Sur le front ukrainien, le désespoir des soldats de ne pas pouvoir riposter sur le sol russe
L'Ukraine réclame depuis plusieurs mois à ses alliés de pouvoir utiliser les armes livrées par les Occidentaux contre des cibles militaires sur le sol russe. Le sujet divise ses soutiens. Parmi les pays les plus réticents, l'Italie et l'Allemagne mettent en avant le risque d'un emballement, avec en filigrane la crainte de l'utilisation de l'arme nucléaire par la Russie.
Le 28 mai dernier, le président français Emmanuel Macron, jusqu'ici aussi intraitable sur le sujet, s'est montré ouvert à la question pour "neutraliser" les bases militaires d'où la Russie tire ses missiles sur le territoire ukrainien.
En fait, on leur dit, on vous livre des armes, mais vous ne pouvez pas vous défendre
"Si on leur dit, vous n'avez pas le droit d'atteindre le point d'où sont tirés les missiles, en fait on leur dit, on vous livre des armes, mais vous ne pouvez pas vous défendre", a pointé Emmanuel Macron, au dernier jour d'une visite d'Etat en Allemagne.
"Mais on ne doit pas permettre de toucher d'autres cibles en Russie et évidemment des capacités civiles", a-t-il précisé.
En réponse, le président russe Vladimir Poutine a menacé mardi de "graves conséquences" en cas d'usage d'armes occidentales contre le territoire russe. "En Europe, en particulier dans les petits pays, ils doivent réfléchir à ce avec quoi ils jouent. Ils doivent se souvenir qu'ils sont bien souvent des Etats ayant un petit territoire et une population très dense", a-t-il averti.
"Nous sommes dans une impasse"
Théâtre actuellement d'une grande offensive russe, la région de Kharkiv est frappée quotidiennement par les troupes de Moscou. Des brigades tentent de contenir les attaques quotidiennes, mais la situation est "très difficile" à tenir, selon l'un des commandants d'une unité d'assaut, qui a accepté de témoigner dans un reportage de La Matinale.
Selon lui, la Russie a nettement l'avantage: "On fait tout ce qui est en notre pouvoir pour empêcher les Russes d’avancer sur la ville de Kharkiv. On fait tout ce qu’on peut pour stabiliser le front, mais très honnêtement, nous sommes maintenant dans une impasse."
C’est l’interdiction de frapper sur le territoire russe qui permet à l’ennemi de concentrer ses forces
Ce haut-gradé ukrainien désespère de pouvoir enfin recevoir l'autorisation de riposter sur le territoire russe. "Nous devons détruire au maximum les armes sur leur territoire pour empêcher nos villes d’être bombardées, en particulier Kharkiv. Il nous faut bombarder leur territoire pour les empêcher de concentrer leurs soldats comme ils le font, juste à notre frontière", explique-t-il.
Et de développer son propos: "C’est l’interdiction de frapper sur le territoire russe qui permet à l’ennemi de concentrer ses forces, ses armes, son artillerie près de la frontière, et ensuite de très rapidement la traverser pour mener des assauts contre nous, sur notre territoire".
Pour le commandant de cette brigade d'assaut ukrainienne, les frappes sur sol russe ne sont pas nécessaires, mais "vitales".
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Plus possible de contenir leur colère
Face au "no go" des soutiens de Kiev, les soldats ukrainiens ont contenu leur colère, car leur survie dépend des armes occidentales et par peur d'offenser l'Europe et les Etats-Unis. Aujourd'hui, devant les quantités "hallucinantes" de drones qui leur arrivent dessus, il n'est plus possible pour eux de se taire.
"Je suis désolé d'être aussi direct, mais bordel, on ne peut pas les cibler, parce que nos partenaires nous disent qu'on ne peut pas tirer avec ces armes sur le territoire de la Fédération de Russie. Et nous, on se fait tuer", s'emporte le commandant.
A trop avoir peur de la réaction de Poutine, on laisse le champ libre à la Russie
"Je peux vous assurer que nos pertes humaines seraient bien moindres si nous recevions l'aide à temps et si nous pouvions l'utiliser comme il se doit", s'agace le militaire, qui accuse aussi l'Europe et les Etats-Unis d'avoir peur de la réaction de Vladimir Poutine.
D'après lui, les alliés de Kiev - qui craignent une escalade du conflit - placent leur peur au mauvais endroit: "A trop avoir peur d'une réaction de Poutine, on laisse le champ libre à la Russie. On les aide à créer ce nouvel ordre mondial dont ils rêvent. On les laisse s'imposer et, à terme, nous dominer".
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Sujet radio: Maurine Mercier
Adaptation web: jfe