Les exportations horlogères en direction du Royaume-Uni ont bondi de 22% entre janvier et juillet. Rien que sur les deux premiers mois de l’année, les Britanniques auraient acheté pour 242 millions de francs de montres.
Deux raisons intimement liées expliquent ces chiffres. Le prix d'achat d'abord. Depuis le référendum de juin 2016, la livre sterling a perdu 20% de sa valeur face au dollar. Résultat: le consommateur européen, suisse ou américain paiera sa montre moins chère.
Deuxième raison: l'incertitude générée par le contexte politique actuel au Palais de Westminster pousse les horlogers à anticiper par prudence les questions logistiques et à constituer des stocks. Conséquence, les chiffres des exportations augmentent.
Méfiance
Mais il faut se méfier des statistiques d’exportations publiées chaque mois par la Fédération horlogère (FH) qui ne distinguent pas les stocks envoyés chez les distributeurs ou dans les filiales des ventes au détail. C’est la différence entre le sell-in (ce qui entre en stock) et le sell-out, les ventes effectives.
Dans l’attente du Brexit, il s’agit donc simplement pour les horlogers d’assurer les livraisons et de constituer des stocks sur place. Même si la Suisse, avec sa stratégie dite "Mind the Gap", a déjà assuré sa future relation avec un Royaume-Uni hors Union européenne.
Toutefois, l’euphorie n’a plus sa place. En effet, tous les horlogers ne peuvent pas faire de stock. C’est le cas de la marque genevoise Raymond Weil. Le Royaume-Uni est son deuxième marché mondial et la marque travaille à flux tendu. Pas de stock donc, et surtout un autre problème: elle approvisionne son marché irlandais depuis le Royaume-Uni. La question des frontières est donc cruciale. On parle ici du "backstop" en Irlande du Nord.
Pouvoir d'achat morose
Autre image trompeuse à corriger: la baisse de la livre sterling doperait la consommation de montres. Ce n'est pas vraiment le cas, car l’horlogerie est un secteur très sensible aux cycles conjoncturels. En somme, lorsque tout va bien, on s’achète un objet inutile, comme une montre. Mais quand on hésite, on n’achète pas.
Dans les faits, les horlogers ont plutôt subi cette morosité des Britanniques. La chute de la livre sterling, assure-t-on chez Raymond Weil, ne compense pas la baisse de volume.
Frédéric Mamaïs/jfe