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A Montreux, salle comble pour Lenny Kravitz mais c'est Benjamin Booker qui conjugue l'histoire du rock au présent

"Are You Gonna Go My Way", "Mama Said" ou "Fly Away", autant de tubes que Lenny Kravitz jouera certainement lors de son concert à guichet fermé, le 13 juillet. [EPA/Keystone - Andrew Gombert]
"Are You Gonna Go My Way", "Mama Said" ou "Fly Away", autant de tubes que Lenny Kravitz jouera certainement lors de son concert à guichet fermé, le 13 juillet. - [EPA/Keystone - Andrew Gombert]
Montreux a vécu lundi soir un pur moment de rock'n'roll avec Benjamin Booker. Le public était certes là pour Lenny Kravitz. Cela n'a pas empêché le trio américain de déverser toute l'histoire du rock et de toucher au sublime. Compte rendu de nos énvoyés sur place, Christophe Schenk et Alain Croubalian.

N'allez pas croire tout ce qu'on raconte dans les journaux. Certains disent que Montreux se vit la nuit, entre deux bars, les yeux cernés, et que les plus belles surprises se nichent peu avant l'aube. Pourtant, hier soir, il fallait venir tôt pour assister à l'un des meilleurs concerts de la quinzaine, le plus rock'n'roll, assurément.

A 20h tapantes

Il est 20 heures tapantes lorsque le trio de Benjamin Booker débarque sur la scène d'un Stravinski à moitié rempli. Peu importe, les Américains balancent la sauce dès le premier morceau, pied au plancher. Guitare saturée, basse vrombissante et rythmiques épileptiques, tout est réuni pour un pur moment de rock'n'roll, que ne renieraient ni Jack White, ni les Black Keys première époque. Et puis il y a cette voix, surtout. Cette voix éraillée, rentrée et brûlante pourtant, entre Tricky et Tom Waits, capable de tout, comme d'entonner une ballade folk - violon et mandoline de sortie - avant de repartir dans une cavalcade garage.

Crooner électrique, Benjamin Booker a des airs de boxeur lorsqu'il s'emporte. Comme un jeune Cassius Clay, ici amarré à sa six-cordes, le jeu acéré et virtuose. Pour le musicien de 26 ans, un concert est un combat. Il ne va pas être déçu. Car si la salle se remplit, les premières rangs, tout acquis à Lenny Kravitz annoncé pour 21h30, sont trop mous au goût du rocker. Il les harangue, les provoque, puis se lasse, au détour d'un refrain repris à moitié seulement, ponctue l'échange d'un sec doigt d'honneur.

Une saine colère

Comme revigoré par cette saine colère, Booker relance la machine et touche au sublime. Soudain, c'est toute l'histoire du rock'n'roll qui se déroule, des riffs de Chuck Berry au tranchant des Strokes, en passant par le bruitisme du grunge. Une histoire dont Benjamin Booker rappelle les origines noires et s'empare de l'héritage. Le rhythm'n'blues se teinte de garage, les élans punk sont traversés par un souffle soul, la saturation devient groove.

Enchaînant les hits potentiels - en tête l'irrésistible Violent Shiver - les trois hommes font grimper la température à mesure que filent les minutes. Jusqu'à s'offrir un feu d'artifice de larsens qui doit autant à Hendrix qu'à Sonic Youth, Booker torturant sa guitare avant de la livrer à ses amplis pour un culte électrique, puis de l'abandonner au milieu de la scène, crachant un dernier cri interminable. Un technicien viendra l'éteindre plus tard, tandis qu'on se refait le film, persuadé d'avoir vu, à défaut du futur du rock'n'roll, pas mal de son passé, conjugué pour une fois au présent.

Salle comble pour Lenny Kravitz

Si lundi soir le rock était à l'honneur, ce n'était pourtant pas grâce à la star de la soirée, Lenny Kravitz.

>> Ecoutez la chronique d'Alain Croubalian :

Lenny Kravitz en 2013. [EPA/Keystone - Andrew Gombert]EPA/Keystone - Andrew Gombert
Salle comble à Montreux pour la venue de Lenny Kravitz / Le Journal du matin / 1 min. / le 14 juillet 2015

Christophe Schenk/mcc

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