion devient la Cage aux folles, une boîte de la Côte d’Azur où chacune et chacun est bienvenu-e, quel que soit son genre, son sexe et ses inclinations.
Un défilé de quiproquos
Pascal Parisot reprend le rôle d’Albin, alias Zaza Napoli. Son mari Georges doit cacher son ombrageux amant le temps que son fils, hétéro et fiancé, puisse lui présenter ses futurs beaux-parents qui ne sont autres que des politiciens ultra-conservateurs et moralistes qui font fermer les boîtes de nuit comme la Cage aux folles. La suite est un défilé de quiproquos rigolos avec un message final de tolérance toujours bienvenu. "Je suis comme je suis", dit la chanson.
Un bon divertissement
Cette version s'avère un bon divertissement avec un bon dosage de danse, de cabaret et de chansons bien interprétées par une douzaine de comédiennes, danseuses, chanteurs et comédiens. On y trouve même Barnabé en personne dans un rôle tout à propos de régisseur de plateau. Non, il n’a pas de perruque ni de faux seins!
D'ici à fin février, on souhaite au couple Georges et Albin de multiplier les improvisations et les fioritures de jeu à l'instar des acteurs historiques de "La Cage aux folles". Certains soirs, chauffés à blanc, Michel Serrault et Jean Poiret pouvaient rajouter une demi-heure de délires chamailleurs.
Thierry Sartoretti/mh
"La Cage aux folles", Théâtre Barnabé, Servion, jusqu'au 24 février 2018.
Un couple inoubliable
Il était une fois un vieux couple d’homosexuels tenant salon de coiffure. Ces deux-là ne cessent de se disputer et de se rabibocher. Créée par Charles Dyer en 1966, la pièce "Staircase" est un beau succès de scène dans un swingin’ London en pleine fièvre mod et pop. Stanley Donen adapte la comédie au cinéma en 1969 (avec Rex Harrison, l’acteur de "My Fair Lady" et le playboy Richard Burton) et de l’autre côté de la Manche, c’est le tandem Paul Meurisse (alias le Monocle) et Daniel Ivernel qui crée la pièce en 1967 sous le titre "L’Escalier". Mai 68 passe, et le couple chamailleur fait des émules.
En 1973, Jean Poiret écrit sa "Cage aux folles". Il joue le patron du club, Georges, et confie le rôle de la pétulante Zaza Napoli, alias Albin, à son complice Michel Serrault. Pierre Mondy signe la mise en scène. Cette première Cage est dorée sur tranche: 1500 représentations au Théâtre du Palais Royal et deux millions de spectateurs en cinq ans d’affiche. Paris est folle.
Le passage au cinéma semble évident et pourtant. Les producteurs français n’osent pas et il faut un financement italien et la réalisation d’Edouard Molinaro pour que sorte enfin le film "La Cage aux folles". Le couple de la Côte d’Azur est remanié pour correspondre au co-financement franco-italien: Michel Serrault garde sa perruque de Zaza, et son amant est désormais Ugo Tognazzi, rebaptisé Renato. Comme la pièce, le film est un triomphe. Il va connaître deux suites et serait l'un des films en langue étrangère les plus vus aux Etats-Unis.
A noter qu'en France, la Cage va accueillir divers acteurs lors de ses reprises sur scène, dont Michel Roux, Jean Reno (dans un petit rôle) et Christian Clavier. En 1983, Broadway crée une comédie musicale de "La Cage aux Folles", gardant le titre français "so chic".