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La violence au travail pourrait bien s'accentuer avec la crise du Covid-19

N'importe qui peut un jour être victime un jour de harcèlement. [Fotolia - Picture-Factory]
La violence au travail pourrait s'accentuer avec la crise du Covid-19 / La Matinale / 1 min. / le 2 juin 2020
En raison de la conjoncture, de nombreuses entreprises licencient et des employés ont peur de perdre leur emploi. Ce contexte pourrait être un accélérateur de harcèlement au travail, avec un impact important sur les victimes.

Pratiques inacceptables, abus, jeux de pouvoir, comportements ou paroles dénigrantes qui visent une personne et qui l’isolent petit à petit: le harcèlement au travail a plusieurs visages. Les auteurs de violence peuvent être des manipulateurs, des carriéristes prêts à tout ou des gens qui ont peur de perdre leur travail.

Encore plus de risques aujourd'hui

N'importe qui peut être victime un jour de harcèlement. Et peut-être encore plus avec la crise économique actuelle, estime la directrice de la Clinique du travail Carole Wittmann.

"Même le plus fort des caractères, la personne la plus confiante en soi, peut avoir un moment difficile à passer: séparation, maladie, deuil; un conflit non réglé en interne dans une équipe, des jalousies quelconques, une différence de pensée", explique-t-elle mardi dans La Matinale. "Cela peut ouvrir une porte à ce genre de situation."

Perte de confiance et d'estime de soi

Et ce genre de situation porte atteinte à l'image de soi. "D'abord, c'est une perte de confiance et d'estime de soi qui est très importante", souligne Carole Wittmann. "Lorsque qu'on sort de l'emprise d'un harceleur et qu'on regarde dans le rétroviseur, on a de la peine à comprendre comment on a pu se laisser avoir. Il y a de la honte, de la pudeur, de la difficulté à en parler."

Certaines personnes mettent en place des mécanismes extrêmes, jusqu'à la perte des liens sociaux de peur de retomber sur ce genre de personnes. "Dans les atteintes à la santé, ce sont des personnes qui sont épuisées souvent", remarque encore la directrice de la Clinique du travail. "On voit des dépressions. On a pu avoir jusqu'à des personnes qui ont envisagé un passage à l'acte."

Les spécialistes conseillent d'en parler, au sein de l'entreprise ou auprès d'un thérapeute, parce qu'il est difficile de s'en sortir tout seul.

Pauline Rappaz/oang

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"Il est très facile de harceler une personne à distance"

La crise du coronavirus et le recours massif au télétravail ont-ils atténué la violence dans le monde professionnel? Pas si sûr selon Karine Lempen, professeure de droit du travail à l'UNIGE. "A première vue, on pourrait se dire que les mesures de distanciation sociale ont pu atténuer la violence ou en tout cas rendre plus difficiles certains attouchements non souhaités, par exemple. Mais en fait on se rend compte qu'il est très facile de harceler une personne à distance", assure-t-elle dans La Matinale.

"Il y a déjà eu des cas tranchés par le Tribunal fédéral où un harcèlement sexuel a été admis alors qu'un supérieur hiérarchique ne cessait d'importuner sa subordonnée via des SMS alors que celle-ci était chez elle en incapacité de travailler. Il serait intéressant d'étudier si ce recours accru au télétravail dans une période de crise a eu pour effet une augmentation du stress au travail et donc aussi des comportements violents. Il est aussi plus facile d'avoir des mots humiliants, dénigrants, alors qu'on est bien à l'abri derrière un écran", ajoute Karine Lempen.

>> L'interview de Karine Lempen dans La Matinale: