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"C'est le plus grand drame économique et social que le monde ait connu"

Guy Ryder, directeur du Bureau international du travail (BIT). [Salvatore Di Nolfi]
Guy Ryder, directeur général de l'Organisation Internationale du Travail / L'invité-e de La Matinale / 10 min. / le 15 avril 2020
Les derniers chiffres de l'Organisation internationale du travail (OIT) donnent le vertige: la crise du Covid-19 pourrait faire disparaître près de 200 millions d'emplois à plein temps dans le monde, dont 12 millions en Europe. Son directeur, Guy Ryder, était l'invité de La Matinale.

"J'ai dit, en lançant ces chiffres, que c'était le plus grand drame économique et social que le monde ait connu depuis la Seconde Guerre mondiale. Je pense que je me suis trompé: c'est le plus grand drame depuis la Grande Dépression des années trente", concède le Britannique au micro de la RTS.

Mardi, le Fonds monétaire international (FMI) prévoyait une chute mondiale de la croissance de 3% pour 2020, de quoi rappeler le spectre de la crise économique de 2008 où il avait fallu près de dix ans à l'économie pour revenir à un taux de chômage d'avant-crise. Pour Guy Ryder, la situation en 2020 est toutefois totalement différente et la question est désormais de savoir si l'on pourra rebondir rapidement: "Les conséquences économiques et sociales sont le résultat des mesures que nous sommes en train de prendre pour combattre cette pandémie. Le jour où le confinement sera levé, cela peut provoquer un rebondissement assez fort", imagine le natif de Liverpool.

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Un autre drame se joue

Actuellement, l'OIT oeuvre activement à l'accompagnement et au soutien de ses Etats membres et cela dans trois domaines, précise Guy Ryder: protéger les employés qui continuent à travailler, rechercher des politiques pour conserver la relation de l'emploi dans les entreprises et appuyer les travailleurs par des mesures de protection sociale. "La santé doit rester la priorité. Mais il faut songer à retourner au travail. Il faut le faire avec intelligence et ne pas se précipiter", développe-t-il.

Car à l'heure où la Suisse et plusieurs pays européens envisagent les premières mesures d'un déconfinement, le drame se joue ailleurs pour le patron de l'Organisation internationale du travail: "Dans les pays émergents, nous avons l'impression que le pire n'est pas encore arrivé. Dans ces pays, la plupart des employés travaillent dans l'informalité absolue, dans des situations précaires, sans protection sociale, sans ressoures. Nous sommes face à un autre genre de drame mondial dont il faut être conscient".

"Donald Trump? Une très mauvaise nouvelle"

En tant que dirigeant onusien, Guy Ryder a particulièrement mal vécu la décision mardi soir du président américain Donald Trump de suspendre la contribution américaine à l'Organisation mondiale de la santé (OMS) en raison de sa "mauvaise gestion" de l'épidémie de Covid-19.

"C'est une très mauvaise nouvelle, surtout maintenant. Ce n'est pas le moment d'affaiblir l'organisation par excellence qui peut mener cette guerre", regrette le directeur de l'OIT, qui espère toutefois qu'il y aura un réveil et une prise de conscience de l'importance de la coopération internationale face à des problèmes mondiaux.

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Propos recueillis par David Berger

Adaptation web: Jérémie Favre

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