L'appel du président Villiger à tourner la page est resté sans
écho. La décision la plus attendue sur la décharge des anciens
responsables est tombée mercredi en fin d'après-midi après une
assemblée-marathon de plus de huit heures à la halle St-Jacques de
Bâle.
Les actionnaires ont finalement refusé à
52,75% de donner quittance aux responsables de l'année 2007, au
temps des subprimes et des aides à la fraude fiscale aux Etats-Unis
qui ont in fine coûté très cher à la banque.
Les anciens présidents Marcel Ospel et Peter Kurer et les
ex-directeurs Peter Wuffli et Marcel Rohner restent ainsi passibles
de poursuites en responsabilité. La décharge a en revanche été
accordée pour les année 2008-2009.
Cette décision historique a suscité des réactions unanimement positives des
partis politiques.
Les bonus de justesse
L'actuel conseil d'administration, qui soutenait la décharge, a
d'abord senti le vent du boulet concernant l'autre point sensible à
l'ordre du jour: le rapport de rémunération 2009. Les actionnaires
ne l'ont approuvé qu'à 54,7%, avalisant ainsi de peu les bonus
versés aux dirigeants malgré un exercice bouclé sur une perte de
2,7 milliards de francs.
L'ensemble des rémunérations des membres du conseil
d'administration s'est élevé à 69 millions de francs. Le président
d'UBS Kaspar Villiger a pris bonne note de la relative forte
opposition et a assuré qu'il en serait tenu compte.
"Trop grands pour aller en prison"
Peut-être ne s'attendait-il pas à ce
que le rapport s'inverse ensuite lors du vote sur la décharge 2007.
Le dynamisme du front des opposants à la quittance, incarné
notamment par la fondation Ethos, a finalement payé.
Son directeur, Dominique Biedermann, est monté à la tribune pour
expliquer que les responsables de la débâcle doivent répondre de
leurs actes. Il a appelé UBS à déposer une plainte civile.
Dominique Biedermann a reproché au conseil d'administration d'être
complice des anciens dirigeants en prônant la décharge: "Vous devez
vous distancier clairement de leur attitude. C'est la seule manière
d'être crédible et de regagner la confiance".
Près de 5000 actionnaires s'étaient réunis dans la halle. Une
soixantaine d'orateurs étaient inscrits et plusieurs petits
actionnaires ont pris la parole pour dire leur mécontentement, qui
au sujet des rémunérations des cadres supérieurs, qui au sujet de
la décharge des anciens dirigeants. En écho à la problématique du
"too big to fail", une intervenante a dénoncé l'immunité de
dirigeants "too big to jail", autrement dit "trop grands pour aller
en prison".
Procès cher et voué à l'échec
Auparavant, Oswald Grübel, patron
d'UBS, et Kaspar Villiger n'avaient pas ménagé leurs efforts pour
convaincre de donner la décharge aux anciens dirigeants, "la
meilleure solution tant du point de vue juridique que de la
politique d'entreprise", selon les mots de Villiger.
"Notre volonté est d'aller de l'avant, de tourner la page", a
déclaré l'ancien conseiller fédéral, assurant que l'actuel conseil
d'administration travaillait désormais avec une "grande humilité".
Ce n'est pas le coeur léger que le conseil d'administration a
renoncé à lancer des poursuites contre les anciens responsables,
a-t-il ajouté.
Mais il a fallu se rendre à l'évidence qu'une plainte pénale
n'aurait eu aucune chance de succès: "faire de mauvaises affaires
n'est pas punissable en soi". Quant à un procès civil, il ne serait
dans l'intérêt ni de la banque ni des actionnaires. En général, ce
type de démarche coûte des millions de francs, prend du temps et,
généralement, tourne court, a argumenté le Lucernois.
"Bien mieux que prévu"
Oswald Grübel a relevé de son côté
les efforts gigantesques entrepris pour redresser la barre.
L'objectif prioritaire fixé il y a un an, soit renforcer le capital
et rétablir la rentabilité a été atteint.
Il a cependant admis que le chemin vers la restauration complète
de la confiance serait encore long. Désormais, la première priorité
est de stopper les sorties de fonds. Les résultats du premier
trimestre 2010, annoncés de manière anticipée lundi dernier,
démontrent les progrès réalisés à ce sujet et font état d'un
bénéfice de 2,5 milliards de francs.
Sur le front politique , le Conseil fédéral a aussi pris des
décisions concernant UBS, qui devra solder une facture de 40
millions pour le litige avec les Etats-Unis.
agences/cer/ther
Kaspar Villiger prend acte
Kaspar Villiger a pris acte mercredi à Bâle du refus des actionnaires de l'UBS d'accorder la décharge aux ex-responsables du numéro un bancaire suisse au titre de l'exercice 2007.
Le résultat ne change en rien la décision du conseil d'administration de renoncer à des plaintes en responsabilité, a dit le président de l'établissement.
Kaspar Villiger a indiqué qu'une nouvelle analyse de la situation ne changerait pas l'avis de l'organe de surveillance, pour autant qu'aucun fait nouveau n'intervienne.
Il a précisé que les actionnaires disposaient eux dorénavant d'un délai de cinq ans pour intenter une procédure judiciaire contre les anciens dirigeants de la banque.
Plusieurs représentants d'actionnaires, notamment la fondation genevoise Ethos, avaient appelé depuis plusieurs semaines à refuser la décharge.