Chez DPD Suisse, la journée d'un chauffeur commence en général entre 5 et 6 heures du matin. Le chauffeur arrive dans l'un des onze dépôts, charge sa camionnette pendant deux ou trois heures, puis prend la route.
Les chauffeurs font jusqu'à 200 arrêts, selon le jour de la semaine et la tournée. Selon l'enquête de SRF Investigativ, les journées de travail des chauffeurs comptent en général 10 à 12 heures, parfois jusqu'à 14 heures, et cela souvent sans pause.
Jusqu'à 14 heures sans interruption
Interrogée dans cette enquête, la police bernoise de l'immigration, qui a effectué l'année dernière un grand contrôle au dépôt de DPD à Berne, confirme les journées de travail excessivement longues des chauffeurs. "Nous avions des chauffeurs qui nous disaient qu'ils avaient commencé à 2 heures du matin", explique Alexander Ott, chef de la police bernoise de l'immigration. "Ils nous ont expliqué qu'ils devaient d'abord trier les paquets et les répartir par région. Ce n'est qu'ensuite qu'ils peuvent partir."
A ce sujet, l'entreprise a répondu par écrit à SRF Investigativ: "Chez DPD Suisse, nous accordons une grande importance à des conditions de travail équitables et conformes à la loi."
Des pratiques controversées
DPD Suisse s'est organisé de manière à ce que la responsabilité puisse être transférée vers le bas. L'entreprise travaille avec environ 65 sous-traitants pour la distribution et la collecte des colis, elle les appelle "partenaires contractuels indépendants". Selon DPD Suisse, environ 700 chauffeurs sont employés par des sous-traitants. L'entreprise emploie également environ 200 chauffeurs.
DPD impose aussi de nombreuses règles à ses sous-traitants et à ses chauffeurs. Par exemple, les chauffeurs doivent porter les vêtements de DPD, même s'ils sont employés par des sous-traitants. Ce sont donc les sous-traitants qui doivent payer ces vêtements. Ces derniers paient également eux-mêmes les logos DPD sur les camionnettes de livraison. Si le lettrage manque, ils reçoivent un avertissement.
Des problèmes de santé
Les très longues journées de travail sans pauses combinées aux nombreux arrêts et à la forte pression temporelle pèsent également sur la santé des chauffeurs. Mais ce que les chauffeurs mentionnent le plus souvent, c'est le poids des colis: "J'ai de gros problèmes de dos à cause des colis lourds", raconte un jeune homme de 20 ans. Plusieurs mentionnent de gros sacs de nourriture pour chiens qu'ils doivent porter ou encore des roues de voiture que DPD livre à ses clients en Suisse.
Selon DPD Suisse, "bien plus de 99%" de ses colis pèsent moins de 30 kilos. "Dans de rares cas exceptionnels", ils pourraient peser jusqu'à 35 kilos. Dans ces cas, les chauffeurs disposeraient "d'outils appropriés tels que des diables". Et d'ajouter: "La santé de nos chauffeurs est notre priorité, c'est pourquoi nous proposons régulièrement des formations et des mesures préventives afin de minimiser les contraintes." Mais la plupart des chauffeurs ont confié à SRF Investigativ qu'ils n'emportent pas de diable car ils n'ont tout simplement pas le temps de s'en servir.
Pour le chef de la police de l'immigration de Berne, Alexander Ott, il ne fait aucun doute que les chauffeurs qui roulent pour DPD Suisse sont exploités et utilisés: "Nous parlons d'une exploitation claire de la situation de travail. Celle-ci peut rapidement évoluer vers des rapports de dépendance." Et d'ajouter que les conditions de travail dans les services de livraison restent un sujet de préoccupation.
SSR dialogue, sur la base d'une enquête de Simone Rau et Philippe Odermatt (SRF)