Restée confidentielle jusqu'ici en Suisse, avec 500 repas par jour, l'application est aujourd'hui en plein développement. Elle compte 100'000 téléchargements et vient de convaincre des acteurs de taille: Manor a lancé au début du mois un projet-pilote dans son magasin de Bâle alors que les deux leaders - Coop et Migros - viennent de démarrer des tests en Suisse alémanique.
"Une réelle demande des clients"
"On ne fait pas ça pour gagner de l'argent, parce que ça ne représentera jamais un gros volume", explique le directeur alimentaire de Manor Pascal Kraak dans La Matinale. "Mais ça répond à une réelle demande de nos clients qui, aujourd'hui, n'acceptent plus que les distributeurs jettent de la marchandise qui peut encore être vendue."
Il peut s'agir de fruits qui ne sont pas beaux ou qui ont un petit choc, ou d'un pain un peu dur parce qu'il arrive en fin de cycle à la fin de la journée. "C'est très clairement dans cet esprit-là qu'on a décidé de coopérer avec Too Good To Go, parce qu'il nous paraît important de répondre à ces attentes", poursuit Pascal Kraak.
Et si le test mené par Manor à Bâle est concluant, le dispositif sera étendu à toute la Suisse en début d'année prochaine.
Le commerçant vend donc ce qu'il aurait jeté, alors que le consommateur achète des produits trois fois moins cher que leur prix d'origine. L'entreprise Too Good To Go prend une commission de 2 francs 90 sur chaque transaction.
Coup de pouce aux petites enseignes
En Suisse romande, un projet-pilote est lancé lundi par la chaîne vaudoise Fleur de pains dans son magasin d'Epalinges. Et de ce côté-ci de la Sarine aussi, les entreprises sont de plus en plus nombreuses à collaborer. C'est le cas de la pâtisserie lausannoise El Gato.
"Nous faisons tous nos produits de A à Z, même les pains pour les sandwichs. Cela nous permet d'amortir au final une bonne partie des dépenses", explique son gérant Jonathan Baldeon. "Cela aide à développer beaucoup de petites enseignes comme nous." De fait, un certain nombre de personnes ont découvert la pâtisserie lausannoise grâce à l'application.
Mais pour lutter contre le gaspillage, une certaine souplesse est nécessaire, puisque l'utilisateur ne sait pas à l'avance avec quoi il va repartir. Son panier dépend des invendus de la journée, qui sont par définition impossibles à prévoir. Pas de quoi décourager les bonnes intentions, visiblement: quelque 500 personnes téléchargent l'application chaque jour.
Cléa Favre/oang/ptur
Un tiers de la nourriture produite en Suisse est perdue
Selon l'association Foodwaste.ch, environ un tiers de la nourriture produite en Suisse est perdue ou gaspillée. Cela correspond à 300 kg par personne et par an, soit 2,3 millions de tonnes de nourriture par an.
Près de la moitié des déchets sont générés par les ménages et les restaurants: en moyenne, 320 grammes de nourriture parfaitement comestible finissent à la poubelle par personne et par jour, presque l'équivalent d'un repas. Un ménage de quatre personnes jette environ 2000 francs de denrées chaque année.
Le gaspillage alimentaire a des causes multiples, qui se situent tant au niveau de la production que de la vente et des foyers: les normes de calibrage et d'aspect des fruits et légumes, les dates limites de consommation, des portions trop importantes ou encore l'exclusion de produits comestibles comme les épluchures. Les légumes frais sont les produits les plus gaspillés.
Dans le monde, ce ne sont pas moins de 1,3 milliard de tonnes de nourriture qui sont jetées par les consommateurs, les distributeurs, les fabricants et les agriculteurs.