"Je suis étonné et inquiet" de la position de la Suisse sur l'UNRWA, déclare Philippe Lazzarini
"En tant que citoyen suisse, je suis étonné. Mais aussi inquiet des messages politiques que la Suisse est en train de transmettre au reste du monde", a souligné Philippe Lazzarini sur le plateau de la RTS.
Selon lui, un abandon de l'UNRWA serait perçu comme une abdication de la solution à deux Etats. "Je ne pense pas que la Suisse puisse se positionner de cette manière-là."
Nos systèmes sont beaucoup plus robustes que n'importe quelle autre agence sur les questions de neutralité
La Suisse, comme d'autres pays, a suspendu son financement à l'UNRWA en janvier, après qu'Israël a accusé des employés de l'agence d'être impliqués dans l'attaque du 7 octobre.
"C'étaient des accusations extrêmement graves. C'était horrible et je pense qu'il aurait été difficile pour l'agence de ne pas licencier ces employés", explique Philippe Lazzarini.
>> Lire à nouveau : Israël accuse des employés de l'Unrwa d'être impliqués dans l'attaque du 7 octobre
Le Neuchâtelois regrette que la Suisse n'a pas repris son financement. "La plupart des pays sont revenus (...) En fait, il ne reste plus qu'un trio: nous avons les Etats-Unis qui vont bloquer jusqu'au mois de mars de l'année prochaine, le Royaume-Uni qui réserve sa décision dans les semaines à venir et nous attendons maintenant la décision de la Suisse."
>> Pour en savoir plus, lire : Le Canada et la Suède reprennent leur financement à l'UNRWA
La neutralité de l'UNRWA soulignée
Une enquête a été menée et les conclusions données dans le "rapport Colonna" mettent en avant les qualités de neutralité de l'UNRWA.
>> Sur le sujet, lire aussi : Un audit juge l'UNRWA "indispensable" et salue les mesures pour assurer sa neutralité et Un comité indépendant sera chargé d'évaluer le travail de l'UNRWA
"Elle a très clairement dit que nos systèmes sont beaucoup plus robustes que n'importe quelle autre agence sur les questions de neutralité, mais comme (...) on a beaucoup plus d'employés (30'000), il faut essayer de faire plus", a rapporté le directeur de l'agence.
Et d'ajouter: "La porosité s'applique pour toutes les agences (...) C'est une réalité. Vous avez un mouvement autocratique qui, pendant 15 ans, s'est occupé de la bande de Gaza. Le simple fait d'y entrer nécessite d'avoir une autorisation du Hamas."
Malgré tout, Philippe Lazzarini assure que "les autorités ne sont jamais intervenues dans notre enseignement ou dans notre centre de santé primaire".
Il rappelle encore que "cela va prendre des années, voire des décennies pour rendre Gaza à nouveau vivable" car c'est aujourd'hui un "champs de ruines".
>> Le suivi de la situation au Proche-Orient : Une trêve de 40 jours aurait été proposée au Hamas, selon la diplomatie britannique
Propos recueillis: Philippe Revaz
Adaptation web: juma
Appel citoyen pour l'UNRWA
Plusieurs dizaines de personnalités suisses, dont les anciennes conseillères fédérales Micheline Calmy-Rey et Ruth Dreifuss, appellent la Confédération à continuer à soutenir l'UNRWA. "Il n'y a aucune évidence attestant" que l'agence de l'ONU "ait joué un rôle néfaste dans ce conflit", écrivent-elles.
"Selon de nombreux avis, dont celui du CICR, seule l'UNRWA", l'Agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens, "est actuellement capable, par son expérience du terrain et ses structures existantes, d'apporter une aide humanitaire substantielle à la population palestinienne, qui en a cruellement besoin", notent les signataires de cet appel publié dans plusieurs journaux romands et alémaniques lundi et mardi.
Se présentant comme des "citoyennes et citoyens suisses", ces personnalités appellent "nos élues et élus ainsi que nos autorités à tenir nos engagements de financement de l'UNRWA et ainsi respecter les valeurs humanitaires de notre pays".
Parmi les signataires figurent aussi le conseiller aux Etats Carlo Sommaruga (PS/GE), le conseiller administratif genevois Sami Kanaan, l'ex-directeur du CICR Yves Daccord, l'ancienne procureure de la Confédération Carla Del Ponte, les ex-secrétaires d'Etat Jacques de Watteville et Jean-Daniel Gerber, les anciens conseillers nationaux Jean Ziegler (PS/GE) et Patrice Mugny (Verts/GE) ou l'écrivain Daniel de Roulet.
Lundi, Amnesty International a aussi déposé à Berne deux pétitions munies de plus de 45'000 signatures demandant au Conseil fédéral et au Parlement d'assurer le financement de l'UNRWA. (ats)