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Tournée vers les USA, la Suisse moins dépendante du marché européen

Les entreprises suisses sont de moins en moins dépendantes de leurs clients européens selon une enquête RTS.
Les entreprises suisses sont de moins en moins dépendantes de leurs clients européens selon une enquête RTS. / 19h30 / 2 min. / le 3 juillet 2019
Face aux relations politiques tendues, la Confédération cherche-t-elle à diminuer sa dépendance économique à l'Union européenne (UE)? La part des exportations suisses vers l'UE a considérablement diminué ces dernières années, selon une analyse de la RTS.

L'Allemagne n'est plus le meilleur client de la Suisse. Pour la première fois, les ventes à destination des Etats-Unis ont surpassé celles vers l'Allemagne durant deux trimestres d'affilée. Et l'écart se creuse.

Au premier trimestre 2019, les exportations de marchandises et de services à destination des Etats-Unis ont atteint 15,7 milliards de francs, soit un milliard de plus que celles en Allemagne, d'après une analyse de la RTS basée sur les chiffres des douanes et de la Banque nationale suisse.

Le poids du marché européen en baisse

Ce changement symbolise l'évolution de l'économie suisse d'exportation: le poids des Etats-Unis et de la Chine augmente, alors que celui de l'Union européenne diminue, bien qu'elle reste largement le premier partenaire commercial du pays.

Si on s'en tient aux seules marchandises, les pays membres de l'UE achetaient il y a 20 ou 30 ans près de deux tiers des produits suisses vendus à l'étranger. En 2018, ce chiffre est tombé à environ 50%. Durant la même période, la part des ventes vers les USA a quant à elle doublé, passant de 8 à 16% du total. Celle de la Chine de 3 à 8%.

L'évolution s'est amplifiée à partir de 2008, comme le montre le graphique ci-dessous.

Le Secrétariat d'Etat à l'économie (SECO) explique cette évolution par la succession de crises qui a frappé la zone euro entre 2010 et 2015, citant la crise de l'euro, la récession et la crise de la dette grecque: "Ces événements ont lourdement affecté la demande pour les produits suisses en provenance de la zone euro. Parallèlement, les exportations suisses ont progressé vers les pays en dehors de la zone euro qui ont bénéficié d’une croissance économique plus forte et envers la monnaie desquels le franc suisse s’est relativement moins apprécié."

Boom de la pharma aux USA

Les ventes de produits suisses ont particulièrement progressé sur le marché américain. Elles sont poussées par un domaine, la pharma.

Les exportations de produits pharmaceutiques et chimiques aux Etats-Unis ont été multipliées par six depuis 2000 (voir encadré). Elles représentent près de 60% des ventes de marchandises dans le pays.

"Ce sont des compagnies qui sont là depuis 100 ans, qui comprennent le marché américain et qui ont aussi beaucoup investi en recherche et développement aux Etats-Unis", explique au 19h30 de la RTS Martin Naville, directeur de la Chambre de commerce Suisse-Etats-Unis.

Moins dépendre de l'UE?

La Confédération encourage-t-elle les exportations en dehors du marché européen pour diminuer sa dépendance à l'UE, alors que les négociations sur l'accord-cadre s'enlisent depuis 10 ans? La Suisse a récemment conclu de nombreux accords de libre-échange, dont celui avec la Chine, en vigueur depuis 2014. Sept négociations sont en cours avec des marchés émergents, notamment l'Inde et le MERCOSUR (Argentine, Brésil, Paraguay, Uruguay).

Pour le SECO, il s'agit de "garantir des conditions-cadres favorables" aux entreprises exportatrices et favoriser une "diversification géographique". "L'UE demeure le principal débouché pour les produits suisses et revêt de ce fait une importance capitale pour l'économie suisse dans son ensemble", ajoute Antje Baertschi, la porte-parole du SECO.

>> Ecouter aussi l'interview de Mathilde Lemoine, cheffe économiste chez Edmond de Rothschild sur les relations commerciales entre la Suisse et les Etats-Unis :

Mathilde Lemoine est cheffe économiste à la Banque Rotschild.
Les relations commerciales parfois délicates entre la Suisse et les Etats-Unis: interview de Mathilde Lemoine / Forum / 5 min. / le 3 juillet 2019

L'entreprise métallurgique Kugler Bimetal à Genève exporte encore 60 à 70% de ses pièces vers l'Europe. Selon son directeur, Jérôme Chanson, l'entreprise bénéficie indirectement des économies émergentes, "via les Allemands et les Américains, qui vendent leurs machines dans lesquelles il y a nos pièces, et qui les vendent au Brésil, en Argentine ou en Chine".

Les échanges entre la Suisse et les marchés émergents devraient se renforcer à l'avenir. Martin Naville estime toutefois que "l'économie suisse sera toujours basée sur les vieilles économies européennes et américaines". Pour le directeur de la Chambre du commerce Suisse-Etats-Unis, les pays émergents "sont de très gros marchés mais aussi des marchés compliqués, que ce soit politiquement, à cause de la corruption ou du protectionnisme massif que l'on voit dans certains pays, surtout vers la Chine".

Valentin Tombez et Pascal Jeannerat

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Les chiffres vertigineux de la pharma aux Etats-Unis

Entre 2000 et 2018, les ventes de produits pharmaceutiques et chimiques aux Etats-Unis sont passées de 3,7 milliards à 22,7 milliards de francs, d'après les données de l'Administration fédérale des douanes (AFD).

Cela représente une augmentation de plus de 500%, alors que les exportations des autres types de marchandises ont progressé de 39% durant la même période. Et le poids des ventes de médicaments aux Etats-Unis devrait encore s'accroître à l'avenir.

"Le dynamisme de cette branche, ainsi que la forte croissance de l'économie américaine, laissent supposer que les Etats-Unis pourraient devenir un débouché encore plus important pour les exportations suisses dans les années à venir ", indique le Secrétariat d'Etat à l'Economie.