S'exprimant rarement dans les médias, Jürg Brand a cependant reçu la RTS sur le site des Rondez à Delémont. Près de 30% des 200 personnes qu’il emploie dans le Jura sont des frontaliers et leur salaire est versé en euros. "Ils n'ont pas le choix, mais ils supportent cette mesure parce qu'ils voient aussi les gains qu'ils ont avec la différence des taux de change", explique le patron de la société.
Recours accepté par le TF en janvier
Malgré l'opposition du tribunal arbitral saisi par le syndicat Unia à propos de ces salaires en euros, l'entreprise avait refusé de revenir en arrière. Mais le Tribunal fédéral a accepté le recours de Von Roll en janvier dernier, en admettant les circonstances exceptionnelles dans lesquelles était plongée l'entreprise à cause de la crise de l'euro, du franc fort et de ses difficultés financières.
>> Lire : Les recours des entreprises qui paient en euros sont admis par le TF
"Et ces conditions particulières continuent", souligne Jürg Brand. "On a toujours une différence de pouvoir d'achat, de taux de change (...) et si Von Roll fait des profits aujourd'hui, ce n'est que parce que l'économie va bien actuellement. Je ne suis pas sûr qu'on sera au même niveau dans deux ans."
Le verdict du Tribunal fédéral ne le satisfait du reste que partiellement. "J'aurais préféré que la décision ait été rendue sur le fond, dans le contexte de la question juridique essentielle", dit-il. "Et là, le Tribunal fédéral n'a pas pris une position claire."
Appel à jouer la carte patriotique
Le patron de Von Roll n'hésite pas, par ailleurs, à critiquer les communes jurassiennes qui n’achètent pas assez chez lui, alors que la loi sur les marchés publics leur laisse pourtant cette possibilité.
Chiffres à l'appui, le patron de l'entreprise montre que la très grande majorité d’entre elles se fournissent en tuyaux chez Von Roll, mais qu'une partie préfère l’Autriche et l’Allemagne pour les vannes et les hydrantes. Et il s’élève contre ce manque de soutien à la production locale. "Je ne vois aucune raison pour ne pas jouer un petit peu plus la carte patriotique."
"Choindez ne sera jamais fermé"
Un autre dossier important pour l’entreprise est l’avenir du site de Choindez, après la fermeture de la fonderie l’an dernier. On y fait désormais du revêtement pour des tuyaux fabriqués en Allemagne et une quarantaine de personnes y travaillent encore.
Et le site a encore un avenir, assure Jürg Brand, notamment grâce à une nouvelle technologie développée et qui combine du ciment interne et du polyuréthane externe pour les revêtements. "Ces changements dans la production ont ouvert une nouvelle perspective pour un nouveau type de tuyaux qu'on va lancer sur les marchés suisse et européen avec un rapport qualité-prix intéressant", explique le propriétaire de l'entreprise.
Pistes pour le développement futur
"Choindez ne sera jamais fermé, mais sera transformé", promet-t-il. "On a des idées, on est en train de développer des alternatives mais cela va durer un certain temps."
Plusieurs pistes sont évoquées, dans les domaines de la mobilité électrique ou du recyclage. Mais Jürg Brand n’en dit pas plus, si ce n'est que l’entreprise réalise aujourd’hui 60 millions de francs de chiffre d’affaires dans le Jura et qu’il reste prudent sur son évolution.
Gaël Klein/oang