Le plan Phoenix, prévoyant la reprise des activités aériennes de
Swissair par Crossair, a «étranglé» le groupe, a déclaré Mario
Corti lors de sa troisième audience. Cette variante, concoctée
«derrière son dos» par des tiers - à savoir les banques suisses - a
conduit au grounding et à la demande de sursis concordataire. La
plus mauvaise solution a prévalu, selon lui.
Mario Corti reste persuadé que sa stratégie aurait permis de
sauver le groupe. Contrairement à l'accusation, il estime que
Swissair était en capacité de paiement le 17 septembre 2001.
Pas d'anticipation possible
L'ancien président-directeur général du groupe Swissair a nié
avoir retardé la mise en sursis concordataire de la défunte
compagnie. La procédure a été lancée le 4 octobre, alors que la
situation permettait de le faire plus tôt, estime
l'accusation.
Mario Corti considère que les reproches du Tribunal, «ne reposent
sur rien et sont infondées». Pour lui, sa stratégie était
«réaliste». L'ancien patron de Swissair répond mardi de gestion
déloyale et de gestion fautive, aux côtés de Jacqualyn Fouse,
l'ancienne cheffe des finances du groupe.
Jacqualyn Fouse à la barre
Jacqualyn Fouse a rejeté à son tour, mardi devant le Tribunal de
district de Bülach (ZH), les accusations de gestion déloyale et de
gestion fautive qui pèsent contre elle. L'ex cheffe des finances de
SAirGroup a cru à un sauvetage du groupe jusqu'à la veille du
grounding.
Jacqualyn Fouse, qui a oeuvré au sein de Swissair de juin à
octobre 2001, s'est expliquée des faits qui se sont déroulés peu
avant et peu après l'immobilisation au sol de la flotte de Swissair
le 2 octobre.
L'Américaine a nié avoir décidé trop tard du sursis concordataire.
La demande a été déposée le 4 octobre, alors que tout laissait voir
le 17 septembre déjà que la situation était dramatique, lui
reproche l'acte d'accusation. Ce jour-là, la Confédération a refusé
au groupe un crédit-relais de 1 milliard de francs.
ats/ruc/tac/hof
Touches d'humour
Lors de ses réponses au Tribunal de district de Bülach, Mario Corti a plusieurs fois suscité les rires du public venu l'écouter en nombre, notamment lorsqu'il a évoqué les banques helvétiques sans les nommer.
Il a en outre refusé de répondre aux questions du Ministère public, estimant que celui-ci avait eu le temps de les lui poser ces cinq dernières années.
Jean-Pierre Jobin dénonce
L'ancien patron de l'Aéroport international de Genève, Jean-Pierre Jobin, pense que le grounding de Swissair en octobre 2001 avait été prémédité. Clouer au sol la flotte de la compagnie helvétique devait permettre de justifier l'injection de fonds publics, selon lui.
«Je n'ai pas de preuves formelles, mais je pense que Mario Corti en est l'un des organisateurs», affirme Jean-Pierre Jobin dans une interview accordée à «L'Illustré», à paraître mercredi.
«Pour justifier l'engagement de la Confédération auprès du public, il faut à tout prix trouver un truc. Et ce truc, c'est le grounding», affirme l'ancien directeur de Cointrin. Jean-Pierre Jobin ajoute qu'il ne considère pas cette thèse comme une accusation.
«Au contraire, je dis chapeau à ceux qui ont imaginé ce scénario.» «Ils ont réussi leur coup», continue-t-il en estimant que c'était la seule façon de sauver Swissair. «Pour moi, ce ne fut pas un complot, mais un coup de poker. Malheureusement pour la vérité, personne ne viendra s'en vanter à la barre à Bülach.»