"La gouvernance de Renault est solide mais provisoire" et elle garantit le bon fonctionnement du groupe, a assuré mercredi le ministre français de l'Economie Bruno Le Maire devant la presse. Il s'est exprimé quelques heures après que Renault ait décidé de maintenir Carlos Ghosn à sa tête, tout en nommant son dauphin, Thierry Bolloré, à l'intérim.
Mais plusieurs analystes se demandent à qui pourrait profiter la chute brutale de Carlos Ghosn, et les yeux se tournent vers le constructeur japonais Nissan.
En effet, si Renault a sauvé Nissan il y a 20 ans, les rapports de force au sein de l'alliance se sont aujourd'hui inversés: les activités de Nissan sont plus florissantes et plus rentables. Cependant, ce changement n'a pas été répercuté sur le mariage des deux constructeurs.
La crainte d'une fusion
"Cela a tenu jusqu'ici parce que Carlos Ghosn et la direction de Renault ont fait très attention à ne pas transformer cette acquisition - parce que Renault est propriétaire de plus de 40% de Nissan - en fusion, de laisser chacune des deux entités relativement autonomes", analyse Frédéric Féry, professeur de stratégie à l'ESCP Europe à Paris.
Il y avait, notamment sous la pression des investisseurs, l'idée de tirer un maximum de synergies entre Renault et Nissan, de partager des technologies, des savoir-faire.
"Or, cela avait changé depuis 2-3 ans, et il y avait, notamment sous la pression des investisseurs, l'idée de tirer un maximum de synergies entre les deux groupes, de partager des technologies, des savoir-faire, beaucoup plus qu'avant. Cela voulait dire une intégration. Et ça, du point de vue de Nissan, c'est beaucoup plus difficile à accepter", poursuit-il.
Carlos Ghosn planchait même sur la fusion des deux groupes, mais Nissan s'y opposait, avance le Financial Times. Le quotidien américain cite parmi ses sources un proche du Conseil d'administration de Nissan.
Nissan dans le viseur de la justice
Le constructeur japonais a tout intérêt à un statut quo. Mais de là à penser que Nissan a orchestré la chute de Carlos Ghosn, il y a un pas que l'on ne peut pas franchir en l'état des informations dont on dispose.
D'ailleurs, Nissan risque bien d'en pâtir également, car, d'après la presse japonaise, la justice s'intéresserait à sa part de responsabilité dans cette affaire.
Les médias japonais ont également annoncé mardi que la garde à vue de Carlos Ghosn était prolongée de 10 jours, pour avoir le temps de poursuivre les investigations.
>> Lire : La garde à vue de Carlos Ghosn a été prolongée de 10 jours
Cléa Favre/jvia