La Pologne était en deuil dimanche après une nuit d'hommages
spontanés et de prières à l'intention des victimes de la catastrophe survenue
près de Smolensk (ouest de la Russie), qui a fait 96 morts, selon
le dernier bilan officiel.
Cérémonie à l'aéroport
La famille du président défunt, notamment sa fille Marta et son
frère jumeau, Jaroslaw Kaczynski, ainsi que les plus hautes
autorités polonaises, étaient présents à l'aéroport où s'est
déroulée une cérémonie religieuse. Le Premier ministre Donald Tusk,
le président de la chambre basse du parlement polonais et chef de
l'Etat par intérim, Bronislaw Komorowski, et le président du
Parlement européen Jerzy Buzek ont notamment assisté à cette
cérémonie.
Des prières ont été récitées par le nonce apostolique en Pologne,
l'archevêque Jozef Kowalczyk, le secrétaire de l'épiscopat de
Pologne, l'évêque Stanislaw Budzik, et l'archevêque de Varsovie,
Kazimierz Nycz. La fille de Lech Kaczynski a été la première à
s'agenouiller devant le cercueil de son père recouvert d'un drapeau
polonais blanc et rouge. Après elle, Jaroslaw Kaczynski a rendu
hommage à son frère.
Il est resté longtemps agenouillé avant de poser brièvement la
main sur le cercueil et de faire un signe de croix. Tour à tour,
les proches de Lech Kaczynski et les personnalités réunies à
l'aéroport ont effectué les mêmes gestes. Le cercueil a été placé
dans un corbillard, au son de la Marche Funèbre de Frédéric
Chopin.
La foule bouleversée
Des dizaines de milliers de personnes se sont massées tout au
long du parcours du cortège vers le palais présidentiel, dans le
centre historique de Varsovie. Sur la route, les gens
s'agenouillaient, pleuraient, jetaient des fleurs sur le trajet du
cortège.
Devant la
présidence, au moment de l'arrivée de la dépouille du président,
une foule compacte a entonné l'hymne national polonais et des
chants religieux. D'immenses tapis de bougies et de fleurs,
déposées par les Varsoviens depuis samedi, ornaient la chaussée
devant la présidence.
Dans la journée, deux minutes de silence ont été observées à midi
dans tout le pays, sur l'ordre du président du Parlement Bronislaw
Komorowski, qui assure l'intérim du chef de l'Etat. A Varsovie, une
immense foule continuait d'affluer devant le palais présidentiel
aux drapeaux en berne pour déposer roses, bougies et messages, ou
signer le registre de condoléances.
"L'élite de notre pays a péri", a écrit l'ancien président Lech
Walesa, qui avait été proche de Lech Kaczynski à l'époque du
syndicat Solidarnosc. De nombreux offices religieux ont été
célébrés, notamment à Notre-Dame de la Couronne polonaise, l'église
de l'Armée dans le centre-ville, où des milliers de personnes
encore s'étaient réunies.
Funérailles pas fixées
La date des funérailles du président Kaczynski n'a pas encore
été fixée. Le président de la Diète, la chambre basse du Parlement,
assure l'intérim. Bronislaw Komorowski, qui a déclaré une semaine
de deuil national samedi, a annoncé qu'il convoquerait des
élections anticipées sous 14 jours, conformément à la Constitution.
Le scrutin doit avoir lieu dans les 60 jours suivants, soit d'ici à
la fin juin.
Tous les centres commerciaux, qui attirent traditionnellement le
dimanche les Polonais par familles entières, étaient fermés. Les
drapeaux en berne étaient visibles non seulement sur des bâtiments
publics, mais aussi aux fenêtres de particuliers.
Les corps des autres victimes, dont de hauts responsables
politiques de différente affiliation politique de droite à gauche,
ont été transportés à Moscou. Selon des médias polonais, la
municipalité a réservé pour leurs proches 450 chambres d'hôtels,
des moyens de transports et un soutien psychologique, prenant en
charge tous les frais. Le corps de l'épouse de Lech Kaczynski,
Maria, n'a pas été identifié pour l'instant, selon la présidence
polonaise.
agences/mej
L'avion n'avait pas de problème technique
Les enquêteurs du Parquet russe ont exclu dimanche que l'accident de l'avion présidentiel polonais en Russie soit dû à un problème technique. Des experts russes et polonais ont commencé ensemble dans un laboratoire à Moscou l'examen des boîtes noires -l'enregistreur de son et celui des données- retrouvées sur les lieux de la catastrophe aérienne.
Si la Pologne gardait un silence total sur ce que pourraient être selon elle les causes de l'accident, les Russes ont déclaré dimanche exclure tout problème technique à bord de l'avion, mettant de nouveau en cause les pilotes polonais.
"L'enregistrement qui est à notre disposition confirme que l'avion n'avait pas de problèmes techniques", a déclaré le chef du comité d'enquête russe Alexandre Bastrykine au cours d'une rencontre avec le Premier ministre russe Vladimir Poutine, selon des images diffusées par la télévision russe.
"Le pilote a été informé de conditions météorologiques compliquées, mais a néanmoins pris la décision d'atterrir", a-t-il expliqué.
Samedi, le commandant adjoint de l'état-major de l'armée de l'air russe, Alexandre Aliochine, avait déjà affirmé que les pilotes polonais avaient ignoré les instructions des aiguilleurs du ciel russes qui leur demandaient de se diriger vers un autre aéroport en raison d'un épais brouillard.
Le décryptage de l'enregistreur de données doit commencer dans la soirée, a indiqué le ministre russe des Transports Igor Levitine au cours d'une rencontre avec Vladimir Poutine.
Un autre groupe russo-polonais continue de travailler sur le site de la catastrophe, près de Smolensk, a-t-il précisé. Les autorités russes ont supprimé dimanche le périmètre de sécurité autour du lieu de l'accident, où des fleurs et des bougies allumées ont aussitôt été déposées.
L'hommage des 9000 Polonais de Suisse
Les Polonais de Suisse se sont pressés dimanche avec des fleurs et des bougies à leur ambassade à Berne, où un livre de condoléances a été ouvert, comme à Genève.
Les livres de condoléances sont à disposition jusqu'à mercredi à l'ambassade à Berne et à la mission polonaise auprès de l'ONU à Genève.
A Zurich, la communauté polonaise a rendu hommage lors d'une messe aux victimes de la catastrophe aérienne survenue samedi en Russie. Une représentante de l'ambassade avait fait le voyage depuis Berne, la messe s'est déroulée en l'église du Sacré-Coeur à Wiedikon, a indiqué Mariola Zagalak, présidente de la Société polonaise "Zgoda" (concorde), dont le siège est à Zurich.
Le président polonais et son épouse se sont tous deux rendus en Suisse encore récemment, Lech Kaczynski au Forum économique mondial de Davos, et Maria Kaczynska fin mars à Genève pour un concert en l'honneur de Frédéric Chopin.
Environ 9000 Polonais vivent en Suisse.