Arabica, Robusta, ou même un savoureux mélange des deux: quel que soit le goût, les grains de café se répandent en surabondance sur les marchés, malgré une consommation en progression permanente dans le monde.
La surproduction des précieux grains se répète depuis deux ans au Brésil, premier producteur avec environ un tiers de la production mondiale. Et elle se répercute sur les prix. Jamais, depuis 15 ans, le kilo de grains de café n'a été aussi bas.
Aux bonnes récoltes s'ajoutent les fonds d'investissements spéculatifs, qui jouent le café à la baisse. Résultat: le cours du sac de 60 kilos, l'unité de base, a chuté de 20% durant les dix derniers mois. Et cette baisse ne devrait pas en rester là, puisque les fonds d'investissements poursuivent leur action.
Menace sur les petits producteurs
Cinq pays (Brésil, Vietnam, Indonésie, Colombie et Ethiopie) alimentent à eux seuls quelque 70% du marché mondial.
Dans ces pays, les grandes exploitations pourront absorber le choc. Mais les petits planteurs de café dans le monde comptent parmi les premières victimes de la spéculation et sont sérieusement menacés.
"Actuellement, 25 millions de familles produisent 80% du café global. Avec les prix qui ne couvrent pas les coûts de production, ils ne peuvent plus investir dans leur plantation. Cela signifie que la récolte va diminuer. Et si les prix restent aussi bas, beaucoup de ces petits producteurs vont abandonner leur plantation", déplore dans le 19h30 de la RTS Simon Aebi, responsable du café chez Max Havelaar.
En Colombie notamment, les prix de vente sont d'ores et déjà inférieurs aux coûts de production. Selon la Fédération nationale des producteurs de café colombien, le marché du grain génère chaque année environ 200 milliards de dollars de chiffre d'affaires, mais les producteurs n'en perçoivent que 10%. A tel point que le pays songe à vendre son café sans plus dépendre de la Bourse de New York.
Vers une "crise humanitaire"
Réunis en forum mondial au Kenya la semaine dernière, les producteurs de café ont tiré la sonnette d'alarme face à l'appauvrissement des petits producteurs: "La crise actuelle de durabilité des prix que traversent les producteurs de café doit être résolue immédiatement avant que cela ne se transforme en une crise humanitaire", a écrit le Conseil international du café.
Actuellement, 25 millions de familles produisent 80% du café global. Si les prix restent aussi bas, beaucoup de petits producteurs vont abandonner leur plantation.
Outre les producteurs, les exportateurs s'inquiètent également de la dégringolade des prix. Ecom, basé à Pully dans le canton de Vaud, est le deuxième négociant en café au monde. Le directeur du secteur café craint une altération de la qualité: "Un prix bas du café aura pour conséquence que le producteur ne va pas mettre toute l'attention nécessaire pour produire un café de qualité et y mettre toute l'attention au moment de la récolte. Il va donc plutôt privilégier un café de qualité moyenne. Il va surtout essayer d'avoir un volume et des coûts minimum."
Pas de baisse pour le consommateur
Pour le consommateur, en revanche, aucun changement n'est amorcé. Du grain à la tasse, la baisse du cours ne se répercute pas du tout sur la commande au comptoir.
Selon Ennio Cantergiani, fondateur de l'Académie du café, ce n'est pas le prix du café qui est le plus cher dans la fabrication d'un expresso: "Dans une tasse, le coût du café moulu ne représente que 10 centimes du coût total. Le reste est dévolu aux charges salariales, les coûts d'exploitations et la marge du cafetier", explique-t-il.
Le prix du petit noir en Suisse est fixé librement par chaque commerçant et oscille entre 3 francs et 4,50 francs. Les Suisses en consomment quelque 150 millions de litres par an, soit en moyenne trois tasses par jour. Les plus gros consommateurs en Suisse romande sont les Valaisans, puis les Jurassiens, les Vaudois et enfin les Neuchâtelois. A l'échelle nationale, ce sont les Saint-Gallois qui en boivent le plus.
Sujet TV: Estelle Braconnier
Réalisation web: Feriel Mestiri