Le 3 novembre 2023 sortait la dernière enquête suisse sur la santé (ESS) de l'OFS pour l'année 2022. Réalisée tous les 5 ans depuis 1992 sur mandat du Conseil fédéral, cette dernière est la plus grande étude sur la santé globale de la population menée à ce jour par l'OFS. Quelque 22'000 personnes habitant en Suisse y ont été interrogés sur leur "état émotionnel".
Un chiffre du rapport s'est avéré alarmant: 29% des jeunes femmes âgées de 15 à 24 ans sont en détresse psychologique, contre 19% lors de la dernière enquête, menée en 2017. Dans la population, de façon plus générale, 18% expriment ce mal-être. Ce dernier chiffre a fait un bon de 3 points, puisqu'il s'élevait à 15% en 2017.
>> Lire à ce sujet : La détresse psychologique augmente depuis cinq ans, surtout chez les jeunes femmes
Anne Lévy, directrice de l'Office fédéral de la santé publique (OFSP), indiquait déjà ce même 3 novembre 2023 dans le 12h45 de la RTS qu'il était désormais nécessaire de déterminer les causes de ces chiffres. Elle questionnait l'existence d'une véritable péjoration ou simplement le fait que les jeunes femmes "vont plus simplement chercher de l'aide" qu'en 2017, ce qui serait finalement "considéré comme positif".
Quoiqu'il en soit, partant de ces constats récents sur la santé mentale de la population, c'est à une réflexion plus générale que les contributrices et contributeurs du forum de discussions de la SSR "dialogue" ont voulu inviter. Sur la base du vote du public, la question "Santé mentale: la Suisse est-elle en crise?", proposée par un utilisateur de la plateforme, a récolté l'assentiment général. Et vous, qu'en pensez-vous? Venez partager vos opinions et échanger vos analyses avec toute la Suisse.
Des coûts en hausse
Cette hausse des troubles mentaux se ferait ressentir dans les structures de prises en charge et se répercuterait sur les coûts. C'est ce que suggère Simone Wieser, économiste de la santé à la ZHAW (Zürcher Hochschule für Angewandte Wissenschaften), auprès de SRF fin novembre 2023.
"La demande actuelle de places de thérapie, les psychiatres pour enfants et adolescents fortement sollicités et les capacités accrues dans ces domaines indiquent que même aujourd'hui, après le Corona, les maladies mentales représentent une part importante, voire plus grande, des coûts", expliquait-il au média public alémanique.
Philippe Luchsinger, président de l'Association des médecins généralistes et pédiatres, le confirmait également à SRF: "Les maladies mentales ont sensiblement augmenté ces trois dernières années, notamment chez les adolescents et les jeunes adultes". Une sensible hausse qui se fait tout de même sentir pour de nombreux psychologues, dont les listes d'attente ne font que s'allonger.
Plus de 2 millions de proches en soutien
Résultant de cet état de santé mental général de la population, plus de 2 millions de Suissesses et de Suisses ont déjà jouer au moins une fois le rôle de "proche de confiance" pour une personne souffrant d'une maladie mentale. C'est ce qui ressort des conclusions d'une étude publiée le 20 mars 2024 par l'institut Sotomo.
L'enquête "Stand by You: Situation des proches et personnes de confiance d’individus atteints de maladies psychiques en Suisse" révèle que ce soutien est, évidemment, très important pour les personnes souffrant de troubles mentaux. La plupart d'entre elles, en effet, devraient autrement dépendre d'une aide professionnelle supplémentaire.
L'intelligence artificielle "thérapeutique", entre avancées et dérives
Faute de moyens, les jeunes se tournent parfois vers l'intelligence artificielle. Ils sont de plus en plus nombreux à utiliser des IA "thérapeutiques", sous forme de chatbot internet ou d'application sur smartphone.
Ces technologies présentent des avantages, mais le risque de dérives est réel, peut-on apprendre dans la Matinale de la RTS.
Une population vulnérable: la détresse des jeunes requérants d'asile
Si la détresse psychologique semble particulièrement toucher les jeunes femmes de 15 à 24 ans, il ne faut pas sous-estimer les risques qu'encourent d'autres populations.
C'est le cas notamment des jeunes requérants d'asile, souvent des hommes, en général moins enclins à parler de leurs souffrances, comme le révélait en mars 2023 Sydney Gaultier, psychologue au CHUV, dans une interview pour SWI swissinfo.ch. Codirecteur de l'ouvrage "Mineurs non accompagnés: repères pour une clinique psychosociale transculturelle", publié en janvier 2023, l'expert pose la question de l’accompagnement de ces personnes dans leur parcours vers l’âge adulte et l’autonomie.
De la difficulté de parler de santé mentale
Aujourd'hui, nous parlons de notre "enfant intérieur", nous remarquons des "traits narcissiques", ou nous sommes "déprimés" au lieu d'être de mauvaise humeur. Le langage dit "thérapeutique", façonné par des décennies de découvertes et de progrès psychologiques, se glisse du fauteuil thérapeutique dans notre langage quotidien, dans les médias sociaux et dans le discours public.
Dans le podcast "100 Sekunden Wissen" de SRF, la journaliste Ana Matijasevic s'est posée la question de l'usage toujours plus étendu de la notion de "traumatisme", ainsi que des effets de la démocratisation de ce concept.
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Où trouver de l'aide?
Sur internet:
Pour la promotion de la santé mentale dans les cantons latins: santépsy.ch
Pour les enfants et les personnes adolescentes: ciao.ch
Pour les 18-25 ans: ontécoute.ch
Pour la prévention du suicide des jeunes: stopsuicide.ch
Le Groupe Romand de Prévention du Suicide: preventionsuicide-romandie.ch
L'Unité Malatavie des HUG pour les adolescent·e·s en crise: malatavie.ch ou par téléphone (24h/24): 022 372 42 42
Par téléphone:
147: Pro Juventute – Ecoute et conseils pour les jeunes (147.ch)
143: La Main Tendue – Ecoute et conseils pour les adultes (143.ch)
144: Ambulances – Urgences