La compagnie aérienne irlandaise à bas prix Ryanair vient de
faire sensation en annonçant son intention d'opérer des liaisons
transatlantiques d'ici 2009, avec des tarifs commençant à 10
euros.
Appliquer les mêmes recettes
La compagnie aérienne, qui utiliserait une autre marque que
celle de Ryanair, s'équiperait d'une cinquantaine de transporteurs
long-courriers, des Airbus A350 ou des Boeing 787, a confié son
directeur général, Michael O'Leary, au magazine Flight
International à paraître lundi.
Pour garder des coûts bas et pouvoir ainsi proposer des tarifs
cassés, les recettes resteraient à peu près les mêmes que sur les
vols moyen-courriers de Ryanair en Europe: desserte d'aéroports
secondaires sur la côte est des Etats-Unis, aux redevances moins
onéreuses que celles JFK ou Newark, et facturation de la
nourriture, des boissons et des divertissements à bord pour dégager
des revenus complémentaires.
Un projet rendu possible par l'accord "ciel ouvert", conclu le 22
mars entre les 27 pays de l'UE, qui libéralisera à partir du 30
mars 2008 le marché des liaisons aériennes entre l'Europe et les
Etats-Unis.
Deux jours auparavant, la filiale britannique de la compagnie
canadienne à bas coûts Zoom Airlines annonçait de son côté la mise
en service en juin d'une liaison Londres-New York pour un prix
d'appel de 129 livres (190 euros), opérée depuis l'aéroport de
Gatwick.
Un précédent peu fructueux
Ces tentatives rappellent l'aventure entreprise dans les années
70 par le britannique Freddy Laker, inventeur des vols à bas prix
entre New York et Londres avec son "Skytrain". La compagnie Laker
Airways s'effondrera en 1982, victime de la contre-offensive
tarifaire des compagnies classiques, British Airways en tête.
Hors d'Europe, le scénario "low cost long-courrier" fait aussi son
chemin. La compagnie malaisienne à bas prix AirAsia s'apprête à
lancer AirAsia X, qui proposera des vols long-courriers à prix
cassés entre Kuala Lumpur et plusieurs villes d'Europe, de Chine et
d'Asie, avec des billets pour Londres à partir de quelques
euros.
"Les tarifs moyens coûteront 50% de moins que les prix du marché
sur toutes les destinations", promet Raja Mohamad Azmi, patron de
Fly Asian Express (FAX), qui exploitera le nouveau
transporteur.
afp/cab
Ryanair et Easyjet dominent le marché
En 2006, Ryanair a battu son record de passagers transportés: 42 millions (+11 millions) et a dégagé un bénéfice net en hausse de 29% à 390 millions d'euros (642 millions de francs).
Easyjet, numéro deux du low-cost en Europe (33 millions de passagers) derrière Ryanair a vu son résultat net bondir de 59% à 94,1 millions de livres (222 millions de francs) en 2006.
L'Europe compte plus de 50 compagnies aériennes low cost, qui assurent environ un quart du trafic sur le continent.
Spécialistes sceptiques
Alléchantes pour le consommateur, ces initiatives de vols long-courriers à bas coût sont accueillies avec un certain scepticisme.
"En long-courrier, les compagnies à bas coûts ont nettement moins de marge de manoeuvre que sur le moyen-courrier et les compagnies traditionnelles pratiquent déjà des tarifs assez bas", souligne Chris Tarry, analyste londonien indépendant.
Dans les vols transatlantiques, Ryanair sera privé de l'une de ses recettes-clé pour comprimer ses coûts: une rotation intensive assortie de temps d'escale réduits qui maximisent la productivité.
En outre, la mise en place d'un réseau long-courrier exige des dépenses lourdes: achat de gros porteurs, coûts de maintenance et de personnel plus élevés...
Enfin, le carburant grimpe à 25% des frais d'exploitation sur de longues distances: une dépense incompressible et difficile à ne pas transférer sur le prix du billet.