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Élections fédérales 2011: "place à l'acrobatie"

Le PLR de Fulvio Pelli et l'UDC de Toni Brunner font partie des perdants de ces élections. [Walter Bieri]
Le PLR de Fulvio Pelli et l'UDC de Toni Brunner font partie des perdants de ces élections. - [Walter Bieri]
Le recul de l'UDC aux élections fédérales représente un tournant dans la vie politique helvétique, analyse lundi la presse romande. Le renforcement du centre va peser sur l'élection au Conseil fédéral du 14 décembre, considèrent les éditorialistes. Côté alémanique, les quotidiens s'intéressent surtout à la percée des petits partis.

La Suisse entre dans une "nouvelle ère, aussi multipolaire qu'indécise", analyse 24 heures. Pour le quotidien vaudois, l'UDC paie "son manque de crédit dans les exécutifs et son rôle de contestataire permanent". Un "coup d'arrêt sévère" a été donné à l'UDC, écrit Le Temps. Le journal estime que "le parti renvoie l'image d'une droite dure au moment où le pays devine qu'il faudra trouver des solutions au centre pour faire face à une situation économique qui s'annonce de plus en plus difficile et incertaine".

Lassitude

Le recul de l'UDC reflète une certaine lassitude d'une partie des Suisses notamment face à un discours sécuritaire monomaniaque, écrit Le Matin. L'UDC perd davantage que le PBD ne gagne, analyse Le Quotidien Jurassien. Le vote montre que les aspirations du pays "commencent à s'écarter des peurs primaires agitées par la droite nationaliste" pour se porter sur les réelles préoccupation du pays en matière économique, sociale et environnementale.

Blocher, seulement troisième de l'élection pour le conseil des Etats [Steffen Schmidt]
Blocher, seulement troisième de l'élection pour le conseil des Etats [Steffen Schmidt]

La vraie redistribution des cartes a eu lieu au centre. Une bonne partie de la presse romande souligne le coup porté à la bipolarisation ayant marqué la politique depuis une dizaine d'années. Pour la Tribune de Genève, la montée en puissance du PBD et des Vert'libéraux a "explosé le centre de l'échiquier politique".

Cette ruée signifie d'abord que les Suisses n'ont plus confiance dans les partis traditionnels. Au Parlement, le corps de centre-droit se renforce "dans l'addition de ses division", note La Liberté, pour qui cette fragmentation compliquera incontestablement la recherche de majorités parlementaires. "Place désormais à l'acrobatie, avec le peuple pour filet de sécurité".

"Vent frais sous la Coupole"

Le succès inattendu des Vert'libéraux et du PBD devrait provoquer un électrochoc auprès des partis gouvernementaux, juge Le Matin. Pour sa part, 24 heures rappelle que les "éléphants" - les présidents des quatre partis principaux - "un peu vexés et mauvais perdants" ont glosé sur "l'effet de mode" ayant porté les nouveaux venus. "Un vent frais sous la Coupole", résume Le Nouvelliste, pour qui le résultat des élections "n'affaiblit pas vraiment la droite fédérale". Pour le quotidien valaisan, l'émiettement au centre renforcera la recherche du consensus "et peut même favoriser l'émergence d'une nouvelle forme de concordance".

Une autre surprise de ces élections est mise en exergue: le revers des écologistes. Ils n'ont pas profité de "l'effet Fukushima", notent 24 heures et Le Temps, ce dernier ajoutant que leur posture contestataire et puriste ne convainc plus dans un pays qui avance par petits pas. Le Journal du Jura pleure la non réélection de l'UDC neuvevillois Jean-Pierre Graber au Conseil national. Il prend acte que pour la première fois depuis la naissance de la Suisse moderne, le Jura bernois n'aura plus de représentant sous la Coupole fédérale.

Les éditorialistes spéculent aussi sur l'impact de ces législatives sur l'élection du Conseil fédéral le 14 décembre. La prétention de l'UDC d'obtenir un deuxième siège est affaiblie, écrit Le Quotidien Jurassien. En outre, cette perspective menace directement l'un des deux ministres du PLR. La Liberté s'enthousiasme de l'élection d'Alain Berset aux Etats. Le premier étage de la fusée qui pourrait le propulser au rang de ministre a parfaitement fonctionné, se réjouit le journal fribourgeois qui précise que l'élection du Conseil fédéral promet d'être un "exercice de funambule". Pour La Tribune de Genève, c'est le moment de trouver une formule magique pour une telle élection. De l'avis du Matin, ce Parlement devra faire preuve d'une grande sagesse pour dégager des majorités. Et de conclure: "Le grand marchandage peut commencer".

Presse alémanique critique

Les recettes des partis gouvernementaux ne fonctionnent plus, diagnostique la Berner Zeitung après examen des résultats des élections de dimanche. Qui veut séduire le corps électoral devrait présenter des positions compréhensibles sur les thèmes politiques fondamentaux, conseille le journal.

Chevalley devrait être la première verte libérale romande élue sous la Coupole. [Olivier Maire]
Chevalley devrait être la première verte libérale romande élue sous la Coupole. [Olivier Maire]

Pour la Neue Zürcher Zeitung (NZZ), les électeurs ont voulu insuffler de l'air frais sous la Coupole fédérale. Cela ne peut pas nuire après une législature encroûtée, estime le quotidien zurichois. "Le centre a certes gagné et le cartel des partis au pouvoir chancelle. Il n'est toutefois pas tombé." La NZZ se montre plus critique avec le succès électoral des petits partis. Avide de nouveautés pragmatiques, le corps électoral a accordé ses faveurs aux nouvelles formations du centre. Pour preuve, les lauriers remportés par les Vert'libéraux, un parti sans programme électoral.

Les pertes de l'UDC sont aussi analysées par plusieurs organes de presse. A Zurich, le Tages-Anzeiger commente le recul de ce parti qui reste la force politique la plus importante du pays. Son éditorialiste considère que le désenchantement de l'UDC "fera du bien autant à l'ami qu'à l'ennemi". Le quotidien Blick porte la responsabilité du résultat de l'UDC sur Christoph Blocher, qui s'est fait distancer.

La presse alémanique ne se risque pas à dessiner les contours du futur Conseil fédéral après l'élection du 14 décembre. En dépit des pertes de l'UDC, le deuxième siège réclamé par les démocrates du centre n'est a priori pas contesté. Plusieurs commentateurs espèrent qu'avec les pertes infligées, le parti conservateur devienne un peu plus domestiqué, plus consensuel et prêt à présenter des candidats faisant preuve de collégialité.

ats/bkel

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