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Un revenu de base pour tous, utopie folle ou nouveau modèle génial?

Initiative populaire du 4 octobre 2013 "Pour un revenu de base inconditionnel". [Keystone - Ennio Leanza]
Initiative populaire du 4 octobre 2013 "Pour un revenu de base inconditionnel". - [Keystone - Ennio Leanza]
Les Suisses doivent décider le 5 juin prochain s'ils acceptent l'idée de verser à tous une rente mensuelle suffisante pour vivre. Cette révolution se veut une réponse à l'automatisation croissante du travail.

La révolution numérique et la robotisation du travail menace de nombreux emplois. Dans ce contexte, un groupe de citoyens indépendants de tout parti politique a relancé l'idée d'instaurer en Suisse un revenu de base inconditionnel (RBI). Signée par 126'000 citoyens, leur initiative a abouti en octobre 2013.

L'objectif du RBI, selon le texte de l'initiative, est de "permettre à l'ensemble de la population de mener une vie digne et de participer à la vie publique". Les initiants sont convaincus que cette mesure, en sus d'améliorer la qualité de vie, stimulerait l'esprit d'entreprise, la créativité et le volontariat.

Rente mensuelle sans condition

Il s'agit de verser une rente mensuelle à chaque habitant du pays, sans condition, quel que soit son salaire ou sa fortune. Le texte, soumis au verdict du peuple, ne précise pas le montant du revenu de base ni le mode de financement. C'est le Parlement qui sera chargé de les définir en cas d'acceptation le 5 juin.

Les promoteurs de l'initiative articulent toutefois une proposition: tous les adultes recevraient une rente mensuelle de 2500 francs, tandis que les enfants et les jeunes jusqu'à 18 ans auraient droit à 625 francs par mois. Le RBI ne constitue toutefois pas un revenu supplémentaire et seules les personnes gagnant moins de 2500 francs seraient réellement impactés positivement (cf. mécanisme ci-dessous).

Débat sur le coût

Sur la base de ces chiffres et des données de l'année 2012, la Confédération a calculé un coût total de 208 milliards de francs par an. Une grande partie de cette somme pourrait être couverte par des prélèvements sur les revenus d'une activité lucrative et la réaffectation des prestations de sécurité sociale. Mais il faudrait encore combler un trou de 25 milliards environ.

Selon les opposants, des économies ou des hausses d'impôts massives seraient inévitables, une hypothèse jugée non raisonnable par le Conseil fédéral. Les initiants, de leur côté, ont évoqué plusieurs pistes, dont un relèvement de la TVA de 8 points de pourcentage. L'instauration d'une micro-taxe sur les transactions financières ou d'une taxe sur les ordinateurs a aussi été proposée par certains.

Menace sur l'économie et le système social

Parallèlement à l'argument financier, les anti-RBI prédisent également un affaiblissement de l'économie helvétique en raison d'un recul du taux d'activité et de la performance économique. Cela conduirait à une baisse significative des recettes fiscales et, par conséquent, à une restriction des moyens alloués à de nombreux domaines.

Enfin, l'introduction d'un revenu de base ne permettrait pas de remplacer intégralement ni de simplifier le système de sécurité sociale, ajoutent les opposants à l'initiative. Certains, notamment à gauche, craignent d'ailleurs une remise en cause de l'ensemble du système de sécurité sociale suisse qui, même s'il n'est pas parfait, fonctionne bien.

Initiative balayée au Parlement

L'initiative "Pour un revenu de base inconditionnel" a été rejetée nettement par les Chambres fédérales, par 157 voix contre 19 (et 16 abstentions) au Conseil national et par 40 voix contre 1 (et 3 abstentions) au Conseil des Etats. Seule une très faible minorité issue de la gauche a soutenu le texte.

dk avec agences

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Le mécanisme du RBI

Pour bien comprendre le mécanisme du revenu de base inconditionnel (RBI), voici ce qui en cas d'instauration d'un RBI de 2500 francs mensuels, pour différentes situations.

Pas d'activité lucrative: Toute personne dans cette situation disposerait d'un revenu mensuel de 2500 francs par mois, soit l'équivalent du RBI. Par rapport au système actuel (sans prendre en compte les éventuelles prestations sociales), sa situation s'en trouverait par conséquent améliorée.

Revenu inférieur à 2500 francs par mois: Une personne dans cette situation recevrait elle aussi de 2500 francs chaque mois. En revanche, l'intégralité du revenu issu d'une activité lucrative serait versé à la caisse de financement du RBI. Au final, l'opération resterait néanmoins avantageuse.

Revenu égal ou supérieur à 2500 francs par mois: Pour les personnes dans cette situation, le RBI ne changerait rien. Elles recevraient une rente de 2500 francs par mois, mais ce montant serait retranché de leur revenu issu d'une activité lucrative.

Le même principe s'appliquerait si on tenait compte des prestations sociales. Jusqu'à 2500 francs, elles seraient remplacées par le RBI, tandis que la part dépassant cette somme continuerait à être versée par les institutions sociales.

Encadré historique + comparaison internationale