Cette année, dans le village de Zuoz, les filles ont pour la première fois été autorisées à participer à la procession traditionnelle de Chalandamarz, jusqu’alors réservée aux garçons, lançant un vaste débat sur l’égalité des genres dans la petite commune grisonne. Pour les mêmes raisons, une mère de famille bernoise a lancé cet été, avec succès, une campagne de financement participatif pour une nouvelle version inclusive des cartes de jass.
Ces deux initiatives posent la question de l’évolution des traditions au sens large. Celles-ci doivent-elles s'adapter pour rester dans l'air du temps ou risque-t-on de perdre un peu de notre identité en les modifiant? Qu’en pensent les Suissesses et les Suisses?
Pour répondre à cette question, penchons-nous sur l’une des plus grandes enquêtes d’opinion jamais réalisées en Suisse. Ce printemps, l'institut gfs.bern a interrogé plus de 57'000 personnes pour le compte de la SSR, sur d’innombrables thèmes. L'identité suisse ne se résume pas à des éléments ancrés dans la tradition, estime une nette majorité des sondés. L'identité est quelque chose qui peut évoluer et s'adapter.
Le comportement est plus important que l'origine
La majorité des personnes interrogées pensent que le fait d'être né ici n'est pas déterminant pour l'identité suisse. Elles sont 54% à affirmer que c'est plutôt secondaire ou pas important du tout. Le comportement est jugé beaucoup plus important: respectivement 96% et 95% des personnes sondées sont d’avis que le respect des institutions et des lois suisses ou le fait de parler une langue nationale est très important ou plutôt important pour l'identité suisse.
Une très large majorité estime en outre qu'il faut avoir des connaissances en matière de culture et d'histoire. Seule une personne sondée sur quatre considère que l'appartenance à une religion nationale est importante pour avoir une identité suisse.
On remarque un fort contraste entre la Suisse romande et la Suisse italienne en ce qui concerne l'importance du lieu de naissance. Au Tessin, 34% des personnes interrogées considèrent que le fait d'être né en Suisse est très important pour l'identité, alors que seuls 9% des francophones partagent cette opinion. Avec 21%, la Suisse alémanique se situent entre les deux autres régions linguistiques.
Conserver ses valeurs tout en étant suisse
Aux yeux des personnes interrogées, la démocratie directe, l'une des grandes traditions politiques du pays, joue un rôle décisif dans l'identité suisse. Plus de 97% la considèrent comme un élément essentiel de l'identité suisse. La diversité linguistique ainsi que l'attachement à la montagne sont deux autres marqueurs très puissants de l'identité suisse. Les Helvètes, cependant, ne se disent pas fermés aux influences extérieures: 64% d'entre eux sont d'accord avec l'affirmation selon laquelle les immigrés peuvent conserver leurs valeurs tout en restant suisses.
Sur le plan personnel, plus de deux tiers des habitants de la Suisse se décrivent comme pleinement suisses ou presque pleinement suisses. A l’inverse, quasi personne ne se dit "pas du tout suisse". Dans ce contexte, il n'est pas surprenant que trois quarts des personnes interrogées soient d'accord avec l'affirmation: "La Suisse est le meilleur pays du monde où l'on puisse vivre!"
Susanne Stöckl/dk