Thomas Gottstein, qui dirige actuellement la filiale helvétique de Credit Suisse, remplacera Tidjane Thiam dans ses fonctions de directeur général du groupe bancaire zurichois, a indiqué l'établissement vendredi dans un communiqué.
Lors de sa réunion jeudi, le conseil d'administration de la banque aux deux voiles a accepté "à l'unanimité" la démission de Tidjane Thiam, arrivé mi-2015.
Revenant sur l'affaire des filatures, notamment de l'ancien banquier star Iqbal Khan, Tidjane Thiam a répété n'avoir eu "aucune connaissance" de ces agissements qui ont "nuit à Credit Suisse". "Je regrette ce qui s'est passé, cela n'aurait jamais dû arriver", a ajouté le Franco-ivoirien.
"Son bilan est bon"
Le président Urs Rohner a indiqué que Tidjane Thiam avait "énormément contribué (au développement) de Credit Suisse". "C'est grâce à lui que la banque est de nouveau solide et a renoué avec les bénéfices", a-t-il ajouté.
"Il n'y a jamais eu de lutte de pouvoir entre moi et Tidjane Thiam", a assuré le président de Credit Suisse, Urs Rohner, dans un entretien à la radio alémanique SRF, contredisant ainsi des rumeurs.
Le président de l'organe de surveillance a admis avoir constaté "que nous ne sortirions pas comme ça de cette affaire, à moins de procéder à un changement. C'est que Tidjane Thiam a aussi reconnu".
Un avis que partage le directeur de la fondation Ethos Vincent Kaufmann dans La Matinale: "Son bilan, même s'il n'a pas pu aller au bout de ce qu'il voulait faire, est bon, parce qu'il a sauvé la banque en la recapitalisant. Il a récupéré la banque dans une situation très dramatique, ces actions étaient nécessaires".
Vincent Kaufmann se montre par ailleurs satisfait de la nomination de Thomas Gottstein: "Il y a là un nouveau directeur qui connaît très bien la banque. On espère que la culture de la banque suisse, qui restait forte, va gagner en importance au niveau de l'ensemble du groupe pour restaurer la réputation de la place financière helvétique".
Urs Rohner maintenu, mais fragilisé
Le conseil d'administration a exprimé "sa pleine confiance" en Urs Rohner, qui était également la cible de vives critiques. Il va poursuivre son mandat comme précédemment annoncé jusqu'en avril 2021, a souligné l'administrateur indépendant Severin Schwan.
Urs Rohner a dit "ne pas exclure" que certains actionnaires se tournent contre lui, "ce qui est le droit" de chacun d'entre eux. Le président a cependant assuré dialoguer avec tous les actionnaires. "Beaucoup m'ont confirmé qu'ils allaient soutenir les choix du conseil d'administration", a-t-il ajouté.
Un choix qui ne convient pas à la Fondation Ethos qui demandait le départ du président du conseil d'administration: "On en veut à Urs Rohner pour les erreurs stratégiques du passé. Avec ces décisions, on reste sur notre faim. Les dernières affaires de surveillance et d'infiltration ne nous ont pas rassuré par rapport à la gouvernance de la banque. Il faut des changements aussi au niveau du conseil d'administration", estime Vincent Kaufmann.
Interrogé dans La Matinale de la RTS, François Savary, responsable des investissements chez Prime Partners, a indiqué "qu'il y avait des dissensions telles à la tête de la maison, qu'il n'était pas possible que les deux personnes (Tidjane Thiam et Urs Rohner) se maintiennent".
jfe avec ats
Une affaire de filatures qui a éclaté en septembre 2019
Credit Suisse est sous pression depuis septembre dernier lorsqu'on a appris qu'elle avait fait suivre son ancien banquier star Iqbal Khan, passé chez le concurrent UBS, par des détectives privés. Après enquête interne, l'établissement a exonéré Tidjane Thiam de toute responsabilité, mais un second cas de surveillance a été dévoilé par la suite.
Le gendarme des marchés financiers Finma examine de son côté s'il y a eu des manquements au contrôle au sein de la direction de la banque. Selon le résultat de l'enquête, le régulateur pourrait exiger des changements à la tête du groupe.
Une enquête pénale a également été ouverte par le procureur zurichois dans le cadre de ce dossier.
La responsabilité de la filature d'Iqbal Khan a été attribuée au directeur opérationnel Pierre-Olivier Bouée ainsi qu'au chef de la sécurité de la banque Remo Boccali qui a depuis démissionné.
L'affaire des filatures s'est également soldée par le suicide de l'intermédiaire entre la banque et la société de détectives privés.