"Aujourd'hui, nous avons au total 47 millions de comptes bancaires qui ont fait l'objet d'un échange automatique pour des actifs qui s'élèvent à près de 5600 milliards de francs suisses", a expliqué, lors d'une conférence téléphonique Pascal Saint-Amans, directeur du Centre de politique et d'administration fiscales de l'Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE).
Entre septembre et décembre 2018, lors de l'entrée en vigueur de l'échange automatique, "70 pays ont reçu de l'information, dont 57 nous ont dit combien ils en avaient reçu", a précisé le responsable de l'OCDE, dont le secrétaire général Angel Gurria présentera ce rapport ce week-end lors du G20 Finances de Fukuoka au Japon.
Entre 200 et 300 milliards de perte pour la Suisse
L'échange automatique de renseignements a toutefois eu un impact conséquent avant même son entrée en vigueur, de nombreux contribuables ayant régularisé leur situation avec le fisc, y compris en Suisse.
Pendant cette période, "l'impôt qui a été collecté sur des actifs qui se trouvaient offshore et qui ont fait l'objet d'une déclaration volontaire dans la perspective de la mise en place de l'échange automatique de renseignements s'élève à 106 milliards de francs", ajoute l'OCDE.
L'échange d'information a aussi eu un impact sur la Suisse. "La place financière est affectée depuis 10 ans. Il est certain que les étrangers qui voulaient déposer de l'argent en Suisse pour profiter du système fiscal bancaire ont quitté notre pays", témoigne l'avocat spécialiste du droit bancaire, Carlo Lombardi. Selon la NZZ, les pertes sont estimées entre 200 et 300 milliards de francs.
Des milliers de lettres envoyées
Même si la plupart de ces comptes étaient déjà déclarés, la multiplication des échanges d'informations bancaires permettra aux Etats de récupérer de nouveaux impôts.
"Les pays ont déjà envoyé des dizaines de milliers de lettres à des contribuables qui ne l'avaient pas encore fait, ce qui va augmenter leurs recettes fiscales", a déclaré Pascal Saint-Amans. Au total, ce sont 90 Etats, dont la Suisse, qui ont déjà échangé de l'information.
L'OCDE a par ailleurs réalisé une étude économique afin d'évaluer l'impact de l'échange automatique d'information sur les dépôts bancaires dans les paradis fiscaux dans une quarantaine de pays.
"Sur une période qui va de 2000 à 2018, nous sommes sur un impact de baisse des dépôts bancaires offshore de l'ordre de 20% à 25% lors du passage à l'échange automatique de renseignements", a assuré Pascal Saint-Amans.
Conséquence selon l'avocat Carlo Lombardi: "Beaucoup de gens qui étaient en situation fiscale irrégulière ont transféré leurs actifs financiers sur des actifs de nature non-financière. Il ne faut pas se leurer. L'augmentation colossale du prix des bijoux, des oeuvres d'art et autres bibelots, que les riches aiment, est dû au fait que les gens ont évacué leur argent non déclaré sur d'autres types de produits qui ne pouvaient pas être immobilier."
afp/jfe