Il y a encore cinq ans, les cours du brut oscillaient entre 22
et 28 dollars au sein d'une fourchette définie par l'Opep,
l'Organisation des pays exportateurs de pétrole.
L'invasion américaine en Irak a allumé l'étincelle sur les
marchés de l'or noir et s'est traduite par de nombreuses attaques
contre des installations pétrolières.
Diverses causes
Aujourd'hui, l'éventualité d'une incursion turque pour lutter
contre le PKK dans le nord de l'Irak, région pétrolière, ajoute de
l'huile sur le feu. Les tensions politiques dans d'autres pays
producteurs importants ont également contribué à la nervosité du
marché de l'or noir: notamment la grève qui a paralysé le secteur
pétrolier du Venezuela entre 2002 et 2003 et les attaques
récurrentes contre les infrastructures du secteur et les
enlèvements de travailleurs étrangers au Nigeria.
A cela s'ajoute "un manque d'investissement des pays de l'Opep.
D'où une perte de capacités de production en Iran, au Nigeria ou en
Irak à l'heure où la demande augmentait fortement", remarque Leo
Drollas, directeur adjoint du Centre for Global Energy
Studies.
Parallèlement, le monde connaît depuis cinq ans une très forte
croissance, particulièrement spectaculaire chez les géants
émergents comme la Chine ou l'Inde, générant une consommation
pétrolière effrénée. La Chine est aujourd'hui le deuxième
consommateur mondial d'énergie, derrière les Etats-Unis, mais
devrait les doubler peu après 2010, estime l'Agence internationale
de l'Energie.
Craintes de pénurie
Cette envolée de la demande a entraîné une tension sur les
stocks avec des craintes de pénurie récurrentes, d'autant plus que
la capacité de raffinage mondiale est insuffisante. L'Opep a par
ailleurs adopté une politique plus agressive, abandonnant sa
fourchette de prix, et défendant des seuils de cours de plus en
plus élevés par des baisses de production.
Fin 2006, les prix du brut étaient ainsi tombés autour de 50
dollars le baril et le cartel a voté deux baisses de production
successives pour un total de 1,2 million de barils par jour (mbj).
La seconde baisse, entrée en vigueur en février, "a été celle de
trop", juge Léo Drollas.
Les pays consommateurs réclament à travers l'AIE une hausse de
production d'environ 1,8 mbj de l'Opep, qui pompe actuellement 27,2
mbj, en tenant compte de la hausse de production d'un demi-million
de barils décidée en septembre. Mais celle-ci n'a pas suffi à
empêcher une envolée des cours de 20 dollars en deux mois.
"L'Arabie saoudite a augmenté sa production mais trop lentement",
estime Léo Drollas.
Spéculations
L'Opep répète elle que cette flambée est due aux problèmes de
raffinage et à la spéculation. Le marché à terme pétrolier est en
effet devenu très rentable alors que les rendements boursiers
retombent. L'or noir est aussi devenu une valeur refuge pour les
investisseurs qui veulent se couvrir contre la chute du dollar.
Celle-ci contribue aussi à la hausse du brut car elle incite les
producteurs à réclamer plus pour la même quantité de pétrole, afin
de maintenir leur pouvoir d'achat.
A l'approche du seuil psychologique des 100 dollars, la
spéculation s'est intensifiée. "Plus les prix montent, plus cela
attire de gens qui parient sur une poursuite de cette hausse. Ce
qui fait grimper les prix. Comme une prophétie auto-réalisatrice".
Ou comme une bulle spéculative, conclut Léo Drollas.
afp/boi
L'évolution du prix du pétrole
1970: le prix officiel du pétrole saoudien est fixé à 1,80 dollar le baril.
1974: le prix auquel les raffineries acquièrent le pétrole dépasse 10 dollars le baril après le premier choc pétrolier (guerre du Kippour).
1979: le 2e choc pétrolier (révolution en Iran) fait passer les 20 dollars.
1990: les cours dépassent les 40 dollars le baril, avant la Guerre du Golfe.
2004: le seuil des 40 dollars est franchi à nouveau.
2005: les 70 dollars sont atteints, lorsque l'ouragan Katrina frappe le Golfe du Mexique.
12 septembre 2007: le baril de "light sweet crude" dépasse 80 dollars. Le marché s'inquiète de la fonte des stocks pétroliers américains et de diverses tensions géopolitiques.
18 octobre: 90 dollars.
26 octobre: 92 dollars.
29 octobre: 93 dollars.
31 octobre: 95 dollars.
1er novembre: 96 dollars.
6 novembre: 97 dollars.
7 novembre: 98 dollars.
Le baril, explications
Cela fait longtemps que le baril de pétrole ne sert plus en tant que conteneur, mais il demeure la référence internationale de mesure pour le commerce du pétrole.
Unité anglo-saxonne de mesure de volume, le baril de pétrole correspond de nos jours à 159 litres (ou 42 gallons américains).
Le baril en tant que conteneur pour le pétrole a été largement utilisé jusqu'aux années 1860, et sa capacité variait entre 150 et 190 litres. Mais à partir de 1865, avec la naissance des oléoducs et l'usage accru de réservoirs et de wagon-citernes, le pétrole n'a presque plus jamais été transporté en barils.
Avant de devenir un conteneur de pétrole, le baril en bois était utilisé pour le vin, la bière, le whisky et le poisson.
En 1972, le baril de 42 gallons est adopté et devient l'unité de mesure universelle du pétrole.
Les cours mondiaux du pétrole brut (le Brent de la mer du Nord à Londres et le "light sweet crude" à New York) sont calculés par baril et déterminés en dollars.