Au centre de tri postal de Zurich-Mülligen transitent chaque jour des dizaines de milliers de paquets provenant de sites de vente en ligne étrangers, surtout asiatiques.
Après trois mois de paralysie postale à cause du coronavirus, le trafic reprend de plus belle depuis une semaine: 120'000 envois par jour, contre 90'000 à 100'000 en temps normal. Un surplus qui s'explique par un décongestionnement de la logistique postale internationale.
Colis sous-évalués
Dans le centre zurichois, La Poste calcule tout d'abord le montant de la TVA sur la base de la déclaration figurant sur les colis. Dans un deuxième temps, les douaniers font la traque aux fausses déclarations.
Parfois, ils tombent sur des colis sous-évalués. "Voici un appareil de traduction simultanée. Sur le paquet, il est déclaré à 14 euros, alors que sa valeur réelle est de 100 francs", illustre Tanja Brunner, cheffe de la section courrier postal à l’administration fédérale des douanes, pour le 19h30 de la RTS.
Si cet envoi était passé en l'état, le client aurait économisé 10 francs de TVA.
Faciliter la vie aux clients
La RTS a contacté Anthony Horekens, commerçant européen basé à Hong Kong, qui connaît bien cette astuce utilisée, selon lui, par de grands sites chinois de vente en ligne.
"C’est une volonté de rendre l’achat facile pour le client moyen, à qui reviendrait la charge des taxes éventuelles. Comme ce n’est pas quelque chose qui avantage l'entreprise qui envoie, elle veut éviter cette complexité pour ses clients.”
Au final, les clients sont heureux... au prix de pertes de recettes pour la Confédération.
Manque à gagner pas chiffré
Dans un rapport, le Conseil fédéral reconnaît un problème fréquent et en augmentation. Il juge toutefois "minime" le manque à gagner pour la TVA. "Il n’est pas possible de chiffrer précisément les pertes effectives de recettes subies par la Confédération à cause des fausses déclarations."
Cette réponse est insatisfaisante pour la conseillère nationale Tiana Moser (Vert'libéraux/ZH), qui réclame davantage de transparence. "Il y a là une réalité et je crois que c’est possible de chiffrer, il faut faire l’effort de l'analyse. Mais c’est aussi une question de l’Etat de droit: les règles appliquées aux entreprises suisses doivent aussi être valables pour les entreprises de l’extérieur, sinon ce n'est pas correct."
Mieux cibler les contrôles
La lutte est donc inégale entre entreprises suisses et étrangères. Pour l’instant, les douanes entendent cibler encore mieux les contrôles. Même si ouvrir tous les paquets est illusoire, par manque de ressource et pour ne pas ralentir l'économie.
Dans cette économie mondialisée, la traque s’avère particulièrement difficile. La Confédération veut donner un tour de vis dans sa révision de la loi sur la TVA mise en consultation. Il s'agit de contraindre les plateformes de vente par correspondance - intermédiaires des vendeurs - à s’annoncer auprès du fisc suisse.
Les achats effectués sur des sites étrangers qui ne s’annonceraient pas pourraient être détruits à la douane.
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Julien Guillaume/kkub