«Nous ne sommes pas en récession, mais nous y arrivons», a
résumé la conseillère fédérale mardi devant la presse à Berne. Le
groupe d'experts de la Confédération et le Secrétariat d'Etat à
l'économie (SECO) présentaient les prévisions conjoncturelles pour 2009 et 2010, ainsi que les
prévisions trimestrielles.
Détérioration dramatique
L'activité économique devrait reculer de 0,8% en 2009 avant de
se redresser modestement de 1% en 2010, prévoient les
experts.
Concrètement, si les domaines de la construction et de la
consommation tiennent encore bon, exportations et emplois ont de
quoi nourrir les préoccupations. Les exportations devraient chuter
de 2,6% d'ici fin 2009.
C'est le niveau le plus bas depuis une dizaine d'années. «C'est un
des grands problèmes», a averti la conseillère fédérale. «Depuis
octobre, la situation économique s'est dramatiquement
détériorée.»
Stabilisation en trois actes
Face à cette situation, la Confédération, par la voix de sa
ministre de l'Economie, met en place des mesures de stabilisation.
L'Etat ne ficèle pas de paquet unique, mais procède en phase avec
l'évolution économique. «Toutes les mesures de la Confédération
représentent ensemble 3 milliards de francs», a expliqué Doris
Leuthard.
L'action se déroule en trois actes, dont le premier a eu lieu en
octobre lorsqu'un premier paquet de stabilisation des marchés
financiers a été lancé (plan de sauvetage de l'UBS). La
Confédération mettra à disposition dès le 1er janvier 900 millions
de francs de réserve pour la création d'emplois.
La construction et la consommation ne connaissent pas encore de
crise, mais la Confédération veut agir contre le lent
ralentissement.
Le deuxième acte des mesures de stabilisation se déroulera sur le
marché intérieur. D'ici fin février, un groupe de travail
interdépartemental présentera des propositions concrètes au Conseil
fédéral, a annoncé Doris Leuthard.
Au premier plan figureront des projets d'infrastructure dans la
construction ou dans le domaine de la sous-traitance. Quelque 650
millions de francs seront mis à disposition, a indiqué la ministre
de l'Economie.
Chômage
La mauvaise conjoncture
s'accompagnera d'une aggravation du marché de l'emploi. Le taux de
chômage devrait passer à 3,3% en 2009 et 4,3% en 2010, avertit le
SECO. D'ici fin 2010, le nombre de chômeurs devrait toutefois se
stabiliser.
Le troisième acte se tiendra dans le secteur de l'emploi. «La
montée du chômage met de nombreuses personnes dans une situation
difficile», a déploré Doris Leuthard. Elle appelle les entreprises
à recourir à la réduction du temps de travail.
Pour faire face à des «phases difficiles», la conseillère fédérale
a évoqué des possibilités comme l'allongement du chômage partiel ou
des indemnisations de chômage, mais également des mesures spéciales
pour les travailleurs âgés.
Les mesures fiscales de la Confédération - imposition des familles
et compensation de la progression à froid - seront quant à elles
efficientes au plus tôt en 2010. Elles devraient représenter des
allégements de respectivement 600 millions et entre 600 et 700
millions de francs.
ap/ats/ant
Croissance de l'industrie en berne
La croissance de l'industrie suisse a nettement ralenti au 3e trimestre 2008. La production ne s'est accrue que de 0,7% par rapport à la même période de 2007.
Les chiffres d'affaires ont progressé de 4,6%, ce qui représente le plus mauvais résultat enregistré depuis trois ans, a communiqué mardi l'Office fédéral de la statistique (OFS).
Une aide au compte-gouttes?
La controverse subsiste sur la meilleure solution pour lutter contre la crise conjoncturelle.
Le Parti socialiste et les syndicats jugent les mesures de la ministre de l'économie Doris Leuthard insuffisantes et réclament un véritable programme de relance conjoncturelle.
Il faut des mesures de soutien du pouvoir d'achat à hauteur d'un milliard de francs et un bonus à l'investissement doté de quelque cinq milliards de francs, selon Daniel Lampart, chef économiste à l'Union syndicale suisse (USS).
Le PS considère également que le dispositif de Doris Leuthard n'est pas à la hauteur. "Il s'agit de lancer un programme conjoncturel digne de ce nom. Un simple replâtrage ne suffira pas". La tactique visant à s'adapter petit à petit à la conjoncture est erronée, car les mesures de soutien déploieront leurs effets trop tard, selon le PS, qui proposera jeudi un plan d'action en dix points.
L'UDC ne croit pas de son côté aux paquets conjoncturels, selon son porte-parole Alain Hauert. On devrait plutôt songer à une baisse de la TVA d'un point. L'excédent de la Confédération cette année devrait revenir à la population suisse à hauteur de 500 francs par personne.
Côté radical, on fêtait mardi le succès devant le Conseil national de la compensation de la progression à froid en 2009. Cette mesure simple et rapide soutiendra le pouvoir d'achat. C'est surtout la classe moyenne qui en profitera.