Reste que ce projet est encore jugé très insuffisant par
certains des intéressés. La refonte doit encore être formellement
approuvée par les 184 gouverneurs du FMI mardi lors de leur
assemblée annuelle.
L'opération se fera en deux temps. D'abord la Chine, la Corée du
Sud, la Turquie et le Mexique verront leurs droits de vote (soit
leur quote-part) au sein de l'institution légèrement relevés. Ce
surcroît d'influence doit permettre de refléter leur essor
économique au cours des dernières décennies. La hausse restera
pourtant partielle et symbolique: à peine 1,8 % du total des
voix.
Des critiques
La deuxième phase du projet de réforme doit être bouclée d'ici à
l'automne 2008. Elle a soulevé maintes critiques, mais «tous les
membres (du comité de direction du FMI) ont apporté un large
soutien», a dit le directeur général du FMI, Rodrigo Rato, Il
invite à revoir la formule de calcul des droits de vote avant une
deuxième vague de redistribution.
Les anciens membres du FMI tiennent à leur rang alors que les pays
émergents réclament plus de voix au chapitre. Un seul point a fait
l'unanimité: la nouvelle formule devra être plus simple, beaucoup
plus transparente, et surtout refléter véritablement les poids
économiques de tous les pays membres.
Les avis divergent toutefois sur les critères à retenir pour le
calcul. Les Etats-Unis veulent mettre l'accent sur le produit
intérieur brut (PIB), les Européens sur l'ouverture des marchés, le
Japon ne veut pas donner plus de poids aux pays ayant engrangé des
réserves importantes de change, comme la Chine voisine.
Sud-Américains opposés
«Le FMI a besoin d'une nouvelle formule simplifiée pour les
quotes-parts dans laquelle le PIB sera la variable dominante», a
demandé le secrétaire au Trésor américain, Henry Paulson. Du côté
des pays intéressés en premier lieu par la redistribution, l'Inde,
l'Argentine, le Brésil et l'Egypte sont montés au créneau ce
week-end. Ils craignent que des voix supplémentaires soient
octroyées à certains pays en développement, les prélevant sur
d'autres «tout aussi méritant qu'eux».
«Si l'on mesure l'ouverture des pays de l'Union européenne à
l'aune de leur commerce intra-européen, il est hautement probable
que la nouvelle formule révisée donnera lieu à une représentation
encore plus biaisée des économies émergentes au sein du FMI», a
averti un responsable argentin.
L'ensemble de l'Amérique du Sud est contre le projet, selon le
ministre brésilien de l'économie, Guido Mantega. En pourcentage de
voix, ces pays ne font cependant pas le poids. «L'approbation d'une
réforme avec autant de pays opposés causerait une crise de
représentativité du FMI», a-t-il averti.
Faire parler l'UE à l'unisson
Autre débat soulevé par les nouvelles puissances économiques:
celui d'une représentation unique pour l'Union européenne (UE) ou
du moins pour les Douze de l'Euroland. Additionnées, les voix des
vingt-cinq Etats de l'UE représentent près de 32%, contre 4,4% pour
43 pays africains par exemple. «L'Union européenne et les
Etats-Unis, lorsqu'il s'agit de renoncer à des droits (au sein du
FMI) se comportent comme des gamins sur un terrain de jeu: aucun
n'est prêt à lâcher ses jouets», a accusé l'ONG Actionaid.
Soutien de la Suisse
La Suisse a soutenu la première phase de la réforme du FMI à
Singapour. «La réforme est nécessaire. Des pays émergents étaient
sous représentés», a affirmé Hans-Rudolf Merz, le chef du
Département fédéral des finances (DFF) après la réunion du Comité
monétaire et financier international (CMFI). Si cette première
restructuration du FMI depuis sa création en 1965 est approuvée, la
Suisse perdrait 0,03 % de ses voix dans l'opération, au profit des
quatre pays émergents.
La conseillère fédérale Doris Leuthard participe elle pour la
première fois à une réunion annuelle du FMI et de la Banque
Mondiale. La cheffe du Département fédéral de l'économie (DFE) doit
intervenir mardi dans les débats sur la lutte contre la corruption
au sein du Comité de développement de la banque. A son agenda
figure également une rencontre avec le président de l'institution,
Paul Wolfowitz.
ats/tac
Pays européens perdants
La réforme engagée par le Fonds monétaire international (FMI) pour donner plus de poids en son sein aux pays en développement, se fera au détriment des pays européens, notamment les petits. Les grandes économies émergentes en profiteront.
Parmi les gagnants figurent en premier lieu la Chine, la Turquie, le Mexique et la Corée du Sud. En contrepartie, la part relative de pays puissants au FMI, tels le Royaume-Uni, la France et les Etats-Unis va baisser de manière marginale.
Cette refonte devrait accorder plus d'importance au produit intérieur brut. Les grandes économies émergentes (Inde, Brésil) devraient toutes sortir renforcées de ce processus.
Les perdants du grand toilettage sont les pays industrialisés, qui dominent le FMI depuis sa création en 1945. Ils vont voir globalement leur poids un peu réduit, les petits pays européens devant perdre le plus.
Actuellement, la Belgique, la Hollande ou la Suède pèsent autant ou plus que la Chine, l'Inde ou le Brésil.Pour les pays pauvres, en Afrique notamment, ce sera le statu quo.
La Confédération va défendre sa part
La seconde phase de la réforme s'annonce ardue. Il s'agira de définir des critères qui servent pour la répartition des quotes-parts d'ici la fin 2008, a rappelé M.Merz. Or, la proposition faite par le directeur du FMI Rodrigo Rato se base pour l'instant uniquement sur le PIB des pays membres, comme le défendent les Etats-Unis.
La Suisse et d'autres pays demandent que d'autres critères soient retenus, comme l'ouverture au marché. «Le volume de notre place financière est important. Nous avons quand même quelque 3500 milliards de dollars», a rappelé le conseiller fédéral.
Pour maintenir sa position, la Confédération s'est rapprochée de trois de ses partenaires traditionnels au sein du FMI: la Belgique, la Hollande et la Suède. Ces quatre nations atteignent le 15 % de voix qui leur permettent de constituer une minorité de blocage.