Quelles sont les conséquences des sanctions sur le diesel russe pour la Suisse?
Le diesel est incontournable en Europe et en Suisse, pour le transport ou le chauffage par exemple. Actuellement, plus de la moitié des importations de gazole consommé en Europe viendrait de Russie, d'une part en raison de sa qualité, mais d'autre part aussi car l'Europe n'a pas les capacités de raffinage suffisantes.
"La stratégie de détournement a un coût"
Dans l'émission Forum, Patrick Gantes, spécialiste du secteur pétrolier et secrétaire général du Centre de Recherches Entreprises et Sociétés (CRES), explique que la difficulté d'obtention du diesel est relative. "On ne peut plus s'adresser à la Russie, mais des dispositions ont été prises."
En plus des deux mois de stockage pétroliers assurés pour sa consommation, la Suisse compte s'adresser à des revendeurs tiers, comme l'Inde et la Chine. Mais, la stratégie de contournement, qui consiste à éviter de passer par la Russie afin d'affecter ses rentrées économiques, a un coût, rappelle le secrétaire du CRES.
Il explique que le prix imposé directement par les producteurs est relativement stable. Par contre, lorsqu'on passe par un tiers, il y a de potentiels coûts de transport supplémentaires en raison de la distance du vendeur. "Et les tiers prennent aussi leur marge ", rajoute Patrick Gantes.
Garder un oeil sur le brut
En Europe, 40% des voitures roulent au diesel. En Suisse, environ 30% des automobilistes sont concernés. Selon Patrick Gantes, le prix du diesel ne devrait pas augmenter dans l'immédiat pour les Hélvètes. Mais "à terme, les prix suivront l'évolution du coût du produit brut", rappelle-t-il. Ainsi, selon lui, si la consommation de diesel augmente en Chine ou en Inde, le prix du brut pourrait être tiré à la hausse.
En outre, le spécialiste rappelle que les pays gagnants seront des producteurs comme les Émirats arabes unis ou l'Arabie saoudite, ainsi que les revendeurs comme certains pays d'Afrique du Nord. "Sur le papier, ça ne sera pas du diesel russe. Mais matériellement, il y a de fortes chances que ça le soit", conclut-il, en rappelant qu'une partie du diesel russe sera exporté vers des pays tiers qui le réexporteront ensuite en Europe à des coûts plus élevés.
Propos recueillis par Esther Coquoz
Adaptation web: Raphaël Dubois