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Traitement de choc de la Banque d'Angleterre

Le plan a été concocté en collaboration avec Downing Street.
Le plan a été concocté en collaboration avec Downing Street.
La Banque d'Angleterre a adopté lundi un traitement de choc pour débloquer le marché du crédit et soutenir une économie britannique vacillante, en permettant aux banques de recycler leurs prêts immobiliers à hauteur de soixante milliards d'euros au minimum.

Le principe est simple: les banques vont pouvoir échanger auprès
de la Banque d'Angleterre, la BoE, des crédits immobiliers perçus
comme très risqués contre des emprunts d'Etat réputés sûrs qu'elles
utiliseront pour se refinancer.

Actuellement, les banques ont beaucoup de mal à revendre leurs
prêts immobiliers sur le marché du crédit depuis la crise des
"subprime" qui rend les investisseurs très méfiants. L'échange
durera de un à trois ans, et le montant des prêts échangés devrait
tourner autour de 50 milliards de livres, selon une estimation
initiale de la BoE. Toutefois, ce montant n'est pas limité et
pourrait atteindre plus du double, selon son gouverneur Mervyn
King.

Liquidités regonflées

Grâce à ce tour de passe-passe financier, les banques, qui
croulent sous des portefeuilles de crédits dont elles avaient le
plus grand mal à se défaire, se retrouveront avec des liquidités
regonflées. Les autorités espèrent que cela les poussera à prêter à
des conditions plus favorables aux entreprises et aux particuliers,
notamment aux primo-accédants qui ont de plus en plus de
difficultés à financer l'achat de leur logement.



L'objectif est aussi que les banques répercutent enfin sur leurs
clients la baisse du taux directeur de la BoE - tombé à 5% au début
du mois contre 5,75% en juillet - alors qu'elles ont plutôt
tendance à engraisser leurs marges.

Moyen de pression

En contrepartie, les autorités pourraient faire pression sur les
banques pour qu'elles assainissent leurs comptes, en dressant un
bilan exhaustif de leurs dépréciations liées à la crise des
subprimes, et en renforçant leurs fonds propres mis à rude épreuve
par la crise financière, au besoin via des augmentations de
capital.



La deuxième banque du pays, Royal Bank of Scotland, a justement
confirmé lundi qu'elle projetait une levée de fonds qui pourrait
atteindre 10 à 12 milliards de livres, soit 20 à 24 milliards de
francs, ce qui en ferait la plus importante jamais réalisée par une
entreprise britannique, et ses concurrentes pourraient suivre son
exemple.



Selon des commentateurs, l'avenir du Premier ministre Gordon
Brown, dont la cote de popularité s'est effondrée au fur et à
mesure que les perspectives économiques se dégradaient et que les
prix immobiliers commençaient à chuter, pourrait dépendre de la
réussite de ce plan.



afp/hof

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Tournant stratégique salué par les experts

Ce traitement de choc contre le "credit crunch", le phénomène de contraction du crédit apparu l'été dernier dans le sillage de la crise des prêts risqués aux Etats-Unis, et qui alimente un climat de sinistrose en Grande-Bretagne, marque un tournant stratégique pour la Banque d'Angleterre.

Celle-ci répugnait jusqu'ici à soutenir les banques, craignant de les pousser à prendre des risques inconsidérés, comme l'a expliqué à plusieurs reprises son gouverneur Mervyn King, très critiqué pour sa gestion prudente.

Le plan, concocté en lien étroit avec Downing Street, et que les services européens de la concurrence vont examiner pour vérifier qu'il n'entrave pas les règles sur les aides d'Etat, pourrait aider à redresser la croissance britannique, qui risque de tomber à 1,4% cette année selon le FMI, contre 3% en 2007.

Les économistes ont salué l'opération de la Banque d'Angleterre, tout en prévenant que ce traitement de choc ne suffira pas, à lui seul, à résoudre la crise financière.

"C'est un pas important pour tenter de restaurer la confiance dans les marchés financiers", a estimé Howard Archer, du cabinet Global Insight. Il va "aider à dégeler les conditions sur le marché du crédit", selon Philip Shaw d'Investec, tandis que Michael Hume, de Lehman Brothers, y voit une "mesure radicale" bienvenue mais "pas une panacée".